Biologie médicale
FORMATION CANINE
Auteur(s) : Mylène Panizo Conférencière Catherine Trumel (T91), diplômée de l’European College of Veterinary Clinical Pathology (ECVCP), professeure responsable de l’unité pédagogique de biologie médicale de l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT) et du laboratoire central de biologie médicale de l’ENVT. Article rédigé d’après la webconférence « Intérêt de l’hémogramme lors d’hyperthermie », organisée par le laboratoire Idexx, le 21 mars 2024.
L’étude d’un hémogramme comprend l’analyse chiffrée de la numération formule sanguine, celle du graphique (nuage de points) généré par l’analyseur, et l’observation du frottis sanguin. L’hémogramme peut permettre de distinguer une fièvre d’une hyperthermie, d’en suspecter les causes sous-jacentes et d’en apprécier la gravité.
Différence entre hyperthermie et fièvre
L’hypothalamus est le centre thermorégulateur de l’organisme. Il fixe la température corporelle d’équilibre, entre 38 et 38,5°C chez les chiens et les chats. En cas d’augmentation de celle-ci à plus de 39,2 °C, l’animal peut présenter une hyperthermie ou une fièvre.
L’hyperthermie est associée à des efforts physiologiques et comportementaux pour compenser l’augmentation de température (polypnée, recherche d’un endroit froid, etc.). Le point d’équilibre de l’organisme reste à 38-38,5 °C.
La fièvre est une réponse adaptative de l’organisme. Elle est associée à l’augmentation de la température d’équilibre, en réponse à la libération de pyrogènes (endogènes tels que des cytokines inflammatoires, ou exogènes, par exemple lors d’infection bactérienne). La fièvre peut provoquer divers symptômes : léthargie, anorexie, troubles digestifs, etc.
Une fièvre d’origine indéterminée (FOI) est définie comme une fièvre présente pendant au moins trois semaines, sans cause apparente, suite à au moins trois visites en clinique vétérinaire et/ou trois jours d’hospitalisation, comprenant un examen clinique complet et la réalisation d’examens complémentaires (hématologie, biochimie, analyse d’urine).
Les causes d’hyperthermie et de fièvre sont présentées dans le tableau 1.
Pour différencier une fièvre d’une hyperthermie, il convient de s’appuyer sur l’anamnèse (mode de vie, âge, statut vaccinal, contacts récents avec d’autres animaux, exposition à des températures élevées, etc.) et sur l’examen clinique (présence de plaies ou de masse, adénomégalie, auscultation cardio-respiratoire anormale, présence d’écoulements nasaux, etc.). En l’absence de cause apparente, il est nécessaire de réaliser des examens complémentaires : hémogramme, biochimie, test Fiv-Felv chez le chat, analyse d’urine, et éventuellement d’effectuer un bilan inflammatoire large (dosage de la protéine C réactive chez le chien, de la protéine sérique amyloïde A chez le chat, protidémie, albuminémie et calcul du rapport albumine/globuline, électrophorèse des protéines sériques, etc.).
Apports de l’hémogramme en cas d’hyperthermie
En cas de stress, l’organisme libère de l’adrénaline (réponse adaptative nommée « fight-or-flight » soit en français « combattre ou fuir »), ce qui induit une hyperthermie, caractérisée sur l’hémogramme par une leucocytose fugace. Chez le chien, il s’agit généralement d’une leucocytose neutrophilique avec des neutrophiles d’aspect normal. Chez le chat (et notamment le jeune animal), une lymphocytose parfois sévère (jusqu’à 36 000 lymphocytes par microlitre) est constatée, associée ou non à une neutrophilie.
Un coup de chaleur est caractérisé par la présence de neutrophiles hypersegmentés nommés neutrophiles botryoïdes (leurs aspects sont dus à un vieillissement prématuré). La moelle osseuse souffre rapidement d’un coup de chaleur et devient plus perméable. Des érythroblastes peuvent ainsi être observés (alors que l’animal n’est pas anémié). Dans les cas sévères, une polyglobulie (par déshydratation) et une thrombopénie (coagulation intravasculaire disséminée) sont constatées.
Intérêts de l’hémogramme en cas de fièvre
Les anomalies de l’hémogramme pouvant être constatées lors de processus inflammatoire induisant de la fièvre sont résumées dans le tableau 2.
La lignée rouge est principalement touchée lors d’inflammation chronique (dès 7 jours chez le chat) ou lors d’AHMI.
La lignée blanche est atteinte lors de processus inflammatoires, aigus ou chroniques, mais on peut observer aussi bien une neutrophilie qu’une neutropénie, associée ou non à une lymphocytose ou à une lymphopénie.
Des modifications de l’aspect des cellules sont visibles sur le frottis en cas de foyer inflammatoire, notamment la présence de band cells (neutrophiles immatures, caractérisés par un noyau en fer à cheval non lobulé). Les neutrophiles immatures ont une taille supérieure à celle des neutrophiles matures. Les nuages de points générés par l’analyseur se dispersent et la distinction entre les cellules est moins visible.