Endocrinologie du métabolisme phosphocalcique - Ma revue n° 018 du 01/01/2018 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 018 du 01/01/2018

ENDOCRINOLOGIE CANINE ET FÉLINE

Moderniser l’endocrinologie clinique

Auteur(s) : Brigitte Siliart

Fonctions : 44800 Saint-Herblain
siliart.brigitte@orange.fr

La régulation phosphocalcique est essentielle au métabolisme basal des animaux. Son exploration devrait faire partie du bilan biologique de routine, car toute modification reflète une maladie grave, qu’il est utile de dépister.

La régulation du métabolisme phosphocalcique est essentielle à la croissance et à l’entretien du squelette, mais son importance résulte surtout des multiples rôles du calcium dans tous les métabolismes et les tissus, puisque le calcium contrôle les activités enzymatiques. Le mode d’action de très nombreux neurotransmetteurs ou hormones sur les activités cellulaires de tous les organes se fait à travers le calcium, par leurs effets directs sur la libération ou, au contraire, la captation du calcium, intracellulaire ou sanguin.

HORMONES IMPLIQUÉES DANS LA RÉGULATION PHOSPHOCALCIQUE

De très nombreuses hormones régissent l’équilibre ­phosphocalcique, dont trois principales : le calcitriol issu du groupe vitaminique D, la PTH et la calcitonine (figure 1).

1. Calcitriol

Le calcitriol est la molécule active de la vitamine D qui se forme à la suite d’une double hydroxylation, en C25 par le foie et en C1a par le rein (encadré 1 complémentaire sur http:\\www.lepointveterinaire.fr).

Le calcitriol est hypercalcémiant et hyperphosphatémiant : il accroît l’absorption intestinale du calcium (Ca), du phosphore (P) et du magnésium (Mg), et leur réabsorption rénale. Il libère également du Ca et du P osseux en activant les ostéoclastes.

Le rôle du calcitriol (structure et action voisines des hormones stéroïdes) ne se limite pas à l’équilibre phosphocalcique. C’est un facteur de transcription génomique qui module la synthèse de nombreuses protéines régulatrices de l’activité cellulaire et des transports membranaires (intestin, rein), assurant une régulation de la prolifération et de la différenciation cellulaire. Il intervient aussi bien dans la régulation de la croissance et du poids que dans la stimulation de l’immunité [12, 20].

2. Parathormone

La PTH est sécrétée par les parathyroïdes. Elle augmente la synthèse du calcitriol et stimule directement la résorption osseuse libérant le Ca et le P. Cependant, son action principale est d’accroître l’élimination rénale du P, si bien que, globalement, elle est hypercalcémiante et hypophosphatémiante.

3. Calcitonine

La calcitonine est une hormone thyroïdienne (issue des cellules claires [C] et non des thyréocytes producteurs des hormones thyroïdiennes iodées). Elle accroît l’activité ostéoblastique entraînant la minéralisation osseuse, et baisse la réabsorption rénale du Ca et du P. Elle est hypocalcémiante et hypophosphatémiante.

4. Autres hormones

De nombreuses autres hormones (hormone de croissance, prolactine, insuline, insuline like growth factors [IGFs], progestérone et testostérone) ont un effet indirect sur la concentration sanguine du Ca et du P, en activant la production rénale de calcitriol. La synthèse de vitamine D active contribue à leur activité anabolisante. Au contraire, le fibroblast growth factor (FGF-23), stimulée par l’hyperphosphatémie, est un inhibiteur puissant de la résorbtion rénale des phosphates, de la PTH et de la production rénale de calcitriol [7].

ÉQUILIBRE PHOSPHOCALCIQUE

1. Calcémie

Le calcium total sanguin regroupe trois principales fractions :

- liée aux protéines (albumine et globulines) ;

- liée aux bicarbonates, mais aussi aux lactates, phosphates, citrates ou sulfates ;

- ionisée, dite « libre » (figure 2).

Seule la fraction ionisée est active. C’est la plus intéressante pour le diagnostic puisqu’elle est la seule disponible pour les échanges transmembranaires et ses effets cellulaires. Chez les animaux sains, elle représente environ la moitié de la calcémie totale.

