Proposition d’une convention pour schématiser l’allotement

Le schéma d’allotement est une représentation graphique de la conduite globale du troupeau sur une période donnée, le plus souvent une année. Il constitue un support d’enregistrement des informations concernant les pratiques d’allotement dans les élevages. Leurs performances techniques peuvent dépendre de celles-ci [¹, ³, ⁴, ⁷, ⁹, ¹⁰]. Ce schéma est construit, lors d’une première visite, d’après le nombre de lots, les caractéristiques des lots d’animaux, le nombre de bâtiments, leur type, leur localisation, la structuration du parcellaire, etc. (encadré 1). Chaque événement de conduite (traitements, mise à la reproduction, etc.) est alors ajouté au fur et à mesure des passages, dans le cadre d’un suivi régulier. Si besoin, il peut être construit a posteriori, afin de visualiser les événements survenus durant l’année écoulée, car c’est un support pratique de dialogue avec l’éleveur (^{photo 1}) [⁵].

RECUEIL DES INFORMATIONS

1. Information de base

L’information de base est constituée de trois éléments principaux :

– les caractéristiques des différents lots identifiés à l’échelle de la période d’étude (année, saison de pâturage, période hivernale, etc.), en distinguant les différentes modalités d’hébergement à l’intérieur (boxes, stabulation libre, à l’attache) et la conduite à l’extérieur (pâturage ou hivernage en plein air) ;

– toutes les modifications réalisées au cours de la période concernant l’organisation du troupeau en lots (mélanges, tris, mouvements d’animaux entre lots, achats et/ou ventes d’animaux) en distinguant les opérations d’allotement des mouvements d’animaux entre lots existants ;

– les éléments liés à la conduite zootechnique qui fa-ci-litent la lecture des schémas, comme l’identification des principales phases des cycles de reproduction (périodes de mise bas, dates d’introduction et de retrait des mâles, phases de sevrage), les noms permettant d’identifier les lots (par exemple “femelles gestantes“, “allaitantes“, “taries“, etc.) et les effectifs des lots quand ils ne peuvent pas être déduits directement de l’observation du schéma.

2. Construction du schéma d’allotement

Le support de dessin utilisé est une feuille au format A3 sur laquelle est représenté un calendrier annuel vertical qui situe les informations recueillies dans le temps ^{(figure 1)}. Des espaces sont ménagés en haut et en bas de la feuille (début et fin de la période d’étude, ce qui peut correspondre, par exemple, à l’année) pour les inventaires en animaux (nombre de lots, effectifs, etc.).

Elle est réalisée conformément aux modalités explicitées en première partie. Toutefois, il semble logique et plus facile dans la démarche de partir d’un état connu précisément, souvent à une période clé. Il correspond, selon les cas, à la situation le jour de l’enquête ou au moment de la mise à l’herbe (constitution des lots pour la reproduction), en début d’hivernage, ou durant l’hiver (lots stables dans les bâtiments). Après avoir terminé, il est important d’effectuer une relecture du schéma avec l’éleveur, notamment en contrôlant la cohérence des effectifs par lot au cours du temps. Cela permet de corriger les plus grosses erreurs et de valider une première fois l’information.

3. Informations complémentaires

Plusieurs points peuvent être approfondis afin de comprendre plus précisément les motivations de l’éleveur et les critères qu’il prend en compte pour alloter ses animaux [⁶] :

– détail des opérations d’allotement durant les périodes de transition (mise à l’herbe, rentrée en bâtiments) ;

– description de chaque opération d’allotement identifiée sur le schéma, en l’occurrence déterminer quelles en sont les causes, les motivations, les objectifs ;

– description des évolutions et des adaptations qui ont pu avoir lieu au cours des années précédentes.

PROPOSITION DE CONVENTIONS GRAPHIQUES

1. Représentation des lots

→ Les animaux conduits à l’attache ne forment pas véritablement des lots car ils ne sont pas libres de leurs mouvements dans un espace donné (case, stabulation, parcelle). Un seul code graphique les désigne (code 1, ^{figure 2}). Il existe toutefois plusieurs possibilités pour représenter graphiquement des groupes parmi l’ensemble des animaux à l’attache, en distinguant soit les générations (génisses âgée d’un an, de 2 ans, primipares, etc.), soit les lieux (bâtiment 1, bâtiment 2, etc.), soit les stades physiologiques (femelles gestantes, allaitantes, etc.).

