Fièvre catarrhale ovine : quelques éléments de virologie - La Semaine Vétérinaire n° 2049 du 27/09/2024
La Semaine Vétérinaire n° 2049 du 27/09/2024

Maladie réglementée

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Ségolène Minster en collaboration avec Clothilde Barde

Article rédigé d’après une conférence du Dr Emmanuel Bréard (virologiste, Agence nationale sécurité sanitaire alimentaire nationale [Anses]) présentée lors d'un webinaire portant sur la fièvre catarrhale ovine organisé le 6 septembre 2024.1

Le virus de la fièvre catarrhale ovine (FCO), tout comme celui de la maladie hémorragique épizootique (MHE), est un orbivirus. La situation est complexe à appréhender, car il y a 36 sérotypes du virus de la FCO, chacun pouvant compter différentes souches virales. Il s’agit de virus non enveloppés, abritant un génome segmenté de dix ARN double brin. Les réassortiments sont possibles exclusivement entre virus de la FCO ou entre virus de la MHE, mais il n’y a pas de réassortiments possibles entre des virus FCO et MHE. Seuls les sérotypes 1 à 24 sont réputés induire des symptômes cliniques et sont réglementés. Il n’y a donc pas une FCO mais des FCO, avec des situations réglementaires différentes selon les sérotypes. Pour un même sérotype, certaines souches de la FCO peuvent être virulentes et induire des signes cliniques, principalement chez les ovins, parfois également chez les bovins ; tandis que d’autres circulent silencieusement.

Quelle est la distribution et l’origine de la FCO ?

Dans les années 2000, les premières épizooties de FCO sont apparues dans le sud de l’Europe, notamment en Corse. Différents sérotypes ont ensuite émergé au cours des années suivantes. Lorsque les souches étaient déjà présentes en Afrique du Nord et sur la péninsule arabique, ces émergences ont pu être anticipées en Europe. Toutefois, certaines d’entre elles ont une origine indéterminée (BTV-3 aux Pays Bas et nouvelle souche BTV-8 dans l’Aveyron en 2023), ou seraient dues à des activités humaines telles que l'utilisation de semence contaminée (BTV-8 en 2015 dans l'Allier) ou le déplacement d’animaux (BTV4 en Haute-Savoie en 2017). En France continentale, deux souches de FCO sérotype 8 (dont une souche qui a émergé dans l’Aveyron 2023 à l'origine de morbidité et de mortalité chez les ovins) et une souche de sérotype 4 évoluent sur un mode enzootique depuis 2017. De plus, le BTV3, venu des Pays Bas, est présent en France depuis quelques semaines et très virulent chez les ovins et chez les bovins. Par conséquent, actuellement en France continentale et en Corse, quatre souches de BTV circulent activement : le BTV-8 enzootique, le BTV-8 apparu en Aveyron en 2023, le BTV-3 et le BTV-4 en Corse.

Quel est l’intérêt de la vaccination ?

Tous les vaccins réduisent les symptômes et l’impact de la mortalité. Les vaccins FCO 4 et 8 protègent contre la virémie, évitant ainsi la contamination des culicoïdes et la transmission à un autre animal, ce qui autorise à sortir l’animal de la zone réglementée. Les effets protecteurs de la vaccination commencent à être observés dix jours après la première injection. Par conséquent, il convient de vacciner le plus rapidement possible les animaux afin que l’immunité soit efficace au moment de l’infection virale. Quant aux vaccins FCO-3 disponibles actuellement, ils diminuent la virémie, réduisent les signes cliniques et la mortalité, mais ils n’empêchent pas la propagation du virus ni l'apparition de signes cliniques chez les animaux. Ils sont actuellement sous autorisation temporaire d’utilisation, le recourt au principe de la cascade n’est donc pas possible2 et ils ne sont pas utilisables pour sortir de zone réglementée. Enfin, la protection des animaux vaccinés contre la FCO-4 et contre la FCO-8 vis-à-vis de la FCO-3 est peu probable car le sérotype 3 est génétiquement distinct des sérotypes 4 et 8.

Comment établir le diagnostic biologique de la FCO ?

Les prélèvements possibles sont une prise de sang sur tube EDTA ou un prélèvement de la rate, sur lesquels peuvent être réalisés dans un réseau de cinquante-cinq laboratoires vétérinaires départementaux (LVD) un isolement viral ou une RT PCR (RT-PCR tous sérotypes et RT-PCR spécifique sérotype) ou un séquençage en laboratoire national de référence. Si le prélevement est fait sur tube sec, un test ELISA peut être réalisé dans un réseau de cinquante LVD ou une séroneutralisation en laboratoire national de référence. Le type de prélevement et d'analyse à réaliser dépend du moment du prélèvement par rapport à la contamination. Ainsi, la virémie (pour un isolement viral) dure pendant 15 à 21 jours chez les ovins et 30 jours chez les bovins.
L'amplification génique qui permet de réaliser une PCR persiste pendant environ 180 jours (au maximum 7 mois) chez les bovins. Enfin, la séroconversion a lieu à 5 jours chez les ovins, de 7 à 15 jours chez les bovins et de 13 à 14 jours chez les caprins.

  • 1. Webinaire organisé par le groupement de défense sanitaire (GDS France) et la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) en partenariat avec l'organisme français de recherche agronomique et de la coopération internationale pour le développement durable des régions tropicales et méditerranéennes (Cirad) et l’Anses.