ÉCONOMIE
ANALYSE MIXTE
Auteur(s) : Ségolène Minster
Le 14 juin dernier, à Paris, s'est tenue l’assemblée générale de l’Association des fabricants de compléments et fournisseurs d’additifs et ingrédients fonctionnels pour l’alimentation animale (Afca-Cial). L’occasion de présenter ses activités.
Actrice de la nutrition animale depuis plus de 80 ans, l’association rassemble 136 entreprises, représentant 200 établissements en France, 9 000 emplois, 2 milliards de chiffre d’affaire dont 40 % à l’export (Union européenne et hors Union européenne). En 2023, la production de 500 000 tonnes de compléments pour l’alimentation animale se décomposait ainsi : 148 000 tonnes de prémélanges, 64 000 tonnes d’aliments liquides, 332 000 tonnes d’aliments minéraux standards et 40 000 tonnes de blocs à lécher. Pendant cette assemblée générale, Jean-François Labarre (N 87) a été élu président du conseil d’administration. Géraldine Chanu (T 99) est directrice, et encadre une équipe en charge de missions techniques et de veille réglementaires, relayée aux adhérents afin de les aider à maintenir leur conformité. L'équipe tient à jour la liste des additifs autorisés en alimentation animale et a élaboré des guides de bonne pratiques pour l’utilisation d’allégations en nutrition animale. Dans ce secteur, il n’existe pas de demande d’autorisation de mise sur le marché a priori, mais les metteurs sur le marché doivent constituer un dossier de preuve scientifique en support des allégations, qu’il tient à disposition des autorités. Deux annexes ont été élaborées en 2023 pour clarifier le cadre réglementaire des allégations environnementales et celles liées au bien-être animal.
Une veille active pour la sécurité sanitaire des aliments
Parmi les missions de l’association figure celle d'une nutrition animale sûre et saine, réalisée en partie dans le cadre d’un partenariat avec Oqualim, une association qui coordonne les démarches collectives en matière de qualité et de sécurité sanitaire des aliments pour animaux. L’Afca-Cial gère le plan d’autocontrôles mutualisé « Compléments ». En cas de détection de non-conformité (dioxines, PCB, salmonelles, métaux lourds, etc.), elle émet des recommandations techniques à ses adhérents pour adapter les plans de contrôle. Des études exploratoires sont réalisées sur les contaminants émergents, tel que l’oxyde d’éthylène, les substances per- et polyfluoroalkylés (PFAS), les perturbateurs endocriniens et les nanoparticules. Ceci afin de mettre en place des plans de surveillance et de gestion appropriés. Les huiles minérales bénéficient aussi de l’attention d’Oqualim, même si, à ce jour, il n’existe pas de réglementation pour l’alimentation animale. Il s’agit de mélanges complexes d’hydrocarbures saturés d’huiles minérale (Mosh pour Mineral Oil Saturated Hydrocarbons) et d’hydrocarbures aromatiques d’huile minérale (Moah pour Mineral Oil Aromatic Hydrocarbons). Leurs points d’entrée sont divers et peuvent se présenter à toutes les étapes de la transformation de l’aliment : culture (produits phytosanitaires), transformation (fuite de lubrifiants), stockage (migration en provenance des encres, adhésifs et matériaux des emballage). La position actuelle est de maintenir leur niveau aussi bas que cela puisse raisonnablement être atteint en suivant les bonnes pratiques à toutes les étapes. Concernant les mycotoxines, les recommandations européennes doivent être réactualisés à l’été 2024, de nombreuses teneurs maximales étant revues à la baisse. Les mycotoxines sont des métabolites secrétées par de moisissures, principalement du genre Fusarium, Aspergillus et Penicillium. Un champignon peut produire différentes mycotoxines selon les conditions (température, humidité, variations climatiques, etc.) et les végétaux hôtes. Cette année, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a rendu un avis sur les alcaloïdes de l’ergot en alimentation animale ainsi que des lignes directrices pour l’évaluation des processus de détoxification des aliments pour animaux que les industriels devront intégrer dans leur fonctionnement.
La nutrition animale garante de la durabilité de l’élevage
La durabilité du secteur des compléments était aussi à l’ordre du jour. L’Afca-Cial, en collaboration avec d’autres acteurs de l’alimentation animale, a construit Valoralim, une filière de collecte et de recyclage des déchets d’emballage, pour être en conformité à la loi Agec (relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire) au 1er janvier 2025. Ce projet fédère 242 metteurs sur le marché, pour couvrir 7000 tonnes d’emballage. En juillet 2023, les premières écocontributions ont été intégrées dans le prix des produits. L’objectif est de recycler 80 % des emballages à l’horizon 2028.
En 2023, le groupe de travail durabilité, au sein de l’association, a produit une documentation technique de référence pour ses adhérents : un guide méthodologique pour le calcul de l’empreinte environnementale d’un aliment composé et des recommandations pour la réalisation d’analyses de cycle de vie des additifs, des ingrédients fonctionnels et des prémélanges.
Philippe Becquet, agronome, a souligné que la nutrition apporte des réponses face aux enjeux de durabilité et de décarbonation de l’élevage. Traditionnellement, l’alimentation animale est liée à la valorisation de coproduits de l’alimentation humaine. Les additifs et les ingrédients fonctionnels agissent pour réduire les pertes avec des conservateurs, l’import de protéagineux grâce aux acides aminés, l’utilisation de phosphore minéral avec des enzymes qui valorisent le phosphore des plantes, les rejets de méthane chez les ruminants ou augmenter l’efficacité alimentaire avec les probiotiques ou les enzymes.
Maintenir la compétitivité
À l’instar des autres secteurs économiques, la compétitivité s’est hissée en tête des orientations stratégiques 2024-2028 de l’association. L’Afca-Cial note une érosion des performances commerciales de la France : en 2022, le pays restait le troisième producteur d’aliments pour animaux dans l’UE, mais a connu une baisse de production de 7 %. Elle a souligné un point de vigilance sur les importations à plusieurs niveaux. En amont, le secteur des compléments dépend fortement des importations depuis les pays tiers, notamment pour les vitamines et les acides aminés. En aval, les ventes françaises pourraient s’éroder. À titre d’exemple, 50 % du poulet consommé en France est importé. La compétitivité – hors prix –a retenu aussi l’attention de l’association, qui vise à établir un plan intersyndical de sobriété hydrique pour une gestion résiliente de l’eau. Un état des lieux de ses consommations et usages dans la nutrition animale a été réalisée par le Syndicat national de l'industrie de la nutrition animale, la coopération agricole et l’Afca-Cial. L’objectif au niveau national ? Réduire de 10 % les prélèvements en eau du secteur, en améliorant l’efficacité hydrique.