Bien nourrir un animal épileptique - Le Point Vétérinaire n° 399 du 01/10/2019
Le Point Vétérinaire n° 399 du 01/10/2019

NEUROLOGIE PRATIQUE

Dossier

Auteur(s) : Charlotte Devaux*, Stéphanie Piazza**

Fonctions :
*136, avenue du Commandant Dubois
73200 Albertville
charlotte.devaux@ntymail.com
**CHV Languedocia
395, rue Maurice Béjart
34080 Montpellier

« Que ton alimentation soit ta seule médecine », aurait dit Hippocrate. Si l’alimentation n’est pas suffisante pour soigner l’épilepsie, son adaptation participe à améliorer la qualité de vie de l’animal.

L’épilepsie est l’une des affections nerveuses chroniques les plus courantes chez le chien. Sa prévalence est estimée entre 0,6 et 0,75 % [8]. Une proportion importante des chiens épileptiques souffre d’une forme idiopathique. Ils sont souvent traités efficacement avec des antiépileptiques classiques, mais environ 30 % des chiens restent réfractaires à la monothérapie [9]. Pour de nombreux propriétaires, la qualité de vie de leur animal est plus importante que la fréquence des crises (photo 1), et peut être impactée par les effets indésirables des antiépileptiques. Il est donc important de chercher à gérer au mieux ceux-ci, et la nutrition peut y contribuer. Pourtant, moins du tiers (27,6 %) des propriétaires de chiens épileptiques choisissent un régime alimentaire principal sur les conseils du vétérinaire [1]. Celui-ci a pourtant de nombreux arguments à avancer.

1 Effets indésirables des principaux antiépileptiques

Un animal épileptique peut recevoir plusieurs molécules antiépileptiques, qui ont toutes des effets indésirables susceptibles ou non d’être modulés par la nutrition (tableau 1).

– Le phénobarbital : il provoque une sédation et une ataxie, surtout au cours des deux premières semaines de traitement, ainsi qu’une polyuro-polydipsie, sans doute par une action inhibitrice de la sécrétion d’hormone antidiurétique. Ces effets sont doses-dépendants. Une polyphagie est également fréquente. Probablement induite par une suppression du centre de satiété dans l’hypothalamus, elle est souvent associée à une prise de poids. C’est à ce niveau que la nutrition peut avoir une action profitable (encadré 1, photo 2).

– Le bromure de potassium : il provoque une sédation, une ataxie, une polyuro-polydipsie et une polyphagie de façon dose-dépendante. Le sel de bromure hypertonique peut entraîner une irritation gastro-intestinale responsable de nausées, de vomissements et de diarrhées lorsqu’il est administré à jeun. L’excrétion du bromure de potassium passe par une filtration glomérulaire sans métabolisme hépatique, la réabsorption tubulaire se fait en compétition avec les ions chlorures. La demi-vie du bromure de potassium est donc inversement proportionnelle à l’apport d’ions chlorures : plus l’alimentation (ou la perfusion) en apporte, plus l’excrétion rénale du bromure est augmentée. Cela signifie que plus l’animal consomme un aliment riche en sel, plus la dose de bromure utilisée devra être importante. Pour la même raison, si le taux de sel varie dans la ration, la bromurémie en fera autant.

– L’association phénobarbital et bromure de potassium : elle augmenterait le risque de pancréatite, avec une prévalence qui passe de 0,3 % chez les chiens traités au phénobarbital seul à 10 % lors d’association avec le bromure de potassium. La relation de cause à effet n’est toutefois pas prouvée. L’implication de l’hypertriglycéridémie, fréquente chez les chiens qui reçoivent du phénobarbital (33 %), est suspectée, mais sans pouvoir déterminer si elle est due à l’hyperphagie ou au traitement lui-même.

– L’imépitoïne : une polyphagie, de l’agitation, une polydipsie, une salivation et de la diarrhée sont rapportées.

– Le lévétiracétam (utilisé hors AMM) : les effets secondaires les plus souvent rencontrés sont une sédation, une dysorexie et des vomissements.

