Question de lecteur
Auteur(s) : Lucile Martin
Fonctions : Unité de nutrition et d’endocrinologie, ENV de Nantes, Atlanpôle, La Chantrerie, 44307 Nantes Cedex
Le lien entre sel et santé fait débat depuis de nombreuses années, que ce soit en médecine humaine ou en médecine animale. Chez l’homme, la publicité clame à longueur de spots qu’il « ne faut pas manger trop salé ». Plus de 2 237 revues sont référencées sur les méfaits du sel dans la base scientifique PubMed. Les effets délétères regroupent l’apparition d’œdèmes extracellulaires, des perturbations du système rénine-angiotensine-aldostérone, la perte d’autorégulation du système vasculaire, une activation de la production d’espèces pro-oxydantes, une stimulation de la synthèse de cytokines pro-inflammatoires et une augmentation de l’activité du système nerveux sympathique. Cette liste est loin d’être exhaustive.
L’habitude a été prise de calquer les affirmations de la médecine humaine sur celle des carnivores domestiques, donc si le sel est “mauvais” pour l’homme, il l’est forcément pour ses compagnons, les chats et les chiens !
Chez le chat, la dernière publication du National Research Council (NRC), datée de 2007, indique un besoin en sodium d’environ 10 mg/kg/j et une tolérance en sodium supérieure à 15 g/kg d’aliment (soit 1,5 % de sodium dans un aliment sec), tant que de l’eau est disponible à volonté. Plusieurs études montrent que des concentrations de 0,7 à 1,5 % de sodium dans les aliments secs pour chats présentent de nombreux avantages : augmentation de la prise hydrique et du volume urinaire, diminution du risque associé à la formation de cristaux d’oxalate de calcium, et ce sans effet délétère démontré sur la pression artérielle.
Alors donc, pas de risque associé à la consommation de sodium chez le chat ? Le sujet reste controversé. Les conclusions d’une seule étude indiquent qu’un régime enrichi en sodium (1,1 %) entraînerait une altération de la fonction rénale, mais les résultats présentés dans cet article sont en contradiction avec les conclusions, qu’ils ne permettent pas d’étayer [4]. Enfin, les auteurs notent qu’il existerait, comme chez l’homme, des populations de chats plus sensibles au sel, mais cette affirmation, encore une fois, n’est pas étayée par les résultats. Quatre autres études n’ont pas montré d’association entre le sodium et la progression de la maladie rénale [1, 2, 3, 5].
Il n’existe pas de preuves scientifiques suffisantes pour affirmer que l’excès de sodium peut avoir un effet délétère à long terme sur la santé du chat. Des études longitudinales sont donc nécessaires avant de pouvoir infirmer ou confirmer l’innocuité du sel chez cette espèce. Il serait également utile de s’accorder sur la notion d’“excès” de sel. Où la limite supérieure est-elle placée ? Si le NRC reste la référence, aucun aliment commercial n’est excédentaire en sel.