Accompagnement
ANALYSE CANINE
Auteur(s) : Par Tanit Halfon
Selon une étude menée chez des chats de refuge et de particuliers, les états de paraplégie et de paraparésie félines sont compatibles avec un bon confort de vie. L’engagement des propriétaires conditionne la prise en charge adéquate de l’animal, et illustre bien le fait de devoir se garder de tout jugement préconçu.
Un chat devenu dépendant pour ses déplacements, voire pour la miction et la défécation, suite à un traumatisme n’est pas à condamner d’office, conclut l'étude récente d’une équipe de l’Université vétérinaire de Teramo (Italie), publiée dans le Journal of feline medicine and surgery* de la Société internationale de médecine féline (l’ISFM). Dans la première partie de l'enquête conduite auprès de chats de refuge et de particuliers, 45 individus (8 de particuliers et 37 de refuges) ont été évalués par une infirmière vétérinaire pendant 1 heure, sur la base d’un outil mesurant la qualité de vie adapté par les auteurs à ces conditions particulières. À ce jour, il n’existe aucun modèle spécifique validé pour évaluer les états de paraplégie ou de paraparésie félines. Un score supérieur à 35 (sur une échelle de 0 à 70) est considéré comme compatible avec une bonne qualité de vie. Les scores se sont révélés de bons à très bons, avec un résultant médian de 64. De plus, les chats présentant une paraparésie ambulatoire (conservation d’une mobilité des membres postérieurs, même involontaire) obtenaient significativement un meilleur score que ceux présentant un état non ambulatoire (paraparésie ou paraplégie). Ces bons chiffres battent en brèche la « croyance » qui veut que ces chats aient une mauvaise qualité de vie : au contraire, « ces chats peuvent avoir une bonne vie, et ils peuvent être pris en charge de manière adéquate, même dans un environnement de refuge », précisent les auteurs.
Des soins exigeants
La seconde partie de l’enquête s’est attachée à évaluer l’impact de ces états cliniques sur les professionnels des refuges, comme sur les particuliers accueillant des chats touchés. Dans ce cadre, un questionnaire a été soumis à 38 responsables de refuge et à 40 détenteurs. Là encore, les résultats sont beaucoup plus positifs qu’on ne pourrait l'imaginer. Côté refuges, dans 71 % des cas, aider un chat touché à uriner prenait moins de 10 minutes, et dans 24 % des cas, 10 minutes. Même tendance pour l’aide à la défécation, avec moins de 10 minutes nécessaires dans 66 % des cas, et 10 minutes dans 26 % des cas. Autre résultat intéressant : dans 50 % des cas, la technique d’aide à la miction ou à la défécation a été apprise en moins de 1 semaine ; dans près de 30 % des cas, en moins de 1 mois. Côté propriétaires, il s’est avéré que 77,5 % d’entre eux avaient adopté leur chat alors qu’il était déjà paralysé. Si ce résultat constitue un biais, l’évaluation de cette population très engagée a l’avantage de montrer comment peut se dérouler le quotidien avec un chat paralysé, tout comme la courbe d’apprentissage des soins. Entre autres résultats intéressants, il est ressorti que la vidange de la vessie prenait moins de 20 minutes par jour pour 55 % des propriétaires, et entre 20 et 60 minutes pour 37,5 % d'entre eux. L’apprentissage de la technique avait demandé moins de 1 semaine pour 60 % d’entre eux, et entre 1 semaine et 1 mois pour 30 % d’entre eux. Sachant que 75 % des détenteurs ont indiqué avoir déjà eu des chats. 65 % des détenteurs ont indiqué s’occuper de leur chat entre 30 minutes et 2 heures par jour. En moyenne, les détenteurs consacrent environ 1 heure par jour à tous les soins de leur animal.
Une situation tout à fait surmontable
La proportion de propriétaires vivant seuls et celle de propriétaires vivant avec d'autres personnes sont presque équivalentes : 40 % vivent seuls, 35 % avec un partenaire, 12,5 % avec leurs parents et 12,5 % avec un ou des enfants (moyenne d'âge 18,9 ans). Dans 67,5 % des cas, ils sont pourtant les seuls à s’occuper du chat. Malgré tout, ils sont 70 % à déclarer que cela n'a pas de répercussions sur la dynamique familiale ; mais cela influence beaucoup leur vie pour deux tiers d’entre eux. Ils sont ainsi 27,5 % à partir en vacances avec leur chat, mais 10 % à ne plus partir à cause de lui. À noter tout de même que 37,5 % des propriétaires partent sans leur chat, en le laissant avec une personne de confiance. Si, sans surprise, 87,5 % n’ont jamais pensé à l’euthanasie, ces détenteurs sont très conscients de l’engagement dont il faut faire preuve pour s’occuper d’un tel animal. À la question « Les efforts fournis sont-ils excessifs ? », 45 % répondent que cette situation implique beaucoup d’efforts, mais que cela n’est pas excessif ; 50 % assurent que ce n’est pas excessif ; seuls 5 % reconnaissent que c’est excessif.
Un besoin d’accompagnement vétérinaire
Pour les auteurs de l'étude, ces résultats prouvent que ces chats « peuvent atteindre une qualité de vie exceptionnelle lorsqu’ils sont soutenus par des soignants dévoués », et que « cette pathologie ne doit pas être jugée hâtivement ». À ce propos, 42,5 % des détenteurs ont indiqué avoir reçu « des pronostics défavorables de la part de vétérinaires traitants ayant jugé la paraplégie et la rétention urinaire incompatibles avec la vie, malgré l’absence de littérature critique ». Ils montrent aussi la nécessité d’un accompagnement vétérinaire adapté, tant pour l’apprentissage des soins que pour le suivi. À ce sujet, 47,5 % des propriétaires ont indiqué n’avoir jamais emmené leur chat chez le vétérinaire pour cet état clinique, 27,5 % d'entre eux 1 fois au moins par an, et seulement 20 % de 2 à 3 fois par an. De plus, ils sont 65 % à avoir indiqué ne pas faire d’exercice de physiothérapie avec leur chat. Pour les auteurs, « des informations précises et complètes sur les soins prodigués à l'animal et les engagements potentiels doivent être communiquées par les vétérinaires ou les techniciens vétérinaires. Cela permet d'éviter la diffusion d'informations inexactes par des personnes ne disposant pas de l'expertise requise, et donc de prévenir les décisions erronées ».