→ Parmi les animaux conduits en lots (non attachés), ceux qui sont à l’intérieur (case, stabulation, code 2) sont distingués graphiquement de ceux qui sont à l’extérieur (code 3).

→ Dans certains cas, particulièrement pendant les périodes transitoires (mise à l’herbe, rentrée en bâtiments), les animaux peuvent être dehors la journée et rentrés pour la nuit (à l’attache ou non). Une combinaison des codes précédents est alors proposée (codes 4a et 4b).

2. Opérations d’allotement et mouvements d’animaux

Les recombinaisons de lots (fusion ou tri), ainsi que les mouvements d’animaux entre lots, sont matérialisés par des pointillés horizontaux (codes 5a et 5b) reliant les lots concernés, c’est-à-dire les lots de provenance et de destination (^{figure 3}). Des flèches indiquent le sens des transferts d’animaux. Une codification indique (code 6) les modifications de l’allotement qui sont étalées dans le temps (mises bas, par exemple, ou quand l’éleveur constitue un lot de femelles allaitantes au fur et à mesure des naissances). Les effectifs impliqués dans le transfert d’animaux sont mentionnés quand ils sont connus et que cela est nécessaire. Les mouvements d’animaux concernant des lots déjà existants sont mentionnés selon leur nature : achat (code 7a) ou vente (code 7b) un jour donné, ou étalés sur une période connue (code 7c), et arrivée ou départ en pension (codes 7d et 7e).

Pour des opérations particulièrement complexes et délicates à représenter graphiquement (par exemple, une recombinaison de nombreux lots pour laquelle la répartition des animaux est connue pour chaque lot), il est préférable de simplifier sur le schéma et d’expliciter sur une feuille à part les détails de l’opération.

3. Début et fin d’un lot

Par convention, les lots sont répartis de la gauche vers la droite de la manière suivante : les femelles par âge décroissant (des femelles de réforme aux femelles de l’année), puis les mâles par âge croissant (des mâles de l’année aux reproducteurs). Trois règles sont définies pour déterminer dans quelles situations commence ou se termine un lot (encadré 2).

4. Informations liées à la reproduction

Certains événements importants sont mentionnés : le début et la fin de la période des mises bas (codes 8a et 8b) et les opérations de sevrage effectuées à des dates connues avec précision ou non (codes 9a et 9b) (^{figure 7}). Ces événements permettent, entre autres, de repérer les périodes durant lesquelles les jeunes sont avec leur mère. Les pratiques de reproduction sont également représentées avec l’introduction et le retrait des mâles dans les différents lots de reproductrices (codes 10a et 10b) et la mention éventuelle du recours à l’insémination artificielle, avec les effectifs correspondants (code 10c). Pour les lots principaux, des noms nécessaires à la compréhension du schéma sont également mentionnés (“reproductrices”, “génisses de 2 ans”, “agnelles de renouvellement”, etc.), ainsi que les effectifs correspondants.

5. Autres informations

Les traitements sanitaires (mères et/ou produits dans les lots de mères suitées), les vaccinations et les échographies peuvent également être indiquées (^{figure 8}). Pour les ovins, d’autres symboles peuvent être utilisés pour la pose d’éponges, la baignade ou la tonte (^{photo 2}).

6. Bilan

À ce stade de la représentation, certains éléments de fonctionnement du troupeau peuvent être décrits :

– la période de mises bas ou le rythme de reproduction en élevage ovin ;

– la politique de mise à la reproduction des femelles : mélange ou non des générations, dates de reproduction selon les catégories d’animaux, mode de reproduction selon les lots (monte naturelle, insémination, etc.) ;

– certaines pratiques de conduite au pâturage : critères de composition des lots à la mise à l’herbe, taille des lots, séparation éventuelle des mères selon le sexe des produits, etc.

