Circulation extracorporelle et pose de pacemaker - Le Point Vétérinaire n° 230 du 01/11/2002
Le Point Vétérinaire n° 230 du 01/11/2002

CHIRURGIE CARDIAQUE CHEZ LE CHIEN

Se former

COURS

Auteur(s) : Éric Monnet

Fonctions : PhD, diplomate ACVS
Colorado State University,
Dept of Clinical Sciences,
Fort Collins, Co 80523, États-Unis

La transplantation cardiaque constitue chez l’homme le traitement chirurgical définitif de l’insuffisance cardiaque. En cardiologie vétérinaire, faute de donneurs, d’autres techniques prometteuses sont adaptées.

La chirurgie cardiaque des animaux de compagnie a déjà permis le traitement définitif de la persistance du canal artériel, le traitement palliatif des sténoses aortiques par dilatation transventriculaire, celui des sténoses pulmonaires avec interruption du flux sanguin dans le cœur droit et le traitement palliatif de la tétralogie de Fallot. Les épanchements péricardiques sont traités par une péricardectomie totale ou partielle, avec une résection de l’oreillette droite si un hémangiosarcome est présent. Le traitement des bradycardies est possible grâce à l’implantation d’un pacemaker chez le chien et chez le chat.

L’apparition de la circulation extracorporelle permet d’effectuer des interventions chirurgicales à cœur ouvert dans le but du traitement définitif des sténoses aortiques et pulmonaires, des communications interauriculaires, interventriculaires et de la tétralogie de Fallot. Le traitement de certaines affections valvulaires acquises, comme l’insuffisance mitrale ou la dysplasie tricuspidienne chez le chien, est dorénavant également possible avec la circulation extracorporelle. La chirurgie cardiaque humaine, après avoir développé la transplantation cardiaque pour le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive, se tourne vers d’autres alternatives comme la cardiomyoplastie, la ventriculectomie et la resynchronisation cardiaque avec pacemaker. Ces possibilités de traitement chirurgical de l’insuffisance cardiaque congestive sont déjà disponibles ou le seront très prochainement pour le traitement des cardiomyopathies dilatées des chiens de races de grandes tailles.

Chirurgie à cœur ouvert

La chirurgie à cœur ouvert nécessite la mise en place d’une circulation extracorporelle pour interrompre la circulation sanguine dans le cœur, tout en maintenant l’oxygénation des organes essentiels [38]. La circulation extracorporelle nécessite le prélèvement de sang veineux au niveau des veines caves craniale et caudale et le retour du sang artériel après oxygénation dans l’artère fémorale. Après l’instauration de la circulation extracorporelle, les activités mécanique et électrique du cœur peuvent être arrêtées momentanément avec une solution cardioplégique. Une fois l’acte chirurgical terminé, le cœur est refermé et il convient de rétablir son activité électrique et mécanique, puis de supprimer progressivement la circulation extracorporelle (sevrage).

La chirurgie à cœur ouvert est accessible aux animaux de compagnie dans les centres universitaires américains. Seules ces structures peuvent actuellement offrir ce genre de prestations en raison de la lourdeur de la technique, de la difficulté de l’anesthésie et de la complexité du suivi postopératoire en soins intensifs. Le coût de telles interventions est également prohibitif.

1. Technique chirurgicale

Voies d’abord

La thoracotomie intercostale droite permet d’effectuer le traitement chirurgical des sténoses aortiques, des communications interauriculaire et interventriculaire, ainsi que la réparation des valves mitrales et tricuspides.

Après la rétraction de l’auricule droit, l’aorte ascendante est exposée, ce qui permet le traitement des sténoses aortiques. Une atriotomie droite permet d’exposer la valve tricuspide, le septum interauriculaire et le septum interventriculaire. Une atriotomie gauche peut être effectuée après une thoracotomie intercostale droite. Le septum interauriculaire et l’oreillette gauche sont exposés en partie dorsale du cœur, médialement par rapport à l’oreillette droite. Lors d’insuffisance mitrale chronique, l’oreillette gauche est sévèrement dilatée ; elle est donc très proéminente du côté droit. Lors de la dissection, il convient d’éviter les veines pulmonaires.

