Conduite à tenir face à une toux aiguë chez le chiot - Ma revue n° 019 du 01/01/2019 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 019 du 01/01/2019

MÉDECINE INTERNE

Prise en charge des principales affections pédiatriques

Auteur(s) : Émilie Krafft

Fonctions : Dipl. ECVIM-CA (internal
medicine
), CEAV médecine
interne des animaux
de compagnie, PhD
Université de Lyon, VetAgro Sup,
Campus vétérinaire,
service de médecine interne
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-l’Étoile

Les maladies infectieuses sont les premières causes de toux aiguë chez les chiots. Le praticien doit cependant hiérarchiser ses hypothèses diagnostiques et choisir entre la mise en place d’un traitement et la réalisation d’examens complémentaires.

La toux est un motif de consultation fréquent chez le chiot. Elle est considérée comme aiguë lorsqu’elle évolue depuis moins de 3 semaines [3]. Si les causes de toux sont variées, les maladies infectieuses (syndrome de la toux de chenil, parasitoses) sont les plus souvent rencontrées chez le chien âgé de 2 à 6 mois (tableau 1, encadré). Dans ce contexte, le praticien doit déterminer quelles hypothèses retenir et si une épreuve thérapeutique est possible en première intention ou, au contraire, si des examens complémentaires sont indiqués (figure). Les affections congénitales ne doivent pas être négligées, même face à une toux d’apparition récente. La démarche est développée ici chez le chiot, mais est transposable à un animal adulte en adaptant la hiérarchisation des hypothèses (probabilité très faible d’une maladie congénitale en l’absence de signes persistants ou récidivants, sensibilité moindre aux agents de la toux de chenil, possibilité d’un processus tumoral, etc.) et la prise en charge thérapeutique ; une antibiothérapie ou une hospitalisation sont plus rarement indiquées.

ÉTAPE 1 IDENTIFIER DES ÉLÉMENTS DANS L’HISTORIQUE PERMETTANT D’ORIENTER LE DIAGNOSTIC

1. Commémoratifs

Les maladies infectieuses sont fréquentes chez les chiots de moins de 6 mois et l’interrogatoire du propriétaire doit permettre d’identifier des facteurs de risque.

Âge et race

L’âge et la race du chiot, bien que peu informatifs pour le diagnostic, sont des éléments importants à connaître pour la prise en charge thérapeutique. Les animaux jeunes sont plus facilement débilités et peuvent nécessiter des traitements antibiotique et symptomatique plus intensifs. Une prédisposition des races brachycéphales aux bronchopneumonies par fausse déglutition est également à prendre en compte.

Environnement

Le mode et le lieu de vie peuvent fournir les clés du diagnostic. Une maladie infectieuse (toux de chenil, maladie de Carré) est beaucoup plus probable chez un chiot qui a eu des contacts récents avec des congénères (période d’incubation respectivement de 3 à 10 jours et de 1 à 3 semaines) [3, 6]. Le comportement exploratoire des chiots favorise l’ingestion de gastéropodes, hôtes intermédiaires de parasites respiratoires (Eucolus aerophilus, Crenosoma vulpis, Angiostrongylus vasorum) et le propriétaire peut avoir remarqué la présence de limaces et d’escargots, voire leur ingestion. L’exposition à des substances irritantes (fumée de cigarette, parfum d’ambiance, poussières de travaux) doit aussi être recherchée.

Médecine préventive

L’historique vaccinal est vérifié, en portant un intérêt particulier à la protection contre la maladie de Carré afin d’éviter une suspicion trop tardive de ce vice rédhibitoire. La vaccination contre la toux de chenil n’empêche pas l’infection par le virus parainfluenza et par Bordetella bronchiseptica ni leur excrétion, mais la morbidité est généralement réduite [6]. Une maladie infectieuse vaccinale est observable dans les jours qui suivent une vaccination par voie intranasale dans un faible pourcentage de cas [8].

