Premiers impacts sanitaires des FCO-3 et FCO-8 dans les troupeaux de bovins et d’ovins français  - La Semaine Vétérinaire n° 2064 du 31/01/2025
La Semaine Vétérinaire n° 2064 du 31/01/2025

ANALYSE MIXTE

Auteur(s) : Par Clothilde Barde

Le 20 décembre dernier, les groupements de défense sanitaire et leurs fédérations régionales ont publié les résultatsd'une enquête menée dans des élevages de bovins et d’ovins afin d'évaluer la complexité de la situation sanitaire actuelle liée aux épizooties de fièvre catarrhale ovine de sérotypes 3 (FCO-3) et 8 (FCO-8) en France pour la saison 2024.

« Une forte variabilité de morbidité et de mortalité intercheptel des prévalences de FCO-3 et de FCO-8 a été constatée entre mi-août et début novembre 2024 tant dans les élevages de bovins que dans les élevages d'ovins. » Telle est la conclusion principale d'une enquête1 menée par le réseau des groupements de défense sanitaire (GDS) entre octobre et novembre 2024 pour appréhender la situation sanitaire dans des élevages de différents départements français atteints de FCO-3 et de FCO-8. Les deux sérotypes de FCO qui circulent actuellement en France (nouvelle souche BTV8-France 2023 et BTV-3 détectées) pour la première fois en France continentale en juillet 2024) se sont en effet propagés depuis leur apparition de façon épizootique et ont induit un retentissement clinique dans de très nombreux élevages.

Influence variable sur la morbidité et la mortalité

C'est donc pour évaluer les premières répercussions cliniques de l’arrivée de la FCO-3 et de la FCO-8 France 2023 pour la saison 2024 qu'une étude a été conduite par les GDS via des appels téléphoniques passés chez les éleveurs détenant des cheptels ayant rencontré au moins 1 cas clinique confirmé depuis au moins 1 mois au lancement de l’enquête. Cette dernière a porté, pour la FCO-3, sur 168 élevages de bovins (majoritairement laitiers) issus de 8 départements et sur 69 élevages d'ovins (majoritairement allaitants) issus de 5 départements et, pour la FCO-8, sur 42 élevages de bovins issus de 7 départements et sur 35 élevages d'ovins issus de 5 départements.

D'après les résultats obtenus, dans les élevages d’ovins étudiés, la morbidité des brebis variait de 0 à 60 % avec une médiane de 8 % pour la FCO-3, et de 0 à 33 % avec une médiane d’environ 4 % pour la FCO-8. Un peu plus d’un tiers des élevages atteints de FCO-3 avaient plus de 10 % des brebis contaminées, et plus de 10 % de ces élevages comptaient plus de 30 % des brebis atteintes. Un peu plus d’un quart des élevages atteints de FCO-8 recensaient plus de 10 % des brebis atteintes et 3 % de ces élevages présentaient plus de 30 % de brebis atteintes. Par ailleurs, en ce qui concerne la mortalité des brebis, une variabilité intercheptel allant de 0 à 35 % a été observée pour la FCO-3 et de 0 à 33 % pour la FCO-8.

Quel que soit le sérotype de FCO, la mortalité est présente dans au moins la moitié des élevages étudiés et peut être très importante dans certains cheptels selon les résultats obtenus. Pour les avortements, au moins 7 % des élevages d’ovins ont observé de 1 à 25 avortements pour la FCO-3, et au moins 15 % de ces élevages présentaient au moins 1 avortement pour la FCO-8. Enfin, la mortalité des animaux âgés de 6 à 12 mois semble limitée, selon les experts. Chez les bovins de plus de 24 mois, la morbidité variait de 0 à 98 % pour la FCO-3 avec une médiane de 6 %, et entre 0 et 77 % pour la FCO-8 avec une médiane de 3 %. La mortalité, quant à elle, oscillait de 0 à 50 % pour la FCO-3 et de 0 à 29 % pour la FCO-8.

Comme l'indiquent les experts, bien que limités à l’échelle collective, certains élevages ont subi des mortalités non négligeables (presque un tiers (FCO-3) et au moins un quart (FCO-8) des élevages ont perdu au moins 1 vache). Pour les avortements, au moins 44 % (FCO-3) et 20 % (FCO-8) des élevages de bovins ont observé de 1 à 20 avortements (FCO-3) et de 1 à 6 avortements (FCO-8). Enfin, entre un quart (FCO-3) et un tiers (FCO-8) des élevages ont eu des animaux de 6 à 24 mois malades, la mortalité dans cette classe d’âge semblant limitée (de 0 à 5 animaux par élevage).

Une évaluation des grandes tendances

Comme l’indique le rapport d'enquête, il semblerait que les estimations issues de ces investigations soient moins importantes que l’incidence sanitaire réelle à l’échelle du cheptel et de la zone touchés. En effet, des éleveurs ont rapporté que de nouveaux animaux étaient tombés malades après qu'ils avaient été interrogés, car l’activité vectorielle était toujours en cours pendant l’etude. De plus, dans le cadre de ce travail de recherche, les différents impacts de la FCO sur la reproduction n’ont pas été mesurés. Toutefois, en dépit de cela, et « même s’il n’est pas possible d’extrapoler ces résultats à l’ensemble des départements du fait de la date de l’enquête, des variations de la situation sanitaire vis-à-vis de la FCO selon les départements, des différences de type et de structure d’élevage et des modalités de diffusion de la maladie (liée en partie à la densité et à l’activité de vecteurs culicoïdes) différentes selon les départements, ces premiers éléments épidémiologiques permettent de faire une première description de l’impact sanitaire des FCO-3 et des FCO-8 pour la saison 2024 ».

Selon les experts de la plateforme d'épidémiosurveillance en santé animale (ESA) 2, pour pouvoir mesurer l’impact sanitaire global après une saison d’activité vectorielle complète et mener des recherches plus poussées sur les conséquences de la FCO en termes de reproduction des ovins et des bovins, il sera intéressant d'attendre les résultats de l'enquête mise en place le 4 novembre 2024. Cette dernière, définie dans le cadre du groupe de suivi FCO/MHE (maladie hémorragique épizootique) de l'ESA pour « améliorer le suivi des cas et de l’impact clinique de la FCO-3, 8 mais aussi de la MHE », est conduite par les GDS qui le souhaitent et par téléphone auprès d’éleveurs ayant eu au moins un cas clinique de FCO ou de MHE confirmé par PCR depuis au moins 1 mois afin que la maladie ait eu le temps de commencer à diffuser au sein du troupeau. Le suivi longitudinal (au cours des mois) devrait permettre de « mieux mesurer l’impact à court, moyen et long termes de ces maladies ».