Le traitement chirurgical des sténoses pulmonaires comme celui des tétralogies de Fallot nécessitent une thoracotomie intercostale gauche.

Implantation des canules veineuses et artérielles

La circulation extracorporelle nécessite le prélèvement du sang veineux au niveau du cœur droit et le retour du sang oxygéné dans l’artère fémorale. Cette dernière est préférée à l’aorte, car celle-ci est très fragile chez le chien. La canule fémorale est placée la première afin qu’une transfusion puisse éventuellement être réalisée en urgence.

• La canule fémorale est placée après l’exposition chirurgicale de l’artère au niveau du pli de l’aine. L’artère fémorale est complètement isolée des tissus environnants.

• Deux sutures encerclantes sont placées autour de l’artère. Ces deux sutures sont placées dans des tubes de 8 French (Fr) et maintenues par des pinces hémostatiques (voir la FIGURE A “Implantation de la canule fémorale” voir la FIGURE B “Implantation de la canule fémorale”). Ces sutures sont utilisées pour interrompre le flux sanguin dans l’artère fémorale pendant l’insertion de la canule artérielle. La suture proximale est serrée en premier.

• Après l’interruption temporaire du flux sanguin, l’artère est incisée partiellement avec une lame de bistouri n° 11, puis dilatée avec une pince hémostatique introduite dans sa lumière. La canule fémorale (12 Fr pour un chien de 25 kg) est alors introduite le plus loin possible cranialement dans l’artère fémorale, tout en contrôlant la tension sur la suture proximale pour permettre le passage de la canule sans perte sanguine conséquente. La suture proximale est serrée autour de la canule fémorale. Les deux sutures et la canule fémorale sont encerclées avec une suture de soie déc. 2. La canule fémorale est alors connectée à la portion artérielle de la circulation extracorporelle. Aucune bulle d’air ne doit être présente dans la canule après les connections.

• Les veines caves craniale et caudale sont ensuite encerclées avec un ruban de coton large. Ces rubans sont placés autour des veines caves au niveau des canules veineuses. Ils sont serrés autour des canules au moment de l’instauration de la circulation extracorporelle afin que la totalité du retour veineux soit collectée par ces canules. Un ruban est également placé autour de la veine azygos pour interrompre complètement le retour veineux par cette veine pendant l’intervention chirurgicale à cœur ouvert.

Le sang veineux est collecté au niveau des veines caves craniale et caudale. Il est parfois collecté directement dans l’oreillette droite à l’aide d’une seule canule. Une suture en bourse avec un fil 3-0 en polypropylène est placée à la jonction de la veine cave craniale et de l’oreillette droite. Une suture similaire est posée à la jonction de la veine cave caudale et de l’oreillette droite. Ces sutures sont passées dans des tubes de 8 Fr et maintenues avec une pince hémostatique (voir la FIGURE “Introduction des canules veineuses dans les veines caves craniale et caudale”).

Pour l’implantation de chaque canule, une ponction avec une lame de bistouri n° 11 est effectuée au centre de la suture en bourse. Une pince hémostatique est ensuite introduite dans la ponction pour dilater l’ouverture, puis la canule est introduite au centre de la suture en bourse. La suture est serrée pour éviter les fuites sanguines autour de la canule. Cette dernière et les chefs de la suture en bourse passés dans le tube de 8 Fr sont attachés ensemble avec une suture de soie déc. 2, ce qui permet de maintenir les canules veineuses en place. Elles sont alors connectées à la portion veineuse de la circulation extracorporelle.

• Une canule est implantée dans une veine pulmonaire et avancée dans le ventricule gauche pour drainer le sang qui s’y accumule pendant la chirurgie et pendant la phase de sevrage de la circulation extracorporelle.