Le protocole de vermifugation doit être évalué, tout en considérant qu’une maladie parasitaire reste possible même si les mesures de prévention ont été correctement mises en place. Les protocoles qui utilisent une ou des molécules à spectre réduit (oxfendazole, nitroscanate, association niclosamide-oxibendazole ou praziquantel-pyrantel-fébentel, etc.) ne sont généralement pas suffisants pour prévenir les parasitoses respiratoires. Le risque d’infestation massive par des parasites digestifs, donc de larva migrans, est aussi beaucoup plus élevé si la mère et la portée n’ont pas été vermifugées.

2. Anamnèse

Le propriétaire doit être interrogé afin d’identifier des circonstances particulières d’apparition de la toux. Par exemple, une survenue brutale lors d’une promenade suggère un corps étranger inhalé. Lors d’achat récent, il est important de vérifier que la toux n’est pas antérieure à l’acquisition : une affection congénitale est beaucoup plus probable lors de toux chronique et d’apparition précoce.

Si l’animal est présenté tardivement, une amélioration spontanée peut déjà avoir eu lieu, notamment lors de toux de chenil ou de trachéite par irritation [6]. À l’inverse, une aggravation progressive des symptômes est plus inquiétante et suggère une toux de chenil avec des complications, voire une autre affection.

ÉTAPE 2 CARACTÉRISER LA TOUX

Les propriétaires peinent parfois à décrire les symptômes respiratoires présentés par leur animal. En cas de doute, il est intéressant de leur faire visionner des vidéos de toux, de cornage, et surtout d’éternuements inversés (reverse sneezing). La palpation du larynx et de la trachée peut aussi déclencher une toux, permettant de vérifier qu’il s’agit bien du signe rapporté, mais également d’en évaluer l’intensité. Lors de quintes importantes, il est possible que le chiot finisse par vomir (toux émétisante) et les propriétaires peuvent consulter avant tout pour des vomissements.

1. Intensité

La toux est déclenchée par la stimulation de récepteurs tussigènes situés au sein du larynx, de la trachée et des bronches. Ces récepteurs sont absents des petites bronches, des bronchioles ou des alvéoles [3]. L’intensité de la toux diffère donc selon l’étage de l’appareil respiratoire impliqué, ce qui permet de cibler les hypothèses diagnostiques et le choix d’éventuels examens complémentaires (tableau 2).

2. Caractère productif

Certains éléments, tels qu’une déglutition après la quinte et des efforts d’expectoration, indiquent que la toux est productive. Ils sont souvent ressentis par le propriétaire comme des vomissements improductifs ou des tentatives d’élimination d’un corps étranger. Le caractère productif d’une toux est peu spécifique : la présence de sécrétions en quantité augmentée est observée dans de nombreuses entités, mais aussi en cas de surinfection [3]. Une toux sèche est toutefois décrite dans la plupart des cas de trachéite inflammatoire (toux de chenil et par irritation) ou de compression mécanique.

La présence d’une hémoptysie revêt un caractère d’urgence et peut notamment révéler l’existence d’une parasitose (angiostrongylose), d’un trouble de l’hémostase (intoxication aux anticoagulants), plus rarement d’un corps étranger ou d’une bronchopneumonie (photo 1) [3].

ÉTAPE 3 RECHERCHER DES SIGNES CLINIQUES ASSOCIÉS

D’autres signes que la toux peuvent être identifiés durant l’anamnèse et l’examen clinique, permettant de privilégier certaines hypothèses diagnostiques et d’évaluer la sévérité de l’affection.

