Diagnostic radiographique et tomodensitométrique du cancer - Ma revue n° 017 du 01/01/2017 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 017 du 01/01/2017

IMAGERIE

Démarche diagnostique

Auteur(s) : Émilie Ségard-Weisse

Fonctions : VetAgro Sup, campus vétérinaire de Lyon
Service d’imagerie
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy-l’Étoile

La radiographie et le scanner jouent un rôle essentiel pour le diagnostic d’un cancer et la réalisation d’un bilan d’extension. Il convient de savoir dans quels cas les utiliser et comment interpréter leurs résultats.

Peu coûteuse et facilement accessible, la radiographie reste la technique d’imagerie la plus fréquemment utilisée chez les carnivores domestiques (CD). Sa pertinence dans le diagnostic des cancers dépend de la région anatomique étudiée et de la qualité technique de l’examen réalisé. Le scanner est un outil radiologique révolutionnaire dont les améliorations permanentes expliquent la rapide expansion de son utilisation en médecine vétérinaire. Toutefois, les résultats des examens d’imagerie, aussi performants et complets soient-ils, aboutissent à l’élaboration d’un diagnostic différentiel qui doit toujours être confronté aux éléments anamnestiques, cliniques et aux autres examens.

CARACTÉRISTIQUES TECHNIQUES ET LIMITES DE LA RADIOLOGIE ET DU SCANNER

La radiographie et le scanner génèrent des images fondées sur l’atténuation des rayons X en fonction de la densité et de l’épaisseur de l’objet traversé. En radiographie conventionnelle, les “parties molles” de nature tissulaire ou liquidienne présentent la même opacité et ne peuvent être différenciées spontanément. Une lésion kystique ou une lésion tissulaire tumorale homogène ont ainsi la même apparence. Pour affiner l’exploration des tissus mous, l’emploi d’agents de contraste positif a été développé.

Les caractéristiques d’acquisition et de genèse des images de scanner ont amélioré le pouvoir de différenciation des tissus mous par rapport à la radiographie (critère qualitatif nommé “résolution en contraste”) et une mesure directe de la densité relative des zones d’intérêt est possible avec cette technique d’imagerie. Le scanner a bénéficié d’évolutions techniques constantes, dont une des conséquences est une rapidité d’acquisition sans cesse accrue. Cela a permis, entre autres, de développer les explorations vasculaires, l’étude de la perfusion et les investigations cardiaques. Désormais, lors de la réalisation d’un angioscanner, une analyse multiphasique des tissus après injection intraveineuse d’un produit de contraste est possible. Elle consiste à étudier la prise de contraste d’un tissu sur les différentes phases vasculaires (artérielle, portale et veineuse) et à suivre la chronologie du rehaussement des entités lésionnelles, permettant, par exemple, la caractérisation d’une tumeur. Le rehaussement spécifiquement observé en phase artérielle de certains insulinomes pancréatiques chez le chien est un bon exemple de l’intérêt de l’analyse multiphasique (photo 1) [5, 10, 13].

La radiographie conventionnelle représente en deux dimensions une épaisseur complexe, associée à de nombreuses superpositions des structures traversées, engendrant une possible perte d’informations. Un minimum de deux incidences orthogonales doit toujours être réalisé.

Le scanner s’affranchit complètement des superpositions, permet la reconstruction multiplanaire et apporte une information topographique précise sur la localisation en profondeur des structures d’intérêt. Le calcul du volume tumoral est possible [15, 18].

SYSTÈME MYOARTHROSQUELETTIQUE

1. Tumeurs osseuses et articulaires

Tumeurs osseuses

La sensibilité de la radiographie pour la détection des lésions débutantes d’ostéolyse est faible et ne permet qu’un diagnostic tardif. Une diminution de 30 à 50 % de la masse osseuse est nécessaire pour que la diminution d’opacité associée soit visible [1, 2].

Évaluer correctement le caractère potentiellement agressif d’une anomalie osseuse repose sur plusieurs critères radiographiques (tableau complémentaire sur http://www.lepointveterinaire.fr) [1, 2, 18]. Trois de ces critères sont particulièrement importants : la destruction du cortex, les caractéristiques des productions osseuses associées et la zone de transition entre la lésion et l’os sain [18]. Le caractère plutôt ostéoproductif, principalement ostéolytique ou d’apparence mixte d’un cancer osseux, n’a aucune valeur dans la détermination du degré d’agressivité biologique (photos 2a, photos 2b et 2c complémentaires sur http://www.lepointveterinaire.fr). Lors de la découverte d’une lésion osseuse agressive, le caractère monostotique (un seul os atteint) ou polyostotique (plusieurs os atteints) de la lésion et sa localisation (épiphyse, métaphyse, diaphyse) sont également des critères très importants à prendre en considération.

