EXPRESSION
Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR CHANTAL BÉRAUD
Même si elle reste marginale, cette pratique se développe en France. Des praticiens commencent à réfléchir à comment réussir de telles introductions.
MAUD GRAILLOT-DENAIX (A 22)
Auteure d’une « Étude du comportement et du bien-être animal dans le cadre du mouvement “Pet at work” »
UN VÉTÉRINAIRE POUR ÉVALUER
Pour ma thèse vétérinaire, j’ai diffusé un questionnaire pour évaluer le bien-être des chiens au travail. Je n’ai obtenu que douze réponses complètes représentant quinze chiens. Dans cette analyse qualitative, peu de comportements de mal-être ont été relevés. Cependant, chaque individu est différent. Répéter cette étude à plus large échelle permettrait de vérifier cette tendance. Pour une meilleure adaptation du chien, certains points sont conseillés : faire découvrir au chiot les situations qu’il va rencontrer sur le lieu de travail avant ses trois mois, apporter un minimum de matériel pour son bien-être (lieu de couchage adapté, gamelle d’eau, jeux…). Il doit aussi pouvoir choisir s’il désire interagir ou non. Enfin, son caractère propre compte. Donc une évaluation comportementale individuelle par un vétérinaire spécialisé au préalable est souhaitable. Elle permettrait de donner des conseils adaptés à chaque chien afin d’estimer s’il est souhaitable ou non pour lui de venir sur le lieu de travail.
EMMANUELLE TITEUX (A 88)
Vétérinaire spécialiste en médecine du comportement (Paris)
L'ANIMAL DEVRA S’ADAPTER…
Deux points de vue sont à considérer. Pour le maître, les points positifs sont qu’il partage plus de moments avec son chien et éprouve moins de culpabilité à le laisser seul à son domicile. Côté chien, c’est plus complexe à analyser. Certes, l’animal est moins isolé, mais il doit faire preuve de nombreuses capacités pour s’adapter. Par exemple, il doit pouvoir changer d’environnement et cohabiter avec des humains différents presque quotidiennement. Pour toutes ces raisons, il serait souhaitable que le chien fasse l’objet d’un examen en médecine du comportement par un vétérinaire. Celui-ci pourrait juger, par exemple, de son degré de familiarité avec l’être humain (dont son rapport aux inconnus), afin de valider si la personnalité du chien est adaptée ou non. Car le chien « au travail » ne doit naturellement pas présenter de dangerosité pour les autres (personnel, différents animaux présents…), ni aucune menace hygiénique. Il serait intéressant d’avoir plus d'études sur le sujet pour ensuite élaborer un guide pratique de mise en œuvre optimale.
AUDE DESMYTER-LAROCHE (A 06)
Praticienne en canine à Paris
IL NE DOIT PAS ÊTRE PRIS POUR UNE PELUCHE
Il y a beaucoup d’articles actuellement sur les réseaux sociaux sur ce qu’apporte à l’être humain le fait d’avoir son chien au travail. Parmi mes clients, de plus en plus de jeunes propriétaires (25-45 ans) le font dans de petites entreprises (bureaux, cabinets, etc.). On passe donc d’un épiphénomène à une tendance… Mais cela pose divers questionnements. Mieux vaut en parler avant à son vétérinaire pour avoir son avis concernant le caractère (adapté ou pas) du chien et ne pas accueillir l’animal n’importe comment dans des bureaux ! Il convient par exemple de sécuriser les lieux (attention aux câbles électriques, aux portes automatiques…). Il faut aussi disposer de suffisamment de place (lieu de refuge). Quant aux différents humains qui entourent l’animal, ils doivent savoir décrypter les signes de contrariété d’un chien (pour éviter notamment les morsures). Enfin, le chien ne doit pas non plus être pris pour une peluche ! Donc oui, un tel accueil est possible, mais sous certaines conditions et en prenant systématiquement en compte le bien-être de l’animal.