1. Signes généraux

Une toux de chenil, ou une trachéite par irritation, ne s’accompagnent généralement pas d’une altération de l’état général en dehors d’une dysorexie transitoire (moins de 24 heures) [6]. La mise en évidence d’un abattement, d’une dysorexie/anorexie ou d’un retard de croissance fait suspecter une surinfection (bronchopneumonie) et amène à considérer d’autres hypothèses quant à l’origine de la toux. La présence d’une hyperthermie est en faveur d’un processus infectieux primaire ou secondaire (bronchopneumonie par fausse déglutition ou corps étranger surinfecté). Des saignements spontanés sont possibles lors d’angiostrongylose ou de troubles de l’hémostase.

2. Autres signes respiratoires

Les répercussions sur la fonction respiratoire doivent être évaluées. Une intolérance à l’effort, une tachypnée au repos, voire des épisodes de détresse respiratoire ou de cyanose sont des éléments anamnestiques importants à rechercher.

La présence d’autres signes respiratoires peut permettre de préciser la portion de l’arbre respiratoire atteinte [3]. L’auscultation thoracique doit être attentive afin de rechercher une modification des bruits bronchovésiculaires, ou des bruits surajoutés. La mise en évidence d’un jetage et/ou d’un épiphora est en faveur d’une toux de chenil ou de la maladie de Carré [6].

3. Autres signes

Des signes digestifs et cardiaques doivent être recherchés.

Digestifs

Les signes digestifs doivent être particulièrement recherchés. Une diarrhée concomitante aux signes respiratoires peut suggérer un parasitisme intestinal associé à un larva migrans pulmonaire.

La présence de régurgitations ou de vomissements amène à suspecter une bronchopneumonie par fausse déglutition (photos 2a et 2b). Lorsque les régurgitations sont chroniques, l’existence d’un jabot œsophagien ou d’un mégaœsophage congénital est à vérifier.

Cardiaques

L’auscultation d’un souffle cardiaque suggère l’existence d’une cardiopathie, mais ne suffit pas à attribuer une origine cardiaque à la toux. Une toux forte peut être présente lors de cardiomégalie importante avec compression des voies aériennes et une toux faible lors d’insuffisance cardiaque congestive gauche.

Un œdème pulmonaire est peu tussigène (absence de toux, ou toux faible peu fréquente). L’animal montre principalement une dyspnée expiratoire et d’autres signes de cardiopathie décompensée tels qu’une intolérance à l’effort, une disparition de l’arythmie sinusale, une tachycardie [3]. Les souffles innocents sont par ailleurs fréquents chez les chiots(1).

Des modifications dans l’intensité et la localisation des bruits cardiaques sont parfois observées lors de hernies péritonéopéricardique et diaphragmatique.

ÉTAPE 4 ÉVALUER LA NÉCESSITÉ D’EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

À ce stade, le praticien a une idée plus précise de la portion de l’appareil respiratoire atteinte et de la sévérité de l’affection. Tout élément suggérant une hypothèse autre qu’une toux de chenil, simple ou compliquée, doit être pris en compte.

En cas de difficultés respiratoires importantes, une stabilisation est nécessaire avant tout examen. L’administration de butorphanol peut également faciliter, par son effet antitussif, la réalisation de radiographies lors de toux incoercible (tableau 3).

1. Forte suspicion d’une toux de chenil sans complication

Chez un chiot en bon état général, avec un historique de contacts récents avec d’autres chiens et sans anomalie à l’examen clinique en dehors d’un jetage séreux, la suspicion de toux de chenil est forte. La réalisation d’examens complémentaires pour exclure d’autres hypothèses n’est pas nécessaire.

Des outils moléculaires (PCR) sont disponibles pour permettre au praticien de rechercher les agents de la toux de chenil à partir d’un écouvillon pharyngé, nasal ou oculaire [7]. Un test positif ne permet toutefois pas de confirmer le diagnostic, car ces agents peuvent être identifiés chez des animaux sains et les techniques disponibles détectent aussi les souches vaccinales [7]. Des faux négatifs sont également possibles si l’animal n’est pas présenté au cours des premiers jours qui suivent l’apparition de la toux, l’excrétion étant généralement maximale en tout début d’infection [4]. L’intérêt d’effectuer un diagnostic étiologique étant très limité pour des cas isolés, ces tests ne sont pas recommandés en routine. En revanche, ils sont conseillés lors d’épidémie de toux en élevage ou en refuge, pour identifier le ou les agents en cause.