Le cancer osseux primitif le plus fréquent chez les CD est l’ostéosarcome, lésion généralement monostotique, métaphysaire, et retrouvée typiquement sur les os longs des chiens de grand format. L’humérus proximal, le radius distal (“loin du coude”), le fémur distal et le tibia proximal (“près du genou”) sont les sites préférentiels.

La découverte d’une lésion osseuse agressive aboutit à un diagnostic différentiel limité, qui inclut les infections et les cancers osseux. En Europe, les ostéomyélites hématogènes d’origine fongique ou bactérienne, mimant un processus néoplasique, sont assez rarement observées dans les os longs chez les CD adultes [1]. Les infections à mycobactéries chez le chat doivent être citées. Les ostéomyélites bactériennes siègent également préférentiellement en région métaphysaire ou diaphysaire, mais sont souvent polyostotiques, contrairement aux tumeurs osseuses primitives [2, 18].

Tumeurs articulaires

Les mêmes principes d’analyse régissent l’appréciation des lésions agressives siégeant dans les articulations. Le diagnostic différentiel des lésions tumorales inclut principalement les arthrites septiques, les synovites villo-nodulaires et les arthrites immunitaires érosives. Les tumeurs des articulations les plus souvent observées sont les synoviosarcomes. Néanmoins, ces tumeurs restent globalement rares chez les CD. Les synoviosarcomes siègent principalement sur le grasset et le coude, et se manifestent initialement par une tuméfaction homogène marquée des tissus mous associés à l’articulation.

L’envahissement osseux subséquent se caractérise par des lésions ostéolytiques à contours nets s’étendant à l’ensemble des os de chaque côté de l’articulation, avec un aspect d’indentation corticale (photo 3) [1, 2, 18].

Ainsi, la découverte d’une lésion osseuse agressive dans un contexte clinique et anamnestique adéquat permet une présomption forte de cancer osseux, qui doit toujours être confirmée par des prélèvements et une analyse histologique du tissu tumoral.

Intérêt du scanner

L’intérêt du scanner en cas de tumeurs osseuses primitives réside principalement dans la réalisation du bilan d’extension. Chez l’homme et le chien, les sites de prédilection des métastases des ostéosarcomes sont les poumons et le squelette [14, 17]. Ainsi, environ 85 à 90 % des chiens présentant un ostéosarcome ont déjà des micrométastases pulmonaires au moment du diagnostic, tandis que la prévalence rapportée des métastases osseuses se situe, quant à elle, entre 8 et 27 % [14]. Le scanner est sans conteste plus sensible que la radiographie pour détecter ces métastases [12].

2. Métastases

L’apparence radiographique des métastases osseuses est variable. Il s’agit généralement de lésions polyostotiques retrouvées dans le squelette appendiculaire et axial. Les métastases osseuses sont généralement ostéolytiques, mais peuvent également apparaître comme des îlots sclérotiques ou des lésions ostéoprolifératives. Dans les os longs, elles sont régulièrement observées dans la diaphyse, ce qui est une localisation atypique pour une tumeur osseuse primitive [1, 2, 17]. Les vertèbres lombaires constituent un des sites de prédilection des métastases osseuses des carcinomes prostatiques et vésicaux (photo 4) [1, 2, 18].

Tous les cancers peuvent théoriquement métastaser dans le tissu osseux, mais, dans l’espèce canine, les carcinomes, notamment mammaires, sont particulièrement représentés [2, 19]. Les ostéosarcomes, les carcinomes transitionnels de la vessie, les carcinomes prostatiques, ainsi que les cancers du foie, des poumons et de la thyroïde peuvent être également cités [18].

THORAX

La radiographie et le scanner sont particulièrement bien adaptés à l’étude de la cavité thoracique, qui possède un excellent contraste naturel grâce à la grande quantité d’air dans le parenchyme pulmonaire. Il est important de souligner le caractère non spécifique des anomalies radiographiques, même quand il s’agit d’un nodule ou d’une masse pulmonaire, qui ne sont pas directement synonymes de cancer. D’autres entités lésionnelles d’origine traumatique (hématome), congénitale (kyste) ou infectieuse (granulome) peuvent se manifester par des lésions d’apparence similaire radiographiquement.