Il existe une sérieuse difficulté en ce qui concerne l’analyse de la calcémie ionisée : les petits automates, présents dans les cliniques vétérinaires, ne mesurent généralement que la calcémie totale et il est impossible de référer la mesure du calcium ionisé, puisqu’elle doit être réalisée sur sang frais (tout vieillissement du prélèvement entraîne une modification de l’ionisation du calcium) (encadré 2). Certaines publications proposent des formules pour calculer la valeur de la calcémie libre à partir de la valeur totale, mais elles ne sont pas utilisables en pratique, car elles sont fiables uniquement chez un animal sain (encadré 3 complémentaire sur http:\\www.lepointveterinaire.fr). Il est possible cependant de contourner en partie cette difficulté (bien qu’une mesure de la calcémie totale ne puisse pas se substituer à une mesure de la calcémie ionisée) en interprétant la calcémie totale, car il existe un moyen de savoir si la fraction libre est anormalement augmentée ou diminuée, en fonction de la protéinémie et de l’équilibre acido-basique :

- la valeur de calcémie libre est à minorer si les protéines totales (PT) sont anormalement élevées et à majorer si les PT sont anormalement faibles ;

- la valeur de calcémie libre est à majorer en cas d’acidose (augmentation de l’ionisation) et à minorer en cas d’alcalose (baisse de l’ionisation) ;

- en pratique, en cas d’hyperprotéinémie et/ou d’alcalose, l’hypocalcémie est plus sévère que ne le préjuge le calcium total. À l’inverse, en cas d’hypoprotéinémie et/ou d’acidose, c’est l’hypercalcémie qui est plus sévère [13] ;

- réciproquement, les effets de l’hypocalcémie sont atténués si les PT sont faibles ou si l’animal est en acidose (état de choc, par exemple), car la fraction ionisée est augmentée (pour les mêmes raisons, une hypercalcémie peut être sans effet notable si les PT sont élevées, surtout en cas d’alcalose).

2. La phosphatémie

Chez l’animal sain, les variations de la phosphatémie sont très dépendantes de celles du calcium. Sous l’effet de la vitamine D, de la PTH et de la calcitonine, le calcium et les phosphates sont, absorbés par le tube digestif, fixés ou libérés par l’os simultanément. En revanche, au niveau rénal, la PTH provoque surtout l’excrétion des phosphates. Chez l’animal sain, adulte, la valeur physiologique de la phosphatémie correspond à 0,5 à 0,65 % de la calcémie.

3. Cas particulier de l’animal en croissance

L’activité de minéralisation de l’os chez un chiot de grand format peut atteindre jusqu’à 100 fois celle de l’adulte [19]. La croissance implique un remodelage osseux permanent, puisqu’en raison de la rigidité osseuse, la plasticité ne peut se faire que par des enchaînements résorption/accrétion de phosphate de calcium (figure 3 complémentaire sur http:\\www.lepointveterinaire.fr). Pour que la croissance soit harmonieuse, ces enchaînements dépendent d’une parfaite coordination hormonale. Les hormones et les facteurs de croissance jouent un rôle majeur dans la formation de la trame protéique. La calcitonine, le calcitriol et la PTH contrôlent la minéralisation. Lors de carence en calcium ou de perturbations hormonales, des déformations sévères et de graves séquelles s’installent vite, même si des apports alimentaires corrects sont de nouveau assurés.

4. Réponses hormonales aux perturbations phosphocalciques chez l’animal sain

Chez un animal sain et correctement nourri, les activités de PTH et de calcitonine sont assez faibles. Seule l’activité du calcitriol est permanente, car elle assure les apports de calcium et de phosphates. En revanche, toute perturbation de la calcémie ou de la phosphatémie provoque d’importantes modifications hormonales (figure 4).

PATHOLOGIE DES DÉSÉQUILIBRES PHOSPHOCALCIQUES

Il existe trois causes de déséquilibres phosphocalciques : alimentaire, organique et néoplasique.

1. Cause alimentaire

Le calcium est a priori insuffisant dans un régime carnivore ordinaire, ce qui implique un apport systématique (y compris chez les chatons et les chiots de petit format, surtout si l’allaitement a été raccourci par un sevrage précoce). En revanche, la viande étant riche en phosphates, le risque de carence est plus faible. De même, les besoins en vitamine D sont beaucoup plus faibles que les besoins humains, une alimentation riche en huile végétale ou en graisse animale est généralement suffisante.