La solution cardioplégique

La solution cardioplégique est une solution à 4 °C à forte concentration en potassium (voir l’ENCADRÉ “Solution cardioplégique utilisée à l’université du Colorado (États-Unis) pour les circulations extracorporelles”) [38]. Elle induit l’arrêt des activités électrique et mécanique du cœur et réduit le métabolisme du myocarde.

La solution est injectée, soit dans l’aorte ascendante (normograde) après clampage de l’aorte, soit dans le sinus coronaire (rétrograde). La solution (10 ml/kg) est injectée toutes les vingt minutes jusqu’à la fin de la chirurgie à cœur ouvert.

2. Sténose aortique

Le traitement chirurgical de la sténose aortique consiste en la résection de l’anneau fibreux sous-valvulaire après une aortotomie. Il est recommandé lorsque le gradient de pression est supérieur à 70 mmHg ou si l’hypertrophie ventriculaire est marquée [41] (aucune étude n’a actuellement démontré la limite supérieure du gradient de pression tolérable par le chien). L’échocardiographie Doppler permet de mesurer le gradient de pression et d’évaluer l’étendue de l’hypertrophie ventriculaire. La chirurgie à cœur ouvert a montré qu’elle pouvait induire une réduction à long terme du gradient de pression [32], sans cependant nécessairement améliorer la survie des chiens [40].

Si l’hypertrophie septale est marquée, une résection du septum interventriculaire est recommandée. Or, le faisceau de His y chemine à partir des valves aortiques. La résection partielle du septum peut donc s’accompagner d’un bloc de branche ou d’un bloc auriculo-ventriculaire du 3e degré, ce qui nécessite l’implantation d’un pacemaker.

3. Sténose pulmonaire

Le traitement chirurgical de la sténose pulmonaire est indiqué lors de dysplasie valvulaire associée à une hypertrophie subvalvulaire droite marquée. Une hypertrophie ventriculaire droite sévère entraîne une sténose dynamique pendant la systole.

L’échocardiographie avec Doppler permet de mesurer le gradient de pression à travers la valve pulmonaire et d’évaluer le degré de sévérité de l’hypertrophie ventriculaire. Si celui-ci est élevé, la sténose pulmonaire est traitée chirurgicalement.

La valve pulmonaire dysplasique est réséquée après artériotomie pulmonaire. Le canal d’éjection du ventricule droit est ensuite ouvert dans la continuité de l’artériotomie pulmonaire.

Un greffon de Téflon est suturé sur les bords de l’incision du ventricule droit et de l’artériotomie pulmonaire.

Cette chirurgie peut s’effectuer grâce à l’arrêt du flux sanguin dans le cœur droit [38, 39], qui n’est possible que pendant deux minutes, ce qui limite la qualité du travail chirurgical. La chirurgie à cœur ouvert permet d’obtenir une meilleure réduction du gradient de pression, car les valves pulmonaires sont réséquées complètement et la sténose dynamique est mieux contrôlée par la suture d’un greffon de Téflon sur un canal d’éjection du ventricule droit complètement ouvert.

4. Communications interauriculaire et interventriculaire

Les communications interauriculaire et interventriculaire ne nécessitent un traitement chirurgical que si leurs conséquences hémodynamiques sont significatives. Les communications restrictives n’ont ainsi pas de conséquence hémo-dynamique et ne nécessitent donc pas de traitement chirurgical. L’échocardiographie Doppler est nécessaire pour cette étude. Si la vélocité du sang à travers la communication est supérieure à 4,5 cm/s, la communication est restrictive [31].

Les communications interauriculaire et interventriculaire sont traitées chirurgicalement par la suture d’un lambeau de péricarde sur les bords de l’orifice. Une bonne connaissance de l’anatomie des différentes formes de communications interventriculaires est nécessaire pour obtenir un résultat chirurgical satisfaisant [1, 15, 43, 51].

