ANESTHÉSIE LOCORÉGIONALE
Dossier
Auteur(s) : Stephan Mahler
Fonctions : Clinique vétérinaire Pans’Bêtes,
Centre commercial des Clouères,
35690 Acigné
Selon la technique utilisée, échographie ou neurostimulation, il est possible de bloquer les branches des racines C6 à T1 avant ou après leur division, donc d’obtenir une anesthésie locorégionale plus ou moins étendue.
Chez l’homme, presque toute la chirurgie du membre thoracique, de l’épaule à la main, peut être réalisée sous anesthésie locorégionale (ALR). Cette prise en charge est toujours considérée en première intention, avant l’anesthésie générale, car ses avantages sont nombreux : moins d’inconfort, une plus faible consommation d’antalgiques, des temps d’hospitalisation plus courts, une rééducation et une récupération fonctionnelle plus rapides.
En ALR des animaux de compagnie, la neurostimulation et l’échographie sont décrites et certaines chirurgies orthopédiques du membre thoracique peuvent être réalisées en diminuant significativement les doses d’anesthésiques et les scores de douleur [1, 5, 6].
L’auteur a volontairement sélectionné parmi les nombreuses techniques d’ALR celles qu’il pratique régulièrement et dont il recommande l’usage.
L’expérience montre que le taux de succès du bloc des nerfs du plexus brachial, sans assistance technique, est très variable chez le chien et le chat : les différences de format, de taille et l’absence d’étude sur les variations anatomiques entre animaux expliquent ce phénomène. En effet, il n’existe pas de repère anatomique fiable pour identifier les nerfs dans l’espace axillaire. Le recours à la neurostimulation et à l’échographie améliore considérablement le taux de succès, même dans des mains inexpérimentées (plus de 90 % de taux de réussite) [7].
Les branches ventrales des racines C6 à T1 émergent dans l’espace axillaire à la face ventrale du muscle scalène. Elles se divisent et se réorganisent rapidement pour donner naissance aux nerfs du plexus brachial. C’est dans cet espace axillaire que l’auteur décrit le bloc des racines et des nerfs du plexus brachial, en neurostimulation et en échographie.
> L’échographie permet d’identifier et de bloquer les branches des racines C6 à T1 avant leurs divisions : la totalité du membre thoracique, incluant l’articulation scapulo-humérale, peut être anesthésiée.
> La neurostimulation permet de bloquer les nerfs du plexus brachial plus distalement, après que les branches des racines se sont réorganisées. Les nerfs axillaire et suprascapulaire ne sont souvent pas inclus dans ce bloc, car ils quittent proximalement le plexus : l’anesthésie va être limitée au coude et aux zones situées distalement, innervées par les nerfs musculo-cutané, ulnaire, médian et radial.
L’animal est placé en décubitus dorsal avec le membre thoracique en abduction.
L’abduction du membre thoracique permet de faire saillir les muscles pectoraux superficiels et profonds, entre le sternum et le membre. La sonde est placée ventralement et perpendiculairement à ces muscles pectoraux, dans une position parasagittale [1, 2]. L’espace axillaire est ainsi balayé, de la première côte à l’humérus (vidéo 1 complémentaire sur lepointveterinaire.fr).
Sur l’image échographique ainsi obtenue, l’opérateur identifie le muscle pectoral superficiel directement sous la sonde et, dorsalement (donc plus en profondeur), le muscle pectoral profond. Dorsalement à ces muscles, dans l’espace axillaire, l’artère et la veine axillaires sont identifiables. Dans cette incidence, ces vaisseaux sont coupés transversalement et leurs images donnent le signe de la double-bubble (double bulle). La première côte est ensuite identifiée en suivant médialement ces vaisseaux, caudalement. Là, entourant les vaisseaux axillaires, les racines du plexus brachial forment quatre petites structures rondes hyperéchogènes. La racine de C8 est localisée immédiatement dorsalement à l’artère axillaire. Cranialement à l’artère se trouvent C7 et C6. T1 est localisée caudalement à C8. Plus la sonde s’éloigne latéralement, plus ces racines s’organisent en nerfs, cranialement aux vaisseaux axillaires, dans un tissu conjonctif hyperéchogène ovoïde (photo 1).