2. Causes organiques

Toute atteinte organique (parathyroïdes, foie, rein, intestin) susceptible de perturber la synthèse des hormones intervenant dans le système phosphocalcique entraîne de graves perturbations :

- l’aplasie des parathyroïdes est généralement due à une destruction du tissu sécrétant par une parathyroïdite à médiation immune, entraînant une baisse, voire un arrêt de la sécrétion de PTH. La conséquence est une hypocalcémie associée à une hyperphosphatémie ;

- la destruction (médiation immune ?) des cellules claires de la thyroïde provoquant une baisse de la sécrétion de calcitonine. Elle se traduit par une déminéralisation osseuse ;

- l’atteinte hépatique occasionne une baisse de la synthèse de calcidiol, conduisant à un défaut de calcitriol, ainsi qu’une hypocalcémie et une hypophosphatémie (dues à l’hypersécrétion compensatoire de PTH) ;

- l’atteinte rénale provoque une baisse du calcitriol et empêche l’action de PTH, malgré son hypersécrétion. Il en résulte surtout une sévère hyperphosphatémie, la calcémie étant longtemps préservée ;

- l’atteinte intestinale diminue l’absorption de calcium et de phosphates, ce qui entraîne une hypocalcémie et une hypophosphatémie modérées.

3. Causes néoplasiques

Les tumeurs des glandes parathyroïdes sont les causes néoplasiques les plus fréquentes à l’origine de déséquilibres phosphocalciques (photo 1). Cependant, d’autres tumeurs (lymphome, adénocarcinome des glandes anales, par exemple) peuvent entraîner des hyper­sécrétions de PTH et/ou PTH-like ou, plus rarement, de facteurs à activité ostéolytique comme les interleukines [IL]-1 et 6, les tumor necrosis factors (TNF) ou osteoclast-activating factor.

Quand l’animal vieillit, plusieurs atteintes organiques (foie, rein, parathyroïdes) peuvent coexister, y compris lors de processus tumoral : les perturbations induites du métabolisme phosphocalcique peuvent être très complexes et difficiles à explorer.

EXPLORATIONS DES AFFECTIONS DU MÉTABOLISME PHOSPHOCALCIQUE

1. Explorations biologiques

Le bilan phosphocalcique doit comprendre une mesure de la calcémie totale ainsi que de la phosphatémie. Pour interpréter la calcémie, il est nécessaire de mesurer la protéinémie et l’albuminémie. En première intention, il est souhaitable de compléter le bilan biologique par une exploration rénale et hépatique. Par exemple : cholestérol (augmenté en cas de stéatose hépatique), potassium (augmenté en cas d’insuffisance rénale et abaissé en cas d’insuffisance hépatique), phosphatases alcalines (PAL), alanine aminotransférases (Alat), urée, créatinine. En cas d’augmentation de l’activité PAL, il convient de prendre en compte que la PTH stimule l’activité PAL osseuse. En cas d’anomalies phosphocalciques, les dosages de la 25-OH-vitamine D et/ou de la PTH peuvent être référés à des laboratoires spécialisés.

2. Imagerie

Les radiographies osseuses permettent d’évaluer la minéralisation, de visualiser d’éventuelles lésions (inflammation, ostéofibrose, anomalies des cartilages de conjugaison, géodes ou autre processus tumoraux ostéoclastiques), ou encore des calcifications erratiques (calculs rénaux). L’échographie (parathyroïdes, foie, rein) permet d’examiner les organes impliqués dans la régulation phosphocalcique, mais pour les parathyroïdes, elle nécessite un équipement et une dextérité particuliers.

MALADIES NUTRITIONNELLES DES CHIOTS EN CROISSANCE

Les animaux à risque sont les chiots de grand format, dont la croissance est importante et rapide [17]. Les erreurs sont dues aussi bien à des carences qu’à des excès ­d’apport de calcium et/ou de vitamine D. À l’exception de très mauvaises conditions d’entretien avec des co-carences en protéines de qualité, la synthèse de la matrice protéique osseuse est normale. Les aliments industriels pour chiots présentent en général des apports corrects en minéraux et en vitamine D. En revanche, il est indispensable de contrôler précisément les apports des aliments artisanaux ou ménagers, qui peuvent être extrêmement déséquilibrés (BARF [biologically appropriate raw food], vegan, etc.).

