Urgences
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Marine Neveux Raymond Pujol (T16), spécialiste en chirurgie équine D’après la conférence « Epistaxis : prise en charge en urgence et options thérapeutiques » présentée lors de la journée européenne de l’Assocation vétérinaire équine française (Avef), à Roissy, le 28 mars 2024.
Est-ce qu’une épistaxis est une urgence ? Pour tenter d'y répondre, plusieurs questions sont soulevées : quelle quantité de sang a été perdue ? L’hémorragie est-elle active ou le cheval a-t-il saigné une fois ? Quelle est la couleur du sang ? Quelle est la durée de l’hémorragie ? Est-elle apparue au repos ? À l’exercice ? Y a-t-il d’autres signes associés ?
Le propriétaire panique vite, il convient de relativiser et de recueillir des informations objectives conseille notre confrère Raymond Pujol. L’épistaxis est une urgence si elle est active, abondante, profuse.
Diagnostic différentiel
L'approche de l'épistaxis dépend de l’origine du saignement : soit des voies respiratoires hautes (cavités nasales suite à un choc, un granulome ou polype, une rhinite fongique, ou la cause la plus commune lors de sondage nasogastrique). Au niveau des sinus, une sinusite peut être associée à un jetage purulent, et l'on peut avoir un saignement. Fracture des os, de la tête, hématome de l’ethmoïde peuvent aussi provoquer une épistaxis. D'autres causes existent : au niveau des poches gutturales avec une mycose, lors de rupture des muscles droits ventraux de la tête (auquel peut être aussi associée une fracture), et l'hémorragie pulmonaire induite à l'effort.
En urgence
Il convient d'abord de s’assurer de la sécurité des intervenants. Sur place, on fait un examen clinique rapide, on évalue la couleur des muqueuses, la température des extrémités. On regarde si c’est une épistaxis unilatérale ou bilatérale. Si c’est unilatéral, on suspecte plus une origine respiratoire haute. Si le sang est plutôt marron, on va plutôt suspecter un hématome progressif de l’ethmoïde. Si l’on a une déformation de la tête, cela peut être une fracture de la tête ou un hématome progressif de l’ethmoïde. Si c’est un trouble neurologique ou une déformation de la région parotidienne à l’arrière de la tête, on suspectera plutôt une rupture du muscle droit ventral de la tête. Enfin, s’il y a des signes de traumatisme, on suspectera plutôt une fracture ou rupture du muscle droit.
En fonction donc des signes du cheval, on a déjà une approche du diagnostic.
Examens complémentaires
On peut réaliser une prise de sang avec hématocrite et protéines totales, une endoscopie des voies respiratoires supérieures pour connaître l’origine de l’épistaxis. Si on n’a pas d’endoscope sur le terrain, on peut éventuellement faire une échographie des poches gutturales.
Gestion
Si l’épistaxis est abondante et si l’on n’a pas d’option de référer, on fait une ligature permanente de la carotide commune. Si le cheval a saigné, qu’il est stable et qu’il n’y a pas d’option chirurgicale de référer, on fait aussi une ligature. Si on a la possibilité de référer en structure, et si le saignement est abondant, il faut d’abord stabiliser le cheval, on fera une ligature permanente ou temporaire avec un drain de Penrose. Si le cheval a saigné, qu’il est stable et ne saigne plus, la recommandation est de transférer le cheval en centre de référé.
Si l’épistaxis est moins abondante et ne met pas en danger la vie du cheval, il faut d’autant plus garder son calme, discuter des examens complémentaires et des options thérapeutiques et se poser la question de savoir s’il est nécessaire ou pas de faire une ligature. Il n’y a pas vraiment de consensus sur cette question.
Notre confrère détaille les débats sur la ligature de la carotide commune et les études dédiées. Pour les poches gutturales, il existe aussi d’autres options comme l’embolisation par des coils, la mise en place de cathéters à ballonnets. Il existe d'autres traitements adjuvants comme la salpingo-pharyngotomie, la transfusion, l’oxygénothérapie, etc.
En conclusion, l'épistaxis peut être une urgence, la ligature de carotide commune est un geste qui peut sauver le cheval et reste réalisable sur le terrain. Elle peut être réversible, il faut être conscient des complications et du discours à apporter au propriétaire.