5. Valvuloplasties mitrales et tricuspidiennes

La dégénérescence chronique de la valve mitrale est la cause la plus fréquente de régurgitation mitrale chez le chien [50]. La valve mitrale présente des lésions myxomateuses qui augmentent avec l’âge :

- les lésions de type I sont caractérisées par de petites plaques opaques sur la surface des valvules ;

- les lésions de type II comportent un nombre plus élevé de plaques ;

- les plaques des lésions de type III sont larges et coalescentes ; les cordes tendineuses sont élargies ;

- les lésions de type IV sont caractérisées par des valvules déformées, enroulées sur elles-mêmes, et par des cordes tendineuses allongées, voire rompues [50]. Ces lésions sont également présentes sur les valves tricuspides, aortiques et pulmonaires.

Les insuffisances mitrales ou tricuspidiennes sont dues aussi à des lésions congénitales dysplasiques, qui provoquent parfois une combinaison de sténose et d’insuffisance valvulaire.

Les lésions constatées lors de dysplasies sont un raccourcissement, une fusion, un enroulement et un épaississement des valvules. La fusion, l’épaississement et le raccourcissement des cordes tendineuses et des muscles papillaires sont des lésions répertoriées lors de dysplasie valvulaire [50].

Le traitement chirurgical consiste essentiellement en un remplacement des cordes tendineuses courtes, rompues ou allongées, par des sutures en Téflon, en une division des cordes ou des muscles papillaires fusionnés et en une annuloplastie. Celle-ci a pour but de réduire la surface de l’anneau valvulaire pour que la valvule septale devienne compétente [4, 26, 38]. Un anneau recouvert de Dacron est suturé sur l’anneau valvulaire avec des sutures non résorbables (PHOTO 1).

Traitement des malformations cardiaques par les techniques endovasculaires

La fermeture du canal artériel peut s’effectuer par une technique endovasculaire [17, 45]. Le déploiement d’un obturateur dans le canal artériel se fait sous contrôle fluoroscopique.

Un abord veineux et artériel est nécessaire pour mettre en place l’obturateur. Pour qu’il puisse se fixer, le canal artériel doit être long et en forme de cône évasé du côté de l’aorte. Si le canal n’est pas évasé, l’obturateur risque de s’emboliser dans une branche de l’artère pulmonaire. Une angiographie sélective de la base de l’aorte est donc nécessaire afin d’évaluer la forme et la taille du canal.

Les sténoses pulmonaires et aortiques font également l’objet d’un traitement par dilatation à l’aide de ballonnets [13, 16]. Les indications de ce type de traitement sont les mêmes que celles de la chirurgie. Cependant, si la sténose est associée à une hypertrophie marquée du ventricule droit ou gauche, il est préférable de recourir à une intervention chirurgicale. Le traitement par ballonnet s’effectue grâce à un abord endovasculaire sans thoracotomie. Ces techniques sont couramment utilisées en cardiologie humaine. Elles nécessitent néanmoins une fluoroscopie et une technique de cathétérisation cardiaque qui ne sont pas toujours disponibles en cardiologie vétérinaire.

Traitement des affections péricardiques acquises par thoracoscopie

La thoracoscopie fait son apparition en chirurgie vétérinaire depuis quelques années [14, 20, 21, 22, 48]. Cette technique consiste en l’utilisation d’un endoscope rigide afin d’explorer la cavité thoracique et de réaliser des interventions chirurgicales sans ouvrir la cavité thoracique.

L’intervention la plus couramment effectuée par cette méthode est la péricardectomie partielle chez le chien dans le traitement des épanchements péricardiques. La péricardectomie s’effectue, soit par un abord transdiaphragmatique, soit par un abord intercostal. Les deux voies d’abord nécessitent l’implantation de trois canules :

- une pour l’endoscope ;

- deux pour les instruments.