1. Poumons et espace pleural

Carcinome pulmonaire

Chez les CD, la présentation radiographique classique d’un carcinome pulmonaire est une masse d’opacité tissulaire à contours nets siégeant préférentiellement dans les lobes caudaux (photos 5a et 5b) [16, 18]. Les métastases associées à ces carcinomes sont essentiellement intrathoraciques et concernent le tissu pulmonaire, les plèvres et les nœuds lymphatiques (NL). La présence de métastases pulmonaires radiographiquement visibles est possible, mais, en pratique, peu fréquente.

Des plages d’opacité aérique et/ou des minéralisations accompagnent souvent les tumeurs pulmonaires primitives, particulièrement chez le chat [16, 18]. L’apparence radiographique de certains cancers pulmonaires comme le carcinome broncho-alvéolaire est parfois plus diffuse, consistant en un infiltrat bronchique et interstitiel, en des plages d’opacification alvéolaire et en des masses éventuellement cavitaires [16, 18]. Les carcinomes pulmonaires primitifs chez le chat métastasent fréquemment dans les doigts [7]. La découverte d’une ou de plusieurs lésions osseuses agressives dans les phalanges distales doit donc inciter à examiner radiographiquement le thorax, même en l’absence de signes respiratoires (“syndrome doigt-poumon”).

Métastases pulmonaires

L’apparence radiographique des métastases pulmonaires est variable. Le plus fréquemment, il s’agit de nodules d’opacité tissulaire homogène, à contours bien délimités (photo 6 complémentaire sur http://www.lepointveterinaire.fr). La sensibilité de la radiographie pour détecter des nodules pulmonaires dépend de leur taille [16, 18]. La limite inférieure de détection d’un nodule est de 7 à 9 mm, alors qu’elle est de l’ordre du millimètre en scanner [12, 18]. Un nodule pulmonaire n’est parfois visible que sur une seule incidence, justifiant la réalisation de trois incidences radiographiques (latérales droite et gauche, et ventro-dorsale) dans ce contexte.

Les métastases pulmonaires peuvent se manifester également comme des nodules à contours flous, particulièrement chez le chat, des opacifications interstitielles plus ou moins structurées, une opacification miliaire ou des consolidations pulmonaires (photo 7 complémentaire sur http://www.lepointveterinaire.fr) [16, 18].

Sarcome histiocytaire

Le poumon est un site potentiel d’envahissement lors de certains cancers systémiques tels que le sarcome histiocytaire disséminé ou le lymphome multicentrique. La présentation radiographique de ce type de lésion inclut des plages d’opacification de type alvéolaire, des consolidations lobaires ou une opacification interstitielle diffuse, associée ou non à une adénomégalie trachéo-bronchique [6, 16, 18].

Les modifications radiographiques visibles lors d’un épanchement pleural sont identiques quelle que soit la nature du liquide car ce dernier vient effacer les contours des structures d’opacité liquidienne adjacentes, limitant l’interprétation des structures cardiaques et pulmonaires. Le recours à d’autres examens, échographie ou scanner, est alors recommandé [15, 16, 18].

2. Masses extrapulmonaires de la cavité thoracique

Les masses extrapulmonaires peuvent siéger dans l’espace pleural, le médiastin et la paroi thoracique. Les masses médiastinales sont fréquentes chez les CD, particulièrement en région cranio-ventrale de la cavité thoracique. Elles ne sont pas spécifiques des tumeurs, et peuvent représenter aussi une lésion kystique, un abcès ou un granulome.

Le contraste spontané des structures médiastinales est faible en radiographie (peu de graisse entre elles) et la majorité des masses médiastinales sont d’opacité tissulaire homogène. L’analyse précise des caractéristiques de la masse lors de l’examen radiographique (localisation et déplacement des structures adjacentes) est une aide au diagnostic, mais le recours au scanner ou à l’échographie reste nécessaire (photos 8a et 8b complémentaires sur http://www.lepointveterinaire.fr) [2, 16, 18].

