Effets de l’anesthésie volatile sur l’humain et l’environnement - La Semaine Vétérinaire n° 2060 du 13/12/2024
La Semaine Vétérinaire n° 2060 du 13/12/2024

Médicament

ANALYSE CANINE

Auteur(s) : Par Sarah André

La thématique des risques inhérents à certains aspects de la pratique vétérinaire dans une optique « One Health » a été abordée lors du congrès de l'Afvac au cours d'un module de conférences consacré aux anesthésiques volatils.

« Il y a pas mal d’idées reçues inexactes» Voilà le constat que Patrick Verwaerde (T 90), chef du service anesthésie-urgences-soins intensifs de l’ENVA, a fait au cours de sa conférence intitulée « Pratique de l’anesthésie volatile ». L’objectif de l’anesthésie générale est d’obtenir et de maintenir les quatre qualités suivantes : narcose, myorelaxation, analgésie et stabilité des fonctions vitales. Quand un praticien a recours à l’anesthésie volatile, la qualité à laquelle il convient de s’intéresser est la narcose. Divers hydrocarbures halogénés (isoflurane, sévoflurane, desflurane) sont administrés à l’animal par inhalation pour l’induction et/ou la maintenance d'un état d'inconscience. Bien que les avantages de ces médicaments hypnotiques soient nombreux (ajustement de la profondeur de la narcose, évaluation aisée, administration continue, éveil facile, etc.), quelques inconvénients sont à prendre en considération.

Répercussions sur le personnel

Outre les risques inhérents à l’anesthésie volatile en tant que telle sur l’animal (dépression cardio-vasculaire et respiratoire, hypothermie, etc.), d’autres ne doivent pas être négligés. Patrick Verwaerde a évoqué une potentielle toxicité pour les soignants (hépatopathie, tubulopathie, pneumopathie et tératogénicité) – les données disponibles sur les risques d’une exposition humaine aux anesthésiques volatiles restent limitées1. Natalia Grytsyk et Eddy Langlois, de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS)2, ont fait une présentation sur les expositions professionnelles à l’isoflurane en prenant pour exemple une chirurgie sur les rongeurs. Leurs travaux ont pour objectif d’identifier les sources d’émissions afin d’apporter des solutions pour diminuer les émissions d’isoflurane. Au moyen de systèmes de prélèvements individuels et d’ambiance, leurs mesures ont permis de constater une augmentation progressive des expositions individuelles à l’isoflurane - sous filtre - au cours du temps. Leur conclusion est la suivante : « La filtration sur cartouche n’est pas efficace. »

Une forte empreinte écologique

Les hydrocarbures halogénés constituent de potentiels polluants pour l’environnement. Patrick Verwaerde l'a ainsi illustré lors de sa conférence : « Une heure de narcose volatile équivaut à un trajet de 600 kilomètres en voiture thermique. » Pour pallier ces éventuels effets néfastes, il convient de maîtriser les effluents, c’est-à-dire adapter et régler correctement le débit, tout comme limiter les fuites dans le circuit de manière à éviter que ces gaz ne s'échappent dans l’atmosphère. Patrick Verwaerde donne la recommandation suivante : « Idéalement, avant chaque utilisation, il faut vérifier l’étanchéité du circuit, à la fois pour limiter les risques sur l’environnement, mais aussi pour les coûts que cela génère. » D’autres bonnes pratiques en anesthésie sont à mettre en place pour limiter les risques : « Plus la prémédication est efficace, moins on a recours à la narcose. C’est bon pour l’animal, c’est bon pour l’environnement et c’est bon pour les coûts du vétérinaire », a conclu Patrick Verwaerde.

  • 2. Laboratoire de Métrologie des expositions aux polluants organiques (Météor).