Dans l’abord transdiaphragmatique, le médiastin doit être disséqué le premier afin de permettre une exploration complète de la cavité thoracique. Le péricarde est ensuite incisé à l’aide de ciseaux connectés à un bistouri électrique. Le nerf phrénique doit être identifié et préservé pendant l’intervention. L’hémostase péricardique est nécessaire afin d’éviter les saignements postopératoires. L’oreillette droite et la base de l’aorte doivent ensuite être inspectées afin de rechercher un hémangiosarcome ou une tumeur de la base du cœur. La thoracoscopie permet une récupération beaucoup plus rapide de l’animal après l’intervention.

Traitement chirurgical de l’insuffisance cardiaque

La transplantation cardiaque est le traitement chirurgical définitif de l’insuffisance cardiaque chez l’homme. Le nombre de cœurs disponibles pour une transplantation est insuffisant : seuls 2 % des patients sur les listes d’attente survivent suffisamment longtemps pour recevoir un cœur compatible. Des techniques chirurgicales ont été développées en chirurgie humaine pour remplacer ou pour permettre d’attendre la transplantation.

1. La cardiomyoplastie

La cardiomyoplastie dynamique

La cardiomyoplastie dynamique a été utilisée chez le premier patient en 1985 [7] et avec succès depuis chez plus de 700 personnes. La transplantation cardiaque n’est pas possible actuellement en médecine vétérinaire en raison de l’absence de donneurs et de la complexité des traitements antirejet. Six chiens atteints de cardiomyopathie dilatée ont été traités à l’université du Colorado par une cardiomyoplastie dynamique [30, 42]. Un chien en insuffisance cardiaque de classe III a survécu dix-huit mois après l’intervention ; un autre, huit mois. La cardiomyoplastie dynamique est donc possible chez le chien [30, 42], mais les animaux à un stade trop avancé sont de mauvais candidats à cette chirurgie.

La cardiomyoplastie dynamique consiste à envelopper le muscle long dorsal autour du cœur et à le stimuler électriquement (voir la FIGURE “Cardiomyoplastie dynamique ou adynamique avec le muscle long dorsal placé autour des ventricules”). La contraction musculaire est synchronisée avec la systole cardiaque par un cardiomyostimulateur. La cardiomyoplastie dynamique augmente la contractilité cardiaque et réduit la postcharge, en modifiant la géométrie du cœur [7, 23, 24, 34, 35].

Le cardiomyostimulateur est constitué par l’association d’un pacemaker et d’un stimulateur musculaire, connectés par un synchronisateur. Le pacemaker permet la détection de la systole cardiaque. Le synchronisateur déclenche ensuite le stimulateur musculaire, qui envoie une salve d’ondes électriques pour induire une contraction musculaire soutenue. Le muscle n’est stimulé que toutes les trois contractions cardiaques par le cardiomyostimulateur. Il doit d’abord être entraîné pour pouvoir travailler pendant vingt-quatre heures. Malgré cet entraînement, ce muscle se détériore avec le temps. La cardiomyoplastie dynamique n’est pas vraiment applicable en cardiologie vétérinaire en raison du prix prohibitif du cardiomyostimulateur et de la difficulté technique de la synchronisation du muscle long dorsal.

Il a été démontré que la cardiomyoplastie dynamique agit essentiellement sur la fonction cardiaque par modification de la géométrie du cœur [25, 28, 34, 35]. Cette observation a conduit à la mise au point de la cardiomyoplastie adynamique.

La cardiomyoplastie adynamique

La cardiomyoplastie adynamique (avec un muscle passif non stimulé ou une prothèse synthétique) est une alternative possible chez le chien [5, 36, a]. La cardiomyoplastie adynamique soutient le cœur et évite une dilatation marquée des ventricules gauche et droit.

La prévention de la dilatation ventriculaire permet de réduire la postcharge, ce qui entraîne une amélioration de la fonction cardiaque. Actuellement, plusieurs prothèses cardiaques sont disponibles pour prévenir la dilatation du cœur : Acorn, Myosplint, Cardioclasp [29, 47, 49]. Un treillis de polypropylène a été utilisé avec succès dans différents modèles d’insuffisance cardiaque [47].