Les masses extrapleurales ont un contour convexe et une large base de contact avec la paroi thoracique, réalisant un angle obtus avec celle-ci (nommé “signe extrapleural”) [16, 18]. La détection de ce type de masse doit inciter à rechercher une tumeur de la paroi thoracique. Ces tumeurs ont en effet tendance à s’étendre dans la cavité thoracique plutôt que vers l’extérieur. Les côtes sont fréquemment impliquées et, lors de la découverte d’une masse extrapleurale, un examen minutieux des structures osseuses associées à la cavité thoracique est toujours recommandé. La radiographie est généralement suffisante pour mettre en évidence une lésion osseuse agressive siégeant dans une côte. Toutefois, la présence d’un épanchement pleural associé peut gêner l’interprétation (photos 9a et 9b) [16, 18]. Le scanner est particulièrement utile pour mieux délimiter la lésion osseuse et réaliser le bilan d’extension.

Seules les adénomégalies médiastinales et trachéo-bronchiques importantes, observées lors de lymphome, par exemple, sont aisément détectées lors d’un examen radiographique. Globalement, la sensibilité de la radiographie pour identifier un envahissement de ces NL est faible et justifie le recours au scanner [16, 18].

CAVITE ABDOMINALE

Le contraste de la cavité abdominale repose sur la graisse naturellement présente entre les viscères et les organes parenchymateux. L’abdomen est une région anatomique qui se caractérise par un faible contraste naturel, limitant l’intérêt de la radiographie dans le diagnostic des cancers. Celle-ci est actuellement souvent remplacée par l’échographie et/ou le scanner.

1. Organes parenchymateux

Envahissement diffus d’un organe

L’envahissement diffus d’un organe par un contingent de cellules tumorales se traduit par une augmentation de sa taille. De nombreux facteurs influent sur la sensibilité de la radiographie pour la détection d’une organomégalie (organe étudié, âge de l’animal, espèce), mais, globalement, les modifications de taille doivent être marquées avant de pouvoir être décelées. Chez le chien, l’augmentation de la taille de la prostate est ainsi souvent assez facilement reconnue radiographiquement, mais, en ce qui concerne la rate, organe dont le volume et la position sont physiologiquement variables, la reconnaissance d’une modification de taille est relativement subjective. Chez le chat, la visualisation de la rate le long de la paroi abdominale ventrale sur un cliché de profil est en faveur d’une splénomégalie [13, 18].

L’observation de plages de minéralisation dans certains organes présente une spécificité variable pour le diagnostic des lésions cancéreuses. Par exemple, les minéralisations des glandes surrénales sont des découvertes fortuites fréquentes chez le chat [13, 18]. Chez le chien, elles sont le plus souvent associées à un processus tumoral, mais ne constituent pas un facteur discriminant entre une lésion bénigne de type adénome et un cancer [2, 8, 13, 18]. Observer des plages irrégulières de minéralisation dans la prostate n’est pas pathognomonique d’un processus tumoral car elles peuvent se développer secondairement à des prostatites chroniques. Toutefois, elles ont une forte probabilité d’être associées à un cancer s’il s’agit d’un chien mâle castré (photos 10a et 10b complémentaires sur http://www.lepointveterinaire.fr). Le scanner et l’échographie sont plus sensibles que la radiographie pour détecter des foyers de calcification dans les organes parenchymateux [15].

Nodules et masses

L’identification radiographique de l’organe d’origine d’une masse abdominale repose principalement sur des signes indirects : localisation, déplacement ou compression des organes adjacents et absence de visualisation de la silhouette normale de l’organe. L’échographie est préférée bien que l’évaluation topographique précise d’une volumineuse masse abdominale n’est pas toujours ­possible avec cette technique [13, 18]. Le scanner est alors très utile pour localiser précisément le siège d’un nodule ou d’une masse même volumineuse (photo 11) [15]. Il permet également d’évaluer les structures vasculaires adjacentes, qui peuvent être envahies lors d’adénocarcinomes et de phéochromocytomes surrénaliens (photo 12) [8, 21].

2. Organes creux

La radiographie sans préparation ne permet pas de différencier la paroi et le contenu luminal d’un organe creux dilaté par un contenu liquidien homogène, comme c’est le cas pour la vessie. Ainsi, la majorité des cancers vésicaux, qui se manifestent par des modifications pariétales focales avec extension dans la lumière vésicale, sont invisibles lors d’un examen radiographique classique.

Le tube digestif présente, quant à lui, un contenu plus variable, liquidien, particulaire, gazeux, parfois minéral. Même si la présence de gaz donne parfois faussement l’impression de pouvoir apprécier les contours de la paroi de certains segments du tractus digestif, la radiographie sans préparation permet rarement d’identifier une lésion pariétale digestive [13, 18]. Les lésions tumorales pariétales entraînent parfois des subobstructions intestinales, pouvant être mises en évidence par une accumulation intraluminale de matériel radio-opaque à la radiographie (photo 13 complémentaire sur http://www.lepointveterinaire.fr). Le recours à des produits de contraste pour marquer la lumière des organes cavitaires (transit baryté pour le tractus digestif, cystographie à double contraste pour la vessie) accroît la sensibilité diagnostique de la radiographie, mais est désormais le plus souvent remplacé avantageusement par l’échographie.