La sonde est manipulée avec la main non dominante. L’aiguille est introduite dans le plan des ultrasons (technique in plane), dans une direction cranio-caudale, et dirigée sous les muscles pectoraux. Si la neurostimulation est utilisée, les caractéristiques des contractions musculaires sont appréciées. L’objectif est d’entourer toutes les racines ou les nerfs avec un anesthésique local (vidéos 2 et 3 complémentaires sur lepointveterinaire.fr).
Le volume recommandé est de 0,15 à 0,2 ml/kg de bupivacaïne (soit une dose de 0,75 à 1,0 mg/kg pour une solution à 5 mg/ml), à adapter en fonction des images échographiques obtenues. En raison des nombreux vaisseaux et de la proximité de l’espace pleural, il est important d’avoir toujours à l’écran la pointe de l’aiguille et de ne pas la bouger si elle sort du champ des ultrasons.
L’animal est en décubitus latéral. Le membre à bloquer est dans une position neutre.
Les repères anatomiques sont l’acromion et le tubercule majeur de l’humérus, la jugulaire et la première côte (photo 2).
Les faces latérales du cou, de l’épaule et la région axillaire sont tondues et préparées pour l’injection. Une ligne imaginaire est tracée entre l’acromion et le bord cranial du tubercule majeur [4]. Le neurostimulateur est réglé à une intensité de stimulation initiale de 1 à 2 mA. L’aiguille est introduite sous le bord cranial de l’acromion, perpendiculairement à cette ligne imaginaire. L’espace axillaire peut être ouvert par une rotation externe du membre et une abduction de la scapula, pour faciliter l’introduction initiale de l’aiguille. Cette dernière ne doit pas être introduite au-delà de la première côte pour éviter une ponction accidentelle des vaisseaux axillaires ou un pneumothorax. Toute résistance à l’introduction suggère que l’aiguille pénètre dans les muscles de l’épaule ou du thorax, et n’est plus strictement dans l’espace axillaire. Elle doit alors être retirée et repositionnée.
Tous les nerfs du plexus brachial peuvent être identifiés par leurs contractions musculaires (tableau). Une réponse du nerf radial ou du nerf musculo-cutané peut néanmoins être considérée comme un résultat acceptable pour commencer l’injection car ces deux nerfs sont situés au milieu du paquet nerveux. Le volume recommandé est de 0,25 à 0,3 ml/kg (soit une dose de 1,25 à 1,5 mg/kg pour une solution de bupivacaïne à 5 mg/ml) (vidéo 4 complémentaire sur lepointveterinaire.fr).
Le risque de pontion vasculaire est possible dans le creux axillaire (vaisseaux axillaires, veine jugulaire) : la complication la plus grave est donc l’injection intravasculaire. Le choix d’une aiguille à biseau court est préférable et sa progression doit être lente. Le risque de ponction de l’espace pleural ne doit pas être négligé : la longueur de pénétration de l’aiguille est adaptée en fonction des repères anatomiques. Le nerf phrénique chemine le long du bord ventral du muscle scalène, il est donc en contact avec les racines C6 à T1 [4]. En utilisant la neurostimulation pour bloquer les nerfs du plexus brachial, il est peu probable de bloquer le nerf phrénique. Avec l’échographie, l’anesthésique local est déposé au contact des racines, donc vraisemblablement du nerf phrénique. L’incidence et les conséquences du bloc du nerf phrénique n’ont pas été étudiées en médecine vétérinaire. En revanche, il est recommandé d’en tenir compte chez les animaux insuffisants respiratoires ou lors de blocs bilatéraux [1]. Plus rarement, un syndrome de Claude-Bernard-Horner peut être constaté.
Plusieurs techniques sont actuellement décrites pour bloquer les nerfs du membre antérieur, en fonction des préférences de chacun et des moyens disponibles (neurostimulation et/ou échographie). Ces techniques s’appliquent aussi bien chez le chien que chez le chat et viennent efficacement compléter l’analgésie multimodale péri-opératoire.
Aucun.
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