1. Insuffisance d’apport minéral

En cas de carence en calcium (beaucoup plus fréquente que celle en phosphates, qui sont abondants dans les produits carnés), l’hypocalcémie provoque une hypersécrétion réactionnelle de PTH. Cela valorise au mieux l’apport vitaminique D, mais surtout entraîne une activité ostéoclastique dominante qui provoque une déminéralisation osseuse. Cet état est à tort qualifié de « rachitique », terme qui définit une carence en vitamine D. Mais cette dernière est rare, car les besoins en vitamine D sont très faibles et le plus souvent satisfaits [8]. Biologiquement, une calcémie faible ou normale est observée ainsi qu’une hypophosphatémie. Si l’équilibre nutritionnel est rétabli rapidement, une reprise de croissance sans séquelle est possible.

2. Excès d’apport en minéraux ou en vitamine D

Les excès d’apports en minéraux et en vitamine D sont aussi fréquents et nuisibles que les carences, car ils entraînent des ostéochondroses et des retards de maturation osseuse.

L’excès de calcium induit une hypoparathyroïdie et un hypercalcitonisme. Malgré un retard de maturation du cartilage de croissance, la calcification osseuse augmente, perturbant le remodelage osseux, en provoquant des déformations qui sont rapidement à l’origine de séquelles graves qui régressent difficilement, malgré le rétablissement de l’équilibre nutritionnel.

L’excès de vitamine D induit une hypoparathyroïdie et une irrégularité des plaques de croissance [18]. La protrusion du cartilage dans la zone métaphysaire conduit à l’apparition de zones de nécrose et à des anomalies de l’ossification. Là aussi, de graves perturbations du remodelage osseux sont observées avec un fort risque de séquelles.

En pratique, des anomalies de croissance graves résultent d’erreurs nutritionnelles successives (carence minérale suivi d’excès de vitamine D). Pour éviter les séquelles graves, il est important d’agir le plus précocement possible. L’information nutritionnelle du propriétaire est primordiale dès la première consultation. En cas d’anomalie de croissance, il est absolument nécessaire de rétablir au plus tôt une alimentation correcte, en particulier l’apport minéral, et surtout de ne pas chercher à compenser un début de carence par un excès de minéraux et de vitamine D en aveugle.

MALADIES DE L’ADULTE

1. Hypocalcémie

Les signes cliniques de l’hypocalcémie sont liés à la baisse des concentrations calciques sanguine et intracellulaire à l’origine d’hyperexcitabilité neuromusculaire : nervosité, crampes, contractures, tremblements, crises convulsives, ptyalisme, dysrythmies, halètement et prurit facial. Sur les radiographies osseuses, des lésions d’ostéoporose sont visibles (les fractures spontanées sont très rares).

Une cause banale est la fin de gestation ou la lactation (éclampsie). Ce risque est élevé dans les races de petit format, lorsque le propriétaire n’a pas pris soin de fournir une alimentation de type « chiot en croissance » (photo 2) [9]. La correction peut se faire rapidement par un apport de gluconate de calcium (voie intraveineuse lente à 10 % : 0,5 à 1,5 ml/kg en 10 à 20 minutes), suivi d’un apport alimentaire correct.

Plus rarement, il peut s’agir d’hypoparathyroïdie primaire, due à une aplasie des parathyroïdes à la suite d’un processus à médiation immune (dont l’origine serait infectieuse) ou par destruction involontaire de la vascularisation des parathyroïdes lors de chirurgie cervicale ou d’ablation thyroïdienne (tableau 1).

Une hypovitaminose D par carence d’apport est peu probable chez l’adulte, en raison des faibles besoins, à l’exception d’animaux recevant une alimentation très déséquilibrée. En revanche, de nombreuses lésions peuvent conduire à un défaut de production de calcitriol [5] : atteinte digestive diminuant l’absorption de vitamine D, pancréatite aiguë, insuffisance hépatique diminuant la synthèse de calcidiol (affections diverses, sachant que, le plus souvent, il s’agit de stéatose due à l’obésité), et plus rarement d’insuffisance rénale [1, 11, 15]. En cas de maladie rénale chronique, la calcémie est très peu diminuée, voire presque normale. Dans le sang, le calcitriol est faible, mais la PTH est extrêmement élevée. Les os, particulièrement au niveau des maxillaires, peuvent présenter de l’ostéofibrose après une décalcification (mâchoires de caoutchouc) (photo 3). Le traitement nécessite un apport de calcium sans phosphates (carbonate), une alimentation pauvre en phosphore (donc pauvre en viande) et des chélateurs de phosphore.