2. Suspicion d’une toux de chenil avec complication(s)

Les chiots, notamment les individus très jeunes et non vaccinés, sont davantage sujets à des formes atypiques de toux de chenil (bronchopneumonie ou bordetellose chronique) que les adultes [1].

Lorsque le contexte épidémiologique est en faveur d’une toux du chenil, mais que l’animal présente une altération de l’état général, une hyperthermie, une dyspnée expiratoire ou des bruits respiratoires surajoutés, la réalisation d’examens complémentaires est indiquée (radiographies thoraciques et hémogramme). Leur objectif est de rechercher une bronchopneumonie, mais également d’éviter une erreur de diagnostic.

La suspicion diagnostique d’une toux de chenil, avec ou sans complication (s), doit être remise en cause si les signes cliniques persistent au-delà de 15 jours, ou lors de récidive après l’arrêt du traitement. Cette suspicion peut être erronée, ou l’affection peut avoir évolué vers une forme chronique de bordetellose (photos 3a et 3b). La confirmation d’une bordetellose chronique nécessite des examens plus avancés, tels qu’une trachéobronchoscopie et l’identification de Bordetella bronchiseptica par culture ou PCR à partir du liquide de lavage broncho­alvéolaire [1].

3. Exploration d’autres hypothèses

Des examens complémentaires permettent d’explorer d’autres hypothèses.

Radiographies thoraciques

Face à une toux aiguë avec complication (s), un examen radiographique thoracique est indiqué en première intention, sauf lorsqu’une origine extrapulmonaire est suspectée [3].

Certaines maladies sont accompagnées de lésions caractéristiques visibles sur les radiographies thoraciques. Elles permettent alors d’établir la cause de la toux : hernie diaphragmatique ou péritonéopéricardique, masse médiastinale, pincement de la bronche souche gauche par une cardiomégalie, corps étranger, etc.

Dans d’autres cas, les lésions pulmonaires visibles à la radiographie sont fortement évocatrices de certaines affections. Par exemple, lors de parasitose pulmonaire, notamment d’angiostrongylose, une opacification broncho-interstitielle diffuse est observée, éventuellement associée à des plages d’opacification alvéolaire nodulaire mal délimitées en région caudodorsale (photos 4a et 4b).

Lors de bronchopneumonie par fausse déglutition, les images radiographiques varient suivant la consistance et le volume des éléments inhalés, et selon le temps écoulé entre la fausse déglutition et la prise des clichés. En effet, l’apparition des lésions radiographiques est retardée par rapport au développement des signes cliniques. Des images caractéristiques (opacité alvéolaire en région ventrale, notamment du lobe moyen droit) sont généralement présentes, mais l’examen peut être normal en début d’évolution. Dans ce dernier cas de figure, la répétition des radiographies après 24 à 48 heures permet le plus souvent de visualiser les lésions.

L’examen radiographique thoracique peut aussi mettre en évidence des anomalies peu spécifiques, telles qu’une opacité interstitielle (pneumonie bactérienne, virale, œdème débutant, etc.) ou bronchique diffuse (trachéobronchite virale, bactérienne, parasitaire, etc.).

Cet examen peut en outre se révéler normal lors de trachéobronchite infectieuse ou par irritation. L’absence de lésion radiographique thoracique ne doit donc pas conduire à exclure une atteinte pulmonaire ou trachéobronchique [3].

Lorsque l’examen radiographique n’est pas diagnostique, selon la suspicion clinique et le degré de sévérité des signes cliniques, une épreuve thérapeutique peut être directement instaurée (antibiothérapie, vermifugation) ou d’autres examens complémentaires envisagés avant le traitement (trachéobronchoscopie avec lavage broncho­alvéolaire, coproscopie, etc.). La possibilité d’une origine extrathoracique de la toux doit également être reconsidérée.