2 Adaptations nutritionnelles bénéfiques dans le cadre du traitement de l’épilepsie

Supplémentation en acides gras eicosapentaénoïque (EPA) et docosahexaénoïque (DHA)

Les médiateurs de l’inflammation joueraient un rôle dans l’épilepsie. Dans les modèles murins et chez l’humain, les médiateurs pro-inflammatoires sont élevés et l’augmentation des médiateurs anti-inflammatoires aurait des effets anticonvulsivants. Lors de la consommation d’huiles de poisson, l’EPA et le DHA sont intégrés dans les phospholipides neuronaux ; ils diminuent la synthèse des médiateurs pro-inflammatoires tout en contribuant à former des prostaglandines anti-inflammatoires. L’augmentation de l’ingestion d’oméga 3 diminue les marqueurs plasmatiques de l’inflammation. Chez le rat, une supplémentation en huile de poisson pendant un minimum de 3 mois est nécessaire pour augmenter le seuil épileptogène [15]. Chez l’humain, les résultats sont disparates. Chez le chien, Matthews ne signale aucune réduction de la fréquence et de la gravité des crises chez 15 chiens présentant une épilepsie idiopathique, avec une supplémentation en EPA, DHA et vitamine E pendant 12 semaines. L’absence de résultats peut être due à une durée d’essai trop courte, ou à une oxydation des suppléments, certains chiens ayant présenté des troubles digestifs lors de leur administration [13].

L’alimentation hypoallergénique

Quelques publications décrivent des cas d’enfants atteints d’épilepsie cryptogénique focale associée à des troubles du comportement (hyperactivité, troubles du sommeil, difficultés d’écriture), dont les anomalies à l’électroencéphalogramme (et les troubles) ont régressé après un régime sans lait de vache. Des tests de provocation en double aveugle montrent une réapparition de ces signes après quelques jours. La reprise du régime d’éviction a permis une normalisation de l’électroencéphalogramme. Comparés à des enfants non épileptiques, l’incidence de l’allergie au lait de vache et de l’asthme est significativement plus élevée chez les sujets épileptiques. En 2004, sur 8 chiens atteints d’épilepsie résistante aux médicaments, et présentant des signes d’hypersensibilité gastrointestinale traités à l’aide d’un régime d’exclusion, une réduction de la fréquence des crises a été observée chez 7 d’entre eux [12].

Le régime cétogène

Le constat des effets antiépileptiques du jeûne a amené les médecins à chercher un régime permettant d’en reproduire les effets métaboliques. C’est le cas du régime cétogène, riche en graisses et pauvre en glucides, qui aboutit à la production de corps cétoniques ayant un effet anticonvulsivant encore incompris (photo 3). Il est considéré comme sain et efficace chez l’enfant atteint d’épilepsie réfractaire, avec une efficacité comparable à celle des antiépileptiques. Ce régime semble être plus efficace chez les enfants que chez les adultes, car le cerveau des premiers extrait et utilise plus efficacement les corps cétoniques du sang en raison de concentrations plus élevées d’enzymes métabolisant les cétones. Des essais cliniques démontrent qu’environ la moitié des enfants atteints de crises réfractaires qui reçoivent un régime cétogène voient leurs crises diminuer d’au moins 50 %. En outre, à peu près un tiers d’entre eux présenteraient une diminution de la fréquence des crises de 90 %. Cependant, ces résultats impressionnants ne proviennent pas d’études contrôlées et randomisées, et chez 5 à 7 % des enfants, le régime cétogène provoquerait des calculs rénaux.

