TOXICOLOGIE ET PHARMACOLOGIE
Thérapeutique
Auteur(s) : Julien Bazelle
Fonctions : Queen’s Veterinary
School Hospital,
Cambridge University,
Madingley Road,
Cambridge, CB3 0ES,
Royaume-Uni
Les émulsions lipidiques intraveineuses sont très utiles pour traiter certaines intoxications réfractaires. Une validation clinique reste nécessaire.
Les émulsions lipidiques sont composées de multiples microparticules. Elles ont été initialement utilisées comme partie intégrante des liquides de nutrition parentérale (photo). Leur composition est variable, mais les plus fréquemment administrées sont à base d’huile de soja [8].
Plus récemment, l’utilisation d’émulsions lipidiques intraveineuses (EIL) a connu un renouveau en raison de leur grande efficacité dans le traitement des intoxications par les anesthésiques locaux ou dans d’autres types d’intoxication [3, 13]. Cet effet, suspecté par Weinberg dès 1998, a été tout d’abord observé expérimentalement chez des rats puis des chiens [16, 17]. Ces expériences ont montré une réversion rapide des effets toxiques sur la fonction cardiaque d’une overdose de bupivacaïne et une survie des animaux traités. Les études suivantes ont démontré une nette supériorité des EIL sur les traitements classiques des intoxications aux anesthésiques locaux comme l’adrénaline ou autres vasopresseurs [7, 15].
Le mécanisme d’action des EIL dans le traitement des intoxications aux anesthésiques locaux n’est pas encore totalement élucidé (figure). L’interprétation actuelle va dans le sens d’un effet chélateur de l’EIL. L’EIL est théoriquement à l’origine d’une phase lipidique dans le plasma de l’individu traité, au cours de laquelle les composés fortement lipophiles vont se trouver piégés, entraînant une diminution de la concentration plasmatique du toxique. En conséquence, le toxique présent dans le cytoplasme diffuse à travers la membrane plasmatique vers le plasma sanguin, suivant le gradient de concentration [17]. Cet effet chélateur n’est probablement pas l’unique effet des EIL dans le traitement des intoxications. Un effet stimulateur du métabolisme notamment cardiaque a été décrit après utilisation d’EIL [14].
Les résultats des essais expérimentaux chez les animaux ont encouragé l’emploi d’EIL en médecine humaine dans des cas d’intoxication aux anesthésiques locaux dès 2006 [12]. Désormais, les EIL font partie de l’arsenal thérapeutique recommandé de toute équipe d’anesthésie [2, 13]. Ces dernières années, l’utilisation des EIL s’est généralisée pour traiter diverses intoxications par des substances lipophiliques telles que des β-bloquants, des inhibiteurs du canal calcique, des produits antiparasitaires ou encore des agents psychotropes [6, 9, 13].
→ En médecine vétérinaire, la majorité des recommandations sont fondées sur des observations expérimentales chez le chien [1, 16]. Relativement peu de cas cliniques ont été publiés. Ils concernent 2 chiens traités pour une intoxication à une avermectine et 1 chat traité pour une overdose de lidocaïne [4, 5, 11]. Les doses suggérées pour le traitement du chien et du chat sont issues des recommandations humaines : un bolus d’EIL 20 % de 1,5 à 4 ml/kg doit être perfusé rapidement, en 1 minute, et est suivi d’une administration en continu à 0,25 ml/kg/min sur 30 à 60 minutes [8]. Le bolus peut être répété si l’animal ne répond pas au traitement jusqu’à une dose maximale de 7 ml/kg [8].
→ Ces doses n’ont pas été validées dans un contexte clinique, mais les données expérimentales suggèrent une excellente tolérance lors d’utilisation d’EIL chez le chien. En médecine humaine, les effets secondaires sont limités lors d’une administration unique, mais une élévation transitoire de l’amylasémie a été décrite et des risques de réactions d’hypersensibilité sont toujours possibles [10]. Enfin, les EIL peuvent interférer avec d’autres substances lipophiles et la lipémie peut interagir avec certaines réactions colorimétriques utilisées par les analyseurs de biochimie.
Les EIL ont récemment prouvé qu’elles faisaient partie intégrante de la gestion de certaines intoxications par des composés lipophiliques. Néanmoins, leur utilisation doit être limitée aux intoxications réfractaires à un traitement intensif classique. Davantage d’études sur un plus grand nombre de cas sont nécessaires pour conclure sur l’efficacité et la sécurité de ces EIL. Un site Internet d’informations très complet a été créé pour partager les connaissances sur ce nouveau traitement(1).
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