En médecine humaine, le scanner est une modalité d’imagerie classiquement utilisée pour le diagnostic des lésions du tube digestif, mais ce n’est pas le cas en médecine vétérinaire où l’examen échographique reste prépondérant. L’intérêt potentiel du scanner est cependant étayé par de récentes publications [4].

3. Espace péritonéal

Certains paramètres techniques et de nombreuses maladies siégeant dans l’espace péritonéal sont à l’origine d’une diminution du contraste abdominal à l’examen radiographique. Celle-ci peut être secondaire à la présence d’un épanchement péritonéal et est d’autant plus marquée que la quantité de liquide est importante.

Parmi les causes potentielles de ce phénomène, les tumeurs diffuses ou localisées du péritoine se développant de façon primitive ou secondaire doivent être citées. L’intérêt de la radiographie est rapidement limité, car la présence d’un épanchement péritonéal, en plus de n’être pas spécifique, oblitère partiellement ou complètement les éventuelles modifications associées d’organes abdominaux [13, 18]. L’examen échographique et/ou scanner sont nécessaires pour la poursuite des investigations diagnostiques. Dans certains cas, la diminution du contraste s’accompagne d’une apparence hétérogène particulière sur les clichés radiographiques, nommée “en verre dépoli”, de l’ensemble de la cavité abdominale. Ce type d’images est associé à une dissémination de nodules métastatiques dans le péritoine, dénommée “carcinomatose”, ou à une péritonite (photo 14).

TÊTE

Le crâne et les cavités orale et nasales sont des régions anatomiques complexes dont l’examen radiographique implique une anesthésie générale et la réalisation de multiples incidences pour limiter les superpositions. La radiographie a ainsi perdu beaucoup de son intérêt au profit du scanner, qui peut être désormais considéré comme un examen de référence pour le diagnostic des tumeurs dans cette localisation. Il permet de surcroît la réalisation concomitante du bilan d’extension. Dans le contexte du diagnostic des tumeurs de l’encéphale, le recours systématique à l’imagerie en coupe, à la tomodensitométrie ou à l’imagerie par résonance magnétique (IRM) est nécessaire.

1. Cavité orale

Les tumeurs de la cavité orale sont fréquentes, chez le chien comme chez le chat, et sont plus souvent malignes que bénignes [1, 18]. Le mélanome, le carcinome épidermoïde et le fibrosarcome sont les tumeurs orales malignes les plus souvent observées chez le chien, tandis que le carcinome épidermoïde prédomine dans l’espèce féline.

Ces tumeurs envahissent généralement l’os, et ce de manière extensive lors de carcinome épidermoïde chez le chat. Les tumeurs osseuses primitives sont moins souvent rencontrées dans cette localisation chez les CD.

L’apparence radiographique des cancers de la cavité orale est variable et n’est pas caractéristique du type histologique. Un gonflement des tissus mous, des lésions ostéolytiques mal délimitées, des productions osseuses irrégulières plus ou moins étendues, et des dents déplacées ou manquantes sont les anomalies radiographiques et tomodensitométriques classiquement observées (photos 15a et 15b complémentaires sur http://www.lepointveterinaire.fr).

Les tumeurs orales malignes se caractérisent par un envahissement locorégional et leur pouvoir métastatique est variable. Le bilan d’extension de ces tumeurs inclut un examen des nœuds lymphatiques satellites et du thorax. Le scanner est beaucoup plus performant que la radiographie pour déterminer l’extension réelle du processus tumoral avant un éventuel traitement chirurgical et permet de compléter l’indispensable évaluation des NL régionaux [1, 15, 18].