Dans l’espèce canine, une seule étude décrit l’utilisation d’un régime cétogène lors d’épilepsie idiopathique réfractaire. Les chiens nourris avec une ration cétogène sur une période de 6 mois affichent des concentrations sériques de cétones significativement plus élevées que les témoins, mais sans différence significative quant à la fréquence des crises entre les groupes. Cela pourrait résulter d’un manque de puissance statistique découlant de la petite taille de l’échantillon, mais aussi d’une difficulté accrue à induire la cétose chez le chien, qui métabolise très bien et très rapidement les cétones. En effet, le niveau de cétose atteint dans l’étude de Patterson semble faible, comparé aux concentrations effectives chez les enfants recevant un régime cétogène [14]. L’absence d’effet pourrait aussi s’expliquer par un type d’épilepsie différent chez le chien de celui des enfants qui réagissent au régime. Il existe en effet plusieurs types d’épilepsie et de modèles. L’extrapolation d’une espèce à l’autre, a fortiori de l’humain au chien, est donc fort hasardeuse. Un autre élément est important à considérer : les chiens traités avec l’association de phénobarbital et de bromure de potassium présentent un risque accru de déclencher une pancréatite ; un régime très riche en graisses est donc à déconseiller.

Ajout d’acides gras à chaîne moyenne issus de l’huile de coco

Le régime enrichi en triglycérides à chaîne moyenne est capable d’augmenter les concentrations sériques de cétones (bêta-hydroxybutyrate) et constitue une voie métabolique alternative au régime cétogène classique. Chez l’humain, le but de l’utilisation des acides gras à chaîne moyenne était d’améliorer l’appétence du régime cétogène, en permettant d’apporter davantage de glucides tout en préservant la cétose. Bien qu’initialement considéré comme aussi efficace que le régime cétogène classique, le recours aux acides gras à chaîne moyenne a diminué, en raison d’effets indésirables gastro-intestinaux fréquents tels que des spasmes, de la diarrhée et des vomissements. Cela a conduit un fabricant d’aliments pour animaux domestiques à formuler un aliment enrichi en acides gras à chaîne moyenne purifiés, avec une tolérance digestive suffisante.

Croquettes spécialement formulées pour les animaux épileptiques (Neurocare)

Sur 21 chiens traités au phénobarbital et/ou au bromure de potassium ayant reçu ce régime, 71 % ont présenté une réduction de la fréquence des crises, dont 3 chiens complètement indemnes, 7 chiens avec une réduction de plus de 50 % et 5 chiens avec une réduction de moins de 50 %. En revanche, chez 6 chiens sur 21 (29 %), la fréquence des crises a augmentée. Un chien devenu léthargique avec le régime a été retiré de l’étude. Le potentiel effet anticonvulsivant semble apparaître rapidement (1 jour après). En revanche, aucune amélioration significative n’est notée par les propriétaires sur la qualité de vie de leur chien. Le régime ne semble pas non plus avoir d’effet sur la sédation ou l’ataxie [10].

3 Compléments alimentaires les plus souvent utilisés : niveau de preuve et risques

L’huile de coco (niveau de preuves moyen)

Un essai d’alimentation de chiens avec des croquettes enrichies à 5,5 % de triglycérides à chaîne moyenne (TCM), issus de l’huile de coco, a amélioré l’état clinique de 70 % d’entre eux. Mais 30 % ont vu la fréquence de leurs crises augmenter [8]. Chez l’humain, les effets indésirables gastro-intestinaux rapportés sont fréquents, avec des spasmes, des vomissements et des diarrhées (photo 4). Chez le chien, un cas de léthargie a aussi été noté en lien avec l’utilisation de croquettes enrichies en TCM. En extrapolant les doses employées dans l’étude, il est possible de proposer des quantités d’huile de coco quotidiennes (tableau 2). Pour prévenir les effets indésirables, il faut commencer par une petite dose, puis l’augmenter progressivement jusqu’à atteindre la quantité voulue. Il est impératif d’arrêter en cas d’apparition d’effets indésirables gastro-intestinaux, de léthargie ou d’augmentation de la réquence des crises.