Le traitement par des dérivés vitaminiques D dépend de la cause : le médicament de choix est la 25 (OH) vitamine D3 en cas d’insuffisance hépatique, la 1α(OH) vitamine D3 en cas d’insuffisance rénale, la 1,25 di (OH) vitamine D3 en cas d’hypothyroïdisme primaire) (tableau 2 complémentaire sur http:\\www.lepointveterinaire.fr).

2. Hypercalcémie

Signes cliniques, causes

Les signes cliniques les plus courants d’une hypercalcémie sont une polyuro-polydipsie (PUPD), une déshydratation, des signes digestifs (dysorexie, anorexie, vomissements, constipation). Les signes d’hypoexcitabilité due à l’hypercalcémie dépendent de la sévérité des anomalies minérales et de la maladie causale entraînant une apathie voire une léthargie, des dysrythmies (dont une bradycardie), qui peuvent provoquer un coma (tableau 3 complémentaire sur http:\\www.lepointveterinaire.fr) [5]. Une ostéolyse et une ostéofibrose peuvent occasionner des douleurs et des boiteries. Des calcifications erratiques apparaissent : parfois des minéralisations cutanées prurigineuses, pouvant aller jusqu’à la formation de plaques, et souvent des uro- et néphrolithiases (oxalates et/ou phosphates de calcium).

Les causes peuvent être une hyperparathyroïdie primaire (néoplasique) ou secondaire.

Beaucoup plus rarement, une hypervitaminose D (médicamenteuse par compléments alimentaires inadaptés ou exceptionnellement due à l’activité vitaminique D d’un tissu granulomateux) ou la production de divers facteurs tumoraux hypercalcémiants peuvent être à l’origine d’une hypercalcémie. Ces facteurs sont très mal connus chez les animaux, mais pourraient être responsables chez le chat du syndrome d’hypercalcémie idiopatique [3].

Néoplasies

Plusieurs tumeurs sont capables de synthétiser un facteur hypercalcémiant dont la PTH ou PTHrP [10, 16]. Dans l’espèce canine, en cas d’hypercalcémie, la recherche de tumeur des parathyroïdes est privilégiée. L’hyperparathyroïdie primaire est due à une sécrétion excessive et autonome de la PTH par une tumeur d’une glande parathyroïde (le plus souvent bénigne). C’est une maladie de l’animal âgé, pour laquelle le spitz loup est prédisposé [6]. Il peut aussi s’agir de tumeurs mammaires, d’adénocarcinomes des sacs anaux, de tumeurs lymphoïdes, de myélomes (carcinomes, mélanomes malins, thymomes, tumeurs testiculaires, fibrosarcomes sont aussi possibles, mais moins impliqués).

Dans l’espèce féline, des tumeurs produisant des facteurs hypercalcémiants sont recherchés : maladies lymphoprolifératives, tumeurs plasmocytaires, granulomes, et carcinomes épidermoïdes (souvent faciaux) (photo 4).

La localisation tumorale peut être difficile à mettre en évidence. La confirmation biologique n’est pas simple non plus, puisque chez les animaux, seul le dosage de PTH est effectué en routine par les laboratoires spécialisés (encadré 4 complémentaire sur http:\\www.lepointveterinaire.fr).

En cas d’hypercalcémie d’origine néoplasique, l’exérèse chirurgicale de la tumeur est le traitement le plus accessible et le plus efficace (tumeur mammaire, parathyroïde, sac anal).

Si c’est un mélanome ou un lymphome T, la chimiothérapie ciblée est plus intéressante pour diminuer l’hypercalcémie.

Si une autre origine est confirmée, un diphosphonate (acide clodronique ou alendronique, par exemple) est prescrit pour diminuer l’activité ostéoclastique [4].

Il est indispensable de surveiller la calcémie aussi bien en phases péri- et postchirurgie qu’en suivi de traitement médical, toutes les 2 semaines au début, et régulièrement (toutes les 6 semaines) à moyen terme.

Hyperparathyroïdie secondaire

L’augmentation de la calcémie secondaire à une maladie rénale chronique provient d’une hypersécrétion réactionnelle de PTH et de FGF23 (qui ont des répercussions délétères sur l’ensemble de l’organisme, particulièrement aux niveaux osseux, rénal et cardiovasculaire), en réponse à la baisse de calcitriol et à l’impossibilité d’élimination des phosphates. Dans ce cas, l’hyperphosphatémie est la principale anomalie, car la calcémie est le plus souvent quasi normale. Le rapport Ca/P est diminué, ce qui en fait un excellent témoin de la gravité de l’atteinte rénale [2]. Un hypercortisolisme (augmentation de l’activité PAL, diminution de la vitamine D et de la calciurie) peut aussi provoquer une hypersécrétion de PTH, qui pourrait être responsable de la calcinose cutanée [14].