Examen hématologique

Si l’examen hématologique ne permet généralement pas d’établir un diagnostic, il peut conforter certaines hypothèses. Une neutrophilie ou une monocytose sont souvent présentes lors de phénomène inflammatoire, voire bactérien (notamment lors d’une déviation à gauche de la courbe d’Arneth ou de signes de toxicité sur les neutrophiles). Une éosinophilie est en faveur d’une parasitose [3].

Épreuve thérapeutique avec un vermifuge

Lors de suspicion de parasitisme, une épreuve thérapeutique est souvent instaurée en première intention. Une vermifugation avec une spécialité active contre les parasites intestinaux est suffisante face à la larva migrans. Lorsqu’un parasite cardio-pulmonaire est suspecté, l’administration prolongée de fenbendazole (50 mg/kg, per os pendant 20 jours) est indiquée. Une application unique en spot on est possible avec l’association de moxidectine (2,5 mg/kg) et d’imidaclopride (10 mg/kg), mais son efficacité n’est vérifiée que pour un spectre plus réduit (Angiostrongylus vasorum, Crenosoma vulpis, Eucolus aerophilus).

Coproscopie

Lorsque les signes cliniques sont sévères et qu’une parasitose est envisagée, la confirmation du diagnostic peut s’effectuer par une analyse coprologique. Il est préférable de prélever les fèces 3 jours de suite pour augmenter la sensibilité de l’examen et de combiner une technique classique (recherche d’œufs de parasites digestifs et d’Eucolus aerophilus) avec une technique permettant l’identification de larves de parasites cardio-pulmonaires (méthode de Baermann par exemple) (photo 5).

Un test sanguin rapide est également disponible pour la recherche d’antigènes d’Angiostrongylus vasorum (Angio Detect, Idexx).

La sensibilité de ces tests sanguins et fécaux n’est toutefois pas parfaite et une épreuve thérapeutique doit être réalisée lors de forte suspicion, même en cas de résultat négatif [2].

ÉTAPE 4 INSTAURER UN TRAITEMENT LORS DE SUSPICION DE TOUX DE CHENIL

1. Antibiothérapie

L’intérêt de l’antibiothérapie est de traiter, ou prévenir, une surinfection par des agents bactériens secondaires et de lutter contre Bordetella bronchiseptica. La majorité des cas de toux de chenil étant d’origine virale, la systématisation de l’antibiothérapie est questionnable. Par ailleurs, la plupart des chiens atteints ne présentent pas d’altération de l’état général et la toux se résout spontanément sans traitement en 10 jours [4, 6].

Une antibiothérapie n’est donc actuellement recommandée, pendant cette période de 10 jours, qu’en présence d’expectorations ou de jetage mucopurulent associés à des signes généraux (hyperthermie, abattement ou dysorexie) [4]. Ces recommandations reposent toutefois principalement sur des avis d’expert (faible niveau de preuve) et ne font pas de distinction entre les adultes et les chiots. Ces derniers, notamment les plus jeunes, sont davantage susceptibles de développer une affection sévère et il convient de prendre en considération les risques inhérents à une absence de traitement [6]. Une antibiothérapie peut donc être envisagée face à un jetage mucopurulent sans altération de l’état général, ou en présence de signes généraux, même si le jetage est séreux ou la toux non productive. Si aucun traitement n’est mis en place, une surveillance attentive de l’animal est nécessaire.