2. Cavités nasales

Les tumeurs malignes constituent la majorité des lésions tumorales rencontrées dans cette localisation. Elles se caractérisent par un envahissement local, et une éventuelle dissémination aux NL mandibulaires et rétro­pharyngiens. Les signes radiographiques typiques d’une tumeur des cavités nasales chez le chien incluent une augmentation d’opacité uniforme de l’ensemble d’une des cavités (tumeur généralement unilatérale, parfois bilatérale en cas de lyse du septum nasal), une disparition du motif trabéculaire des cornets nasaux, la présence de lésions lytiques des structures osseuses limitantes et une opacification liquidienne du sinus frontal ipsilatéral. La lyse des structures osseuses est un marqueur clé du diagnostic, mais l’examen radiographique est peu sensible pour mettre en évidence ces lésions par rapport au scanner. Lors de la détection de lésions radiographiques des cavités nasales, l’enjeu est d’établir le diagnostic différentiel entre une rhinite hyperplasique ou lytique et une tumeur. La différenciation entre cancer et rhinite à partir des examens d’imagerie est plus aisée chez chien que chez le chat [3, 11, 15, 18]. Le scanner permet une très bonne évaluation de l’extension des lésions, mais des biopsies des cavités nasales sont souvent nécessaires afin d’établir un diagnostic définitif (photo 16).

3. Encéphale et boîte crânienne

Radiographie

Les tumeurs primitives ou métastatiques de l’encéphale produisent rarement des modifications détectables lors d’un examen radiographique [1, 18].

Scanner

Le liquide cérébro-spinal, la matière grise et la matière blanche possèdent des densités propres légèrement différentes lors d’un examen de scanner. L’intérêt de celui-ci est avéré pour détecter certaines tumeurs primitives intracrâniennes, notamment celles caractérisées par une prise de contraste importante. Le scanner est également particulièrement utile dans la détection de métastases intracrâniennes, donc dans le cadre du bilan d’extension d’un cancer. Les métastases d’un hémangiosarcome dans l’espèce canine peuvent être citées en exemple. Dans cette espèce, un taux de métastases intracrâniennes proche de 14 % est rapporté dans les études nécropsiques, et il s’agit des tumeurs intracrâniennes secondaires les plus fréquentes [17, 20]. Toutefois, la différenciation entre matière grise et matière blanche est beaucoup moins évidente qu’avec une IRM, qui est sans conteste la modalité d’imagerie la plus adaptée à l’examen du système nerveux.

Conclusion

L’apport de la radiographie et du scanner peut être qualifié d’essentiel, tant pour le diagnostic que dans la mise en œuvre de l’indispensable bilan d’extension. Les contraintes financières du propriétaire de l’animal et les difficultés d’accès aux techniques d’imagerie les plus avancées telles que le scanner sont cependant à prendre en considération lors du choix de l’examen d’imagerie. Les examens d’imagerie donnent des résultats très rarement spécifiques et ne peuvent s’affranchir de la réalisation d’autres investigations indispensables à la confirmation du diagnostic, telles que les cytoponctions à l’aiguille fine et les biopsies.

Références

  • 2. Dennis R, Kirberger RM, Barr F, Wrigley RH. Handbook of small animal radiology and ultrasound. 2nd ed. Elsevier. 2010:371p.
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  • 4. Fitzgerald E, Lam R, Drees R. Improving conpiscuity of the canine gastrointestinal wall using dual-phase contrast-enhanced computed tomography: a retrospective cross-sectionnal study. Vet. Radiol. Ultrasound. 2017;58:151-162.
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  • 13. O’Brien B, Barr FJ. BSAVA Manual of canine and feline abdominal imaging. British Small Animal Veterinary Association. 2009:253p.
  • 16. Schwarz T, Johnson V. BSAVA Manual of canine and feline thoracic Imaging. British Small Animal Veterinary Association. 2008:287p.
  • 21. Yoshida O, Kutara K, Seki M et coll. Preoperative differential diagnosis of canine adrenal tumors using triple-phase helical computed tomography. Vet. Surg. 2016;45:427-435.

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ La radiologie et le scanner utilisent les rayons X pour la construction d’images à visée diagnostique et reposent sur les mêmes grands principes physiques.

→ La qualité technique d’un examen radiographique joue un rôle considérable dans la sensibilité diagnostique de cette modalité d’imagerie.

→ La radiographie garde un intérêt majeur pour le diagnostic des tumeurs primitives ou métastatiques de la cavité thoracique et du squelette appendiculaire et axial.

→ La résolution en contraste du scanner est meilleure, comparativement à la radiographie, et permet, par exemple, de préciser la nature liquidienne ou tissulaire d’une lésion.

→ Le scanner est plus sensible que la radiographie pour la détection précoce de lésions osseuses et de métastases pulmonaires. Cela en fait l’examen de référence pour les bilans d’extension de nombreux cancers.