Conclusion

Une anomalie de la calcémie et/ou de la phosphatémie est toujours liée à une maladie grave dont la cause doit être recherchée. Le bilan biologique doit toujours comprendre calcium, phosphates, protéines totales, albumine et kaliémie si une insuffisance hépatique est suspectée. Le rapport Ca/P doit être calculé. La calcémie et la phosphatémie doivent faire partie du bilan gériatrique et du diagnostic différentiel de la PUPD.

Chez le chiot de grand format, le parfait équilibre des apports alimentaires doit être contrôlé (l’excès de vitamine D pouvant être aussi dangereux que le manque de calcium).

Références

  • 1. Allenspach K, Rizzo J, Jergens AE et coll. Hypovitaminosis D is associated with negative outcome in dogs with protein losing enteropathy: a retrospective study of 43 cases. BMC Vet. Res. 2017;13 (1):96.
  • 2. Cortadellas O, Fernández del Palacio MJ, Talavera J et coll. Calcium and phosphorus homeostasis in dogs with spontaneous chronic kidney disease at different stages of severity. J. Vet. Intern. Med. 2010;24 (1):73-79.
  • 5. Greco DS. Endocrine causes of calcium disorders. Top. Comp. Anim. Med. 2012;27 (4):150-155.
  • 6. Goldstein RE, Atwater DZ, Cazolli DM et coll. Inheritance, mode of inheritance, and candidate genes for primary hyperparathyroidism in Keeshonden. J. Vet. Intern. Med. 2007;21 (1):199-203.
  • 8. Hazewinkel HA, Tryfonidou MA. Vitamin D3 metabolism in dogs. Mol. Cell. Endocrinol. 2002;197 (1-2):23-33.
  • 11. Kim DI, Kim H, Son P, Kang JH et coll. Serum 25-hydroxyvitamin D concentrations in dogs with suspected acute pancreatitis J. Vet. Med. Sci. 2017;79 (8):1366-1373.
  • 13. López I, Aguilera-Tejero E, Estepa JC et coll. Role of acidosis-induced increases in calcium on PTH secretion in acute metabolic and respiratory acidosis in the dog. Am. J. Physiol. Endocrinol. Metab. 2004;286 (5):E780-E785.
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Conflit d’intérêts

Aucun.

ENCADRÉ 2

Biologie sanguine de l’équilibre phosphocalcique chez les carnivores domestiques

Adultes

→ Calcium total = 2 à 3 mmol/l = 90 à 110 mg/l.

→ Calcium ionisé = 1 à 1,5 mmol/l (attention, ne peut se mesurer que sur un prélèvement frais).

→ Remarques techniques importantes. En cas d’hyperlipidémie, la valeur de la calcémie peut être surévaluée, et l’utilisation de tubes citratés ou contenant de l’edta entraîne une hypocalcémie artéfactuelle.

→ Phosphates. La valeur s’interprète en fonction de la calcémie (il convient de se méfier des valeurs de référence proposées par certains automates vétérinaires) ; elle doit correspondre à environ 50 à 60 % de la calcémie.

Jeunes en croissance

→ Calcium total = 2,4 à 3,6 mmol/l = 108 à 130 mg/l.

→ Phosphates : environ 65 à 75 % de la calcémie.

EDTA : acide éthylène diamine tétra-acétique

Points forts

→ Chez un chiot de grand format, le strict respect des besoins nutritionnel est indispensable à une croissance satisfaisante. Un manque de calcium et un excès de vitamine D sont les principaux risques.

→ Chez le chat, comme chez le chien, si la calcémie est anormale, le bilan biologique doit être étendu a minima aux protéines totales, à l’albumine et aux phosphates et le rapport calcium/phosphore (Ca/P) doit être calculé.

→ Une anomalie de la calcémie et/ou de la phosphatémie doit faire suspecter une maladie grave. Le bilan gériatrique doit intégrer ces deux paramètres.

→ La baisse du rapport Ca/P est le meilleur critère de sévérité et d’ancienneté en cas de maladie rénale chronique.

→ En cas d’insuffisance hépatique chronique, une hypophosphatémie et une hypokaliémie sont aussi présentes et aggravent les signes dus à l’hypocalcémie.