Les acides gras oméga 3 à longue chaîne (niveau de preuve moyen, effets indésirables quasi nuls sauf supplément oxydé)

La molécule la plus efficace serait l’acide docosahexaénoïque (DHA), connu pour ses effets cérébraux bénéfiques. Les doses utilisées dans les études ayant constaté une efficacité sont de 400 mg de DHA/kg chez le rat (efficace après 3 mois de supplémentation) et de 40 mg de DHA/kg chez l’humain. La dose employée dans la seule étude menée chez le chien est de 375 mg de DHA/kg, ce qui est énorme (cinq fois plus que dans les croquettes à visée articulaire les plus riches), surtout sans efficacité clairement démontrée. Pour prévenir l’oxydation, l’utilisation des huiles en bouteille est à proscrire pour privilégier les régimes enrichis, les capsules ou les flacons air-less, dans lesquels les acides gras sont à l’abri de l’oxygène.

Le chardon-Marie (niveau de preuve faible dans l’espèce cible, effets indésirables tels que hausse de la concentration plasmatique de certains antiépileptiques [4])

Les produits à base de chardon-Marie sont fréquemment utilisés chez les chiens épileptiques pour faciliter le travail de détoxification des xénobiotiques réalisé par le foie. Le chardon-Marie (Silybum marianum) est hépatoprotecteur, antioxydant et possède des propriétés cytoprotectrices et anti-inflammatoires. Des preuves substantielles in vitro et in vivo suggèrent que la silymarine peut protéger le oie contre les lésions induites par les toxines, les médicaments et les ischémies [1]. Ces propriétés bénéfiques doivent être réévaluées chez le chien.

Valériane (niveau de preuve faible dans l’espèce cible, toxicité faible en soi, mais augmentation de l’activité des benzodiazépines)

Les extraits d’acide valérénique et de valériane ont des propriétés anticonvulsivantes chez le poisson zèbre adulte [16]. Chez la souris, l’évaluation d’un extrait de racine de valériane a révélé des propriétés sédatives prononcées, mais de faibles propriétés anticonvulsives [11]. Les extraits de valériane renforcent nettement l’effet anticonvulsivant du clonazépam et de la phénytoïne. Les principes actifs de la valériane (et de la passiflore) pourraient augmenter l’activité inhibitrice des benzodiazépines se liant aux récepteurs Gaba (acide γ-aminobutyrique) et entraîner des effets indésirables graves [2].

L’huile de cannabis (niveau de preuve moyen, effet indésirable : ataxie)

Récemment, l’usage médical du cannabidiol (CBD) s’est largement répandu chez l’humain, en particulier pour traiter les troubles nerveux. Bien que les preuves scientifiques de son efficacité et de sa sécurité d’emploi soient actuellement limitées, l’huile de CBD réduirait efficacement la réquence et la durée des crises chez l’enfant et le jeune adulte, ainsi que chez des souris atteintes du syndrome de Dravet (épilepsie myoclonique sévère du nourrisson) [7]. Cependant, les informations sur les paramètres toxicologiques provenant d’une administration à long terme font défaut. Les mécanismes physiologiques et moléculaires sous-jacents, à l’origine d’effets thérapeutiques bénéfiques, n’ont pas encore été explorés. En médecine humaine, il est démontré depuis peu que l’huile de CBD augmente la concentration sérique des antiépileptiques couramment utilisés [5]. Une étude récente de l’université du Colorado, sur les effets du CBD chez les chiens atteints d’épilepsie recevant un traitement antiépileptique, montre qu’une dose de 2,5 mg/kg per os, 2 fois par jour, permet de réduire la fréquence des crises, mais sans produire d’effet sur le nombre de chiens dont la fréquence des crises a été réduite de plus de 50 % : 2 dans chaque groupe (placebo et traité). Le seul effet indésirable rapporté est l’ataxie. Une augmentation du taux sérique des phosphatases alcalines a aussi été notée et attribuée à une induction enzymatique. Dans cette étude, l’administration de CBD n’a pas provoqué de changement dans la concentration sérique des antiépileptiques.

Cependant, les doses utilisées sont faibles et pourraient passer de 4,5 à 18 mg/ kg dans des études à venir.