Cette chirurgie constitue une très bonne alternative chez les chiens de races de grandes tailles qui présentent une cardiomyopathie dilatée en stade II. Il reste cependant à démontrer que cette technique n’interfère pas à long terme avec la diastole, en créant une affection constrictive ou restrictive.

La cardiomyoplastie cellulaire

La cardiomyoplastie cellulaire utilise des cellules musculaires satellites autologues, prélevées au niveau des muscles striés, pour soutenir le cœur et augmenter la contractilité. Ces cellules satellites sont responsables de la régénération des muscles striés après un traumatisme. Elles sont séparées des autres cellules musculaires par digestion mono-enzymatique. Après leur mise en culture, elles se multiplient [9, 10], puis sont implantées dans le myocarde par injection (voir la FIGURE “Cardiomyoplastie cellulaire avec injection de cellules satellites dans le myocarde”). Ces cellules doivent en théorie coloniser le myocarde et restaurer une masse musculaire saine.

Cette technique a été utilisée avec succès dans différents modèles d’insuffisance cardiaque. Il n’a pas été démontré que les cellules transplantées dans le myocarde survivent et contribuent à l’amélioration de la fonction cardiaque.

Des cellules souches pluripotentes sont actuellement placées en culture dans des conditions particulières et acquièrent une activité électrique automatique in vitro : elles peuvent représenter la nouvelle orientation de la cardiomyoplastie cellulaire.

2. L’aortomyoplastie

L’aortomyoplastie consiste à placer un muscle strié autour de l’aorte descendante ou ascendante, et à le stimuler pendant la diastole (voir la FIGURE “Aortomyoplastie avec le muscle long dorsal enroulé autour de l’aorte descendante”) [8, 11, 52].

Cette technique augmente le flux sanguin dans les artères coronaires pendant la diastole, ce qui permet une meilleure perfusion du myocarde [11]. Elle utilise un muscle strié qui, comme pour la cardiomyoplastie dynamique, nécessite une stimulation électrique toutes les deux ou trois contractions cardiaques. Comme pour la cardiomyoplastie, le muscle a donc tendance à se détériorer avec le temps.

3. La ventriculectomie

La ventriculectomie (Batista procedure) du cœur gauche est une nouvelle chirurgie cardiaque utilisée en Amérique du Sud où la transplantation cardiaque n’est pas possible en raison du paludisme et de la maladie de Chagas [3, 18, 33]. Cette intervention chirurgicale consiste à exciser une partie de la paroi du ventricule gauche pour modifier la géométrie du ventricule, ce qui permet d’abaisser la postcharge en réduisant le volume du cœur. Une annuloplastie de la valve mitrale est également accomplie pendant cette chirurgie, ce qui contribue à l’amélioration de la fonction cardiaque. Cette technique nécessite une circulation extracorporelle pour l’annuloplastie.

Cette intervention chirurgicale semble être associée à une forte mortalité postopératoire, de l’ordre de 30 à 40 %. Actuellement, elle est associée à une cardiomyoplastie adynamique afin de prévenir la dilatation ventriculaire. Il est possible que l’amélioration de la fonction cardiaque soit due essentiellement à l’annuloplastie et non pas à la ventriculectomie : si la régurgitation mitrale peut être réduite, la fonction cardiaque s’améliore en raison de la réduction du flux régurgitant. La ventriculectomie sans annuloplastie et sans circulation extracorporelle a été effectuée chez le chien sain avec succès [12].