La doxycycline (10 mg/kg une fois par jour, per os) est conseillée en première intention, en raison de son efficacité contre Bordetella bronchiseptica et Mycoplasma spp, de sa bonne tolérance et de sa diffusion dans les sécrétions bronchiques [4, 6]. Une coloration de l’émail est possible lors d’utilisation de tétracycline chez le chiot. Néanmoins, cette coloration n’a qu’un impact esthétique, car elle n’est pas associée à une altération du tissu dentaire. De plus, elle est également moins marquée avec la doxycycline qu’avec d’autres tétracyclines. L’association amoxicilline-acide clavulanique (15 mg/kg, deux fois par jour, per os) peut également être envisagée, bien que certaines souches de Bordetella soient résistantes et que les concentrations atteintes dans les sécrétions bronchiques n’aient pas été déterminées chez le chien. Une durée de traitement de 7 à 10 jours est actuellement recommandée [4, 6]. Lors de bronchopneumonie sévère, une antibiothérapie par voie intraveineuse peut se révéler nécessaire, l’association amoxicilline-acide clavulanique ou ampicilline-sulbactam (15 à 30 mg/kg par voie intraveineuse, trois à quatre fois par jour) étant le plus souvent utilisée de manière probabiliste en première intention [4].

2. Traitement symptomatique

La toux est un mécanisme de défense important de l’appareil respiratoire, qui permet l’expectoration d’éléments inhalés potentiellement nuisibles pour les voies aériennes (comme des corps étrangers, des débris ou des poussières), mais elle permet aussi l’élimination des mucosités [3]. L’utilisation d’un antitussif est donc contre-indiquée lors de toux productive ou de bronchopneumonie.

Lors de toux productive, une aérosolthérapie effectuée à l’aide d’un nébuliseur et de NaCl à 0,9 % peut favoriser l’expectoration des sécrétions en fluidifiant le mucus et en lubrifiant les voies aériennes [3]. En revanche, l’utilisation de N-acétylcystéine comme mucolytique est controversée, notamment en raison de ses effets secondaires digestifs lors d’administration par voie orale et de son action irritante par voie inhalée. Les effets obtenus sur le système respiratoire via une administration par voie intraveineuse ne sont pas connus.

Les quintes peuvent être spectaculaires lors de toux de chenil, altérant la qualité de vie de l’animal et inquiétant le propriétaire. Un cercle vicieux peut aussi se développer : l’irritation des voies aériennes engendrée par la toux stimule les récepteurs tussigènes. L’utilisation d’un antitussif doit donc être considérée lors de toux incessante, forte et sèche [3, 6].

En cas de toux de chenil avec complication (s), l’hospitalisation peut se révéler nécessaire pour instaurer une oxygénothérapie. L’utilité d’une fluidothérapie pour prévenir et traiter une déshydratation et/ou une hypoglycémie lors d’anorexie, voire la pause d’une sonde d’alimentation, ne doivent pas être négligées, en particulier chez les chiots très jeunes et/ou de races de petite taille.

Conclusion

Lors de toux aiguë chez le chiot, les commémoratifs, les données anamnestiques et l’examen clinique permettent de hiérarchiser les hypothèses diagnostiques. En cas de forte suspicion d’une toux de chenil ou de parasitisme, des examens complémentaires ne sont généralement pas indiqués. Dans le cas contraire, un examen radiographique thoracique est souvent réalisé en première intention afin de permettre d’établir le diagnostic. L’absence d’amélioration après 1 à 2 semaines ou l’apparition d’autres signes cliniques doit amener à réévaluer le diagnostic et la prise en charge thérapeutique.

  • (1) Voir l’article “Conduite à tenir lors de souffle cardiaque chez un chiot” de AC Merveille, dans ce numéro.