La vitamine B1 (niveau de preuve faible, toxicité nulle)

La vitamine B1, ou thiamine, est connue pour être un acteur essentiel dans plusieurs voies biochimiques du cerveau. Une carence peut entraîner une encéphalopathie progressive, des neuropathies et des crises d’épilepsie. Un lien entre la production de neurotransmetteurs et la disponibilité de la thiamine a été discuté. Par rapport aux chats, les chiens sont moins sensibles à la carence en thiamine. Les crises d’épilepsie prolongées étant liées à des lésions cérébrales oxydatives, la supplémentation en thiamine, qui prévient et lutte contre le stress oxydatif, présenterait un intérêt.

S-adénosyl-L-méthionine (niveau de preuve nul, effets indésirables rares sous forme de légers troubles digestifs passagers)

La SAMe est une molécule qui se forme naturellement dans l’organisme à la suite d’une réaction entre la méthionine (un acide aminé) et l’adénosine triphosphate (ATP). Elle joue un rôle essentiel dans le cycle du glutathion. Précurseur de nombreux acides aminés essentiels, elle contribue à la synthèse, à l’activation et au métabolisme des hormones, des neurotransmetteurs, des protéines, etc. Elle est donc essentielle au bon fonctionnement de l’organisme, notamment celui du système nerveux central. Elle est utilisée dans le traitement de l’arthrose et de la dépression, mais aucune donnée n’est disponible concernant une quelconque efficacité sur l’épilepsie.

Toutes les autres supplémentations en huiles (lin, olive, sésame), vitamines et minéraux, chondroïtine, glucosamine, taurine, tryptophane ne reposent sur aucune base scientifique à notre connaissance.

4 Adaptation des différents régimes à l’épilepsie de l’animal

Croquettes

Pour limiter la polyuro-polydipsie induite par les traitements antiépileptiques et augmenter la demi-vie du bromure de potassium, un régime à teneur modérée en sodium est préconisé (inférieur à 0,4 % de la matière sèche) [6]. Il convient également de ne pas varier la teneur en sel de l’alimentation pour garder une bromurémie stable. Si l’animal présente une polyphagie, une hypertryglycéridémie ou une augmentation du risque de pancréatite due à l’association du phénobarbital avec le bromure de potassium, un régime hypocalorique sera prescrit (moins de 310 kcal/100 g). En cas d’épilepsie réfractaire au traitement, les croquettes enrichies en triglycérides à chaîne moyenne peuvent être proposées, non sans prévenir les propriétaires des éventuels effets indésirables imposant un arrêt du régime (léthargie ou autre).

Ration ménagère

La ration ménagère doit être équilibrée en vitamines et en minéraux grâce à un complément minéral et vitaminé, ainsi qu’en acides gras essentiels via l’utilisation d’huile de colza. La ration est de préférence préparée sans sel, et aucun “à côté” salé, de type fromage ou charcuterie, n’est donné. Chez les animaux présentant une sensibilité intestinale, les produits laitiers doivent être évités. Il est assez facile de proposer un régime de type cétogène sans éculents. Pour gérer la polyphagie, la ration est enrichie en légumes qui apportent des fibres. Une complémentation en huiles de poisson (ou en huile de coco) peut être effectuée à la demande des propriétaires (encadré 2).

Biologically Appropriated Raw Food (BARF) ou nourriture crue biologiquement appropriée

Dans le cadre du régime BARF, il n’y a ni féculent, ni souvent de complément minéral et vitaminé (photo 5). Dans ce cas, l’utilisation de levure de bière est recommandée pour apporter la vitamine B1. Les autres recommandations sont identiques à celles de la ration ménagère. Ces considérations ne doivent pas occulter l’importance de vérifier l’équilibre en micronutriments de la ration et de prendre en compte le risque bactérien majoré dans le cas d’une alimentation crue industrielle (viande crue mixée surgelée).

Régimes “spéciaux” (végétarien, sans gluten, etc.)