4. La resynchronisation cardiaque

La resynchronisation cardiaque avec des pacemakers est une autre modalité thérapeutique très prometteuse en cardiologie humaine [2, 44]. Lors d’une cardiomyopathie dilatée, la dilatation cardiaque s’accompagne d’un délai de conduction électrique entre les ventricules gauche et droit, qui entraîne une désynchronisation des oreillettes avec les ventricules et une réduction de la fonction cardiaque. La cardiomyopathie dilatée chez l’homme est très souvent associée à un bloc de branche gauche, ce qui contribue à la désynchronisation des ventricules. La resynchronisation des oreillettes avec les ventricules permet d’augmenter le débit cardiaque et d’améliorer la fonction cardiaque de façon appréciable [44]. Pour être applicable, cette technique nécessite toutefois une prolongation du complexe QRS de plus de 50 % par rapport à la normale. Le positionnement des électrodes au niveau des ventricules gauche et droit n’est pas encore clairement défini chez l’homme. L’amélioration de la qualité de la vie et de la survie n’a pas non plus été démontrée [27, 46].

Conclusion

La chirurgie cardiaque est en continuelle évolution chez l’homme et chez l’animal. L’utilisation de la circulation extracorporelle permet la réalisation d’interventions à cœur ouvert. Celles-ci restent néanmoins réservées à certains centres chirurgicaux vétérinaires et leur intérêt n’a pas encore été démontré chez les animaux de compagnie. La thoracoscopie fait également son apparition en chirurgie cardiaque humaine et vétérinaire. Le pontage coronarien sans circulation extracorporelle et la réparation des valves mitrales deviennent possibles par thoracoscopie grâce à la robotique. La thoracoscopie n’est actuellement utilisée que pour les explorations de la cavité thoracique, les péricardectomies, les biopsies pleurales et pulmonaires et les lobectomies pulmonaires. La chirurgie cardiaque s’oriente de plus en plus vers le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive, car celle-ci reste la première cause de mortalité dans le monde malgré les progrès de la médecine cardiaque. Les chiens de race de grande taille qui présentent une cardiomyopathie dilatée pourront très prochainement bénéficier d’une cardiomyopathie adynamique ou d’un traitement par pacemaker.

Solution cardioplégique utilisée à l’université du Colorado (États-Unis) pour les circulations extracorporelles

400 ml d’une solution cristalloïde isotonique

1 unité de sang

NaHCO3 : 50 mEq

KCl : 40 mEq (20 mEq KCl pour les 2e et 3e perfusions)

Mannitol : 3 g

Lidocaïne : 100 mg

ATTENTION

La résection de l’anneau fibreux sous-valvulaire est recommandée lorsque le gradient de pression est supérieur à 70 mmHg ou si l’hypertrophie ventriculaire est marquée.

Si l’hypertrophie septale est marquée, une résection du septum interventriculaire est recommandée.

Le traitement chirurgical de la sténose pulmonaire est indiqué lors de dysplasie valvulaire associée à une hypertrophie subvalvulaire droite marquée.

ATTENTION

• Le traitement chirugical des insuffisances mitrale et tricuspidienne consiste essentiellement en un remplacement des cordes tendineuses courtes, rompues ou allongées, par des sutures en Téflon, en une division des cordes ou des muscles papillaires fusionnés et en une annuloplastie.

• La péricardectomie par voie thorascopique permet une récupération beaucoup plus rapide de l’animal après l'intervention.

Points forts

L’artère fémorale est préférée pour le retour du sang oxygéné dans la circulation corporelle, car l’aorte est fragile chez le chien.

La solution cardioplégique, injectée toutes les vingt minutes pour immobiliser le muscle cardiaque au cours d’une chirurgie à cœur ouvert, est une solution à 4° C à forte concentration en potassium.

Le traitement chirurgical à cœur ouvert de la sténose aortique n’améliore pas nécessairement la durée de survie des chiens.

La ventriculectomie utilisée chez l’homme en Amérique du Sud a été réalisée chez le chien sain avec succès.

La resynchronisation des oreillettes avec les ventricules permet, lors de certaines cardiomyopathies dilatées, d’augmenter le débit cardiaque et d’améliorer la fonction cardiaque de façon appréciable.

En savoir plus

a - Monnet E. Adynamic cardiomyoplasty: effect on cardiac efficiency and contractile reserve in dogs with adriamycin-induced cardiomyopathy. J. Card. Surg. 2001;(In Press).

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