Références

  • 1. Canonne AM, Billen F, Tual C, et coll. Quantitative PCR and cytology of bronchoalveolar lavage fluid in dogs with Bordetella bronchiseptica infection. J. Vet. Intern. Med. 2016;30 (4):1204-1209.
  • 2. Canonne AM, Billen F, Losson B, et coll. Angiostrongylosis in dogs with negative fecal and in-clinic rapid serological tests: 7 cases (2013-2017). J. Vet. Intern. Med. 2018;32 (3):951-955.
  • 3. Ferasin L. Couging. In: Textbook of veterinary internal medicine: diseases of the dog and cat, 8th edition. St Louis, Elsevier. 2017:107-110.
  • 4. Lappin MR, Blondeau J, Boothe D, et coll. Antimicrobial use guidelines for treatment of respiratory tract disease in dogs and cats: antimicrobial guidelines working group of the International Society for Companion Animal Infectious Diseases. J. Vet. Intern. Med. 2017;31 (2):279-294.
  • 5. Priestnall SL, Mitchell JA, Walker CA, et coll. New and emerging pathogens in canine infectious respiratory disease. Vet. Pathol. 2014;51 (2):492-504.
  • 6. Priestnall SL. Canine infectious respiratory disease. In: Textbook of veterinary internal medicine: diseases of the dog and cat, 8th edition. St Louis, Elsevier. 2017:1002-1005.
  • 7. Schulz BS, Kurz S, Weber K, et coll. Detection of respiratory viruses and Bordetella bronchiseptica in dogs with acute respiratory tract infections. Vet. J. 2014;201 (3):365-369.
  • 8. Sykes JE. Canine infectious respiratory disease complex. In: Kirk’s current veterinary therapy XV. St Louis, Elsevier. 2014:632-635.

Conflit d’intérêts

Aucun.

ENCADRÉ : Étiologie de la toux de chenil

La toux de chenil est un syndrome lié à une trachéite/trachéobronchite/rhinite à l’étiologie multifactorielle. Parmi les nombreux agents pathogènes impliqués, les virus parainfluenza canin, adénovirus canin de type 2 et herpèsvirus canin de type 1 sont les plus fréquemment incriminés, souvent en association ou précédant une infection par Bordetella bronchiseptica [5, 7]. Les signes cliniques sont généralement observés lors de coïnfection, car l’action des différents agents est séquentielle ou synergique.

D’autres agents pathogènes ont été mis en cause plus récemment : le coronavirus respiratoire canin, le pneumovirus canin et Streptococcus equi susp zooepidemicus. Ce dernier est responsable d’une forme souvent sévère, voire fatale, notamment chez les chiots, avec le développement d’une bronchopneumonie hémorragique et fibrinosuppurée [5].

Le chien est également sensible à certains sous-types de virus influenza et des épizooties sont survenues, principalement aux États-Unis et en Asie (notamment influenza A canin H3N8 et H3N2). La transmission de ces virus entre chiens semble également possible, notamment pour l’influenza aviaire H5N2.

Enfin, Mycoplasma cynos est considéré comme un agent impliqué dans la toux de chenil, bien que les données confirmant ou infirmant sa pathogénicité soient limitées.

Le statut de l’animal (stress, statut immunitaire, infection précédente) et les conditions environnementales (surpopulation, lieu d’hébergement mal ventilé) influencent le développement et l’intensité des manifestations cliniques lors d’infection. Le plus souvent, le chiot développe des signes, tandis qu’une infection asymptomatique ou un portage sain sont tout à fait possibles chez l’adulte.

Points forts

→ Chez le chiot, une toux aiguë est le plus souvent d’origine infectieuse ou parasitaire.

→ Le praticien doit chercher à localiser l’origine probable de la toux et évaluer les répercussions sur l’état général, la fonction respiratoire et la qualité de vie du chiot.

→ Des examens complémentaires, en particulier un examen radiographique thoracique, sont indiqués lors de toux faible, de modification de la courbe respiratoire, d’hyperthermie et/ou d’atteinte de l’état général.

→ Lorsque la suspicion de toux de chenil est forte (contact récent avec des congénères, toux forte, absence d’altération de l’état général et examen clinique sans anomalie), une surveillance est indiquée en première intention, éventuellement associée à une prise en charge thérapeutique.