– la répartition et l’étalement des sevrages ;

– la conduite des femelles de renouvellement (moments des tris et de leur intégration au reste du troupeau et des femelles de réforme (moments des sorties du troupeau) ;

– la politique des ventes : dates et effectifs par catégories (produits de l’année, réformes, reproducteurs mâles ou femelles), répartition sur l’année.

L’observation visuelle des schémas permet de détecter les différences de complexité entre plusieurs formules d’allotement⁽¹⁾.

Conclusion

L’ensemble des règles et des conventions présentées ont été testées et validées [⁸]. Le schéma pourrait être construit directement par l’éleveur tout au long de l’année et servir de support de réflexion pour la conduite et les choix à réaliser. Un outil de saisie informatique (appelé Batchman, pour batching management) est actuellement en cours de développement. Cela va autoriser l’éleveur, notamment, à garder la trace des pratiques d’allotement sur plusieurs années, à modifier l’information en cas de besoin et à choisir les pratiques indiquées sur le schéma (alimentation hivernale, pâturage, reproduction, etc.). Cet outil permet de plus d’enregistrer la liste des numéros d’animaux pour chacun des lots.

• (1) Des indices quantitatifs peuvent être calculés pour évaluer la complexité d’une formule d’allotement donnée et la comparer à d’autres [²]. Cela concerne le nombre total de lots identifiés sur une période, le nombre moyen de lots gérés par jour, la durée de vie moyenne des lots, l’effectif moyen par lot et le nombre de lots à durée de vie réduite (révélateur des périodes de transition, comme par exemple, la mise à l’herbe).

Références

• 1. Augier S. Effets des groupes d’animaux et de la constitution des lots sur le niveau d’ingestion et le comportement alimentaire. Rapport bibliographique. Enita Clermont-Ferrand. 1998:27p.
• 2. Ingrand S. Megalot : programme de calcul des indices de complexité d’allotement en élevage allaitant. Notice d’utilisation. Inra, Clermont-Ferrand Theix. 1995:8p.
• 3. Ingrand S, Dedieu B. An approach of batching management practices as a contribution to the study of livestock farming systems. In: Livestock farming systems: research, development socio-economics and the land manager. 3^rd International livestock farming systems symposium Aberdeen. Scotland, 1-2 September 1994:353-356.
• 4. Ingrand S, Dedieu B. Construction des schémas d’allotement dans les élevages allaitants. Présentation des conventions graphiques, points de repère pour l’enquête. Inra, Clermont-Ferrand Theix. 1994:10p.
• 5. Ingrand S, Dedieu B. Diversité des formules d’allotement en élevage bovin viande. Le cas d’exploitations du Limousin. Inra, Prod. Anim. 1996;9(3):189-199.
• 6. Ingrand S, Dedieu B. Connecting on farm studies and experimental results: the batching management in French suckler herds. In: Proceedings 4. European Symposium. European farming and rural systems research and extension into the next millennium. Environmental, Agricultural and Socio-Economic Issues. Volos (Grèce). 2000:45-54.
• 7. Ingrand S, Dedieu B. Représenter graphiquement la conduite d’élevage pour la comprendre et l’analyser : principes de construction des schémas d’allotement. Cah. Techn. Inra 2007;61:17-36.
• 8. Ingrand S, Dedieu B, Agabriel J. Critères de constitution des lots de vaches dans les troupeaux bovins allaitants limousins et charolais. Inra, Productions animales. 1999;12(1):61-71.
• 9. Ingrand S, Dedieu B, Chassaing C et coll. Étude des pratiques d’allotement dans les exploitations d’élevage. Proposition d’une méthode et illustrations en élevage bovin extensif limousin. Inra, Et. Rech. Sys. Agr. Dév. 1993;27:52-72.
• 10. Tabourin P. Étude des pratiques d’allotement en élevage bovin allaitant charolais. Mémoire d’ingénieur des travaux agricoles. Option : Productions animales – aquaculture – aviculture, Enita Bordeaux. 1996: 56p. + annexes.