Les régimes végétariens sont généralement assez peu caloriques, ce qui peut convenir dans la gestion de l’hyperphagie. En revanche, ils sont souvent pauvres en protéines, ce qui peut diminuer la sensation de satiété. Ils sont aussi assez éloignés du régime cétogène. Il n’y a pas d’intérêt démontré au régime sans gluten chez le chien dans cette indication. Cependant, de nombreux régimes industriels à base de riz sont naturellement sans gluten. Comme tout régime industriel, il convient de vérifier la teneur en sodium, qui doit être inférieure à 0,4 % de la matière sèche.

Passage d’un régime à l’autre

La transition entre deux régimes doit toujours se faire progressivement, sur plusieurs jours, en mélangeant petit à petit le nouveau régime à l’ancien.

Conclusion

Encore sous-utilisée dans cette indication, l’alimentation représente une composante importante dans l’accompagnement du traitement antiépileptique : pour l’optimiser (taux de sodium lors d’emploi de bromure de potassium) ou pour lutter contre ses effets indésirables (hyperphagie). L’utilisation de compléments alimentaires dans cet objectif (comme dans tout autre) nécessite des précautions, car ils présentent des effets indésirables à connaître. Il ne s’agit pas ici de traitement, la nutrition ne pouvant être considérée comme une solution alternative aux antiépileptiques.

Références

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Conflit d’intérêts

Aucun.

ENCADRÉ 1

Mécanismes de lutte contre l’hyperphagie induite par les traitements antiépileptiques

Dans le cadre de la lutte contre la polyphagie induite par les traitements contre l’épilepsie, une alimentation hypocalorique (moins de 310 kcal/100 g) est indiquée pour fournir un volume suffisant. Il est aussi possible d’ajouter un complément de fibres sous la forme de légumes à volonté, comme les courgettes chez les chats ou les haricots verts chez les chiens. Une alimentation la plus riche possible en protéines est choisie pour optimiser la sécrétion de cholécystokinine. Chez les petits chiens, des croquettes pour chat peuvent être prescrites. L’augmentation du volume de la ration passe aussi par l’humidification des croquettes, en remplissant la gamelle d’eau avant sa distribution. Le chat n’aimant généralement pas manger des croquettes mouillées, les jeux et distributeurs d’aliments ou les gamelles “anti-glouton”, qui augmentent le temps de prise alimentaire, sont conseillés. Dans tous les cas, il convient de fractionner la ration en au moins deux repas pour le chien, et le plus possible pour le chat. Chez le chien, il est également possible de jeter les croquettes dans le jardin ou dans le garage pour augmenter le temps de recherche. Si les propriétaires sont motivés, une ration ménagère peut être calculée : elle a l’avantage d’être volumineuse, riche en protéines et de pouvoir contenir beaucoup de légumes. En période de post-crise, lorsque l’appétit de l’animal est intense, il est intéressant de lui proposer une toute petite ration avec beaucoup de légumes et un peu d’huile de coco qui fournira des corps cétoniques utilisés par les neurones comme source d’énergie alternative au glucose.

ENCADRÉ 2

Zoom sur l’huile de coco

L’huile de coco est composée à 85 % de graisses saturées dont 60 % sont des triglycérides à chaîne moyenne (TCM). Cependant, les TCM de l’huile de coco sont constitués de 14 % d’acides gras de 6, 8 ou 10 atomes de carbone et d’environ 45 % d’acide laurique de 12 atomes de carbone. Si l’acide laurique est classé comme un TCM en raison de sa taille, selon la Harvard School of Public Health, il se comporterait comme un triglycéride à chaîne longue en augmentant le taux de cholestérol et le risque de maladies cardiovasculaires [3]. Ainsi, la composition de l’huile de coco n’est pas la même que les TCM purifiés utilisés dans les études ou dans les croquettes formulées contre l’épilepsie. De plus, l’huile de coco ne contient aucun acide gras insaturé essentiel oméga 3 ou oméga 6. Par conséquent, elle ne doit pas être utilisée en remplacement des huiles végétales traditionnelles dans les régimes ménagers.