Cancérologie canine
Mise à jour
AVIS D'EXPERTS
Auteur(s) : Jérôme Abadie*, Catherine André**, Patrick Devauchelle***
Fonctions :
*Unité d’anatomie pathologique
ENV de Nantes
BP40706
44307 Nantes Cedex 3
**UMR 6061 CNRS/Université de Rennes 1
Faculté de médecine
35043 Rennes Cedex
***Centre anti-cancereux
ENV d’Alfort 7, avenue du Général-de-Gaulle
94700 Maisons-Alfort
Les désordres histiocytaires représentent un large éventail d’affections réactionnelles ou tumorales, bénignes ou malignes dont la présentation clinique et le pronostic sont très différents.
Jérôme Abadie : Le terme d’“histio-cytose maligne” a été utilisé la première fois par Moore et coll. en 1986 pour désigner une maladie tumorale émergente affectant des chiens de race bouvier bernois. Depuis, la nosologie des proliférations histiocytaires dans l’espèce canine a été précisée dans sa diversité, grâce à plusieurs travaux de caractérisations clinique et anatomopathologique et d’identification du phénotype cellulaire en cause.
Le terme d’“histiocytose” désigne un ensemble hétérogène d’affections de gravité variable qui se caractérisent par une accumulation et/ou une prolifération tissulaire d’histiocytes.
L’histiocyte est une dénomination qui désigne plusieurs types de cellules leucocytaires dérivant de précurseurs hématopoïéiques communs qui résident dans les tissus, d’où leur nom (histio : tissu, cyte : cellule).
Ces cellules exercent leur activité de défense en lien avec le système immunitaire, par leur capacité de phagocytose et/ou de présentation antigénique. Ce terme s’applique essentiellement :
– aux macrophages, aux cellules phagocytaires chargés de l’élimination de débris cellulaires, aux matériels exogène, pathogène extra- ou intra- cellulaire ;
– aux cellules présentatrices d’antigènes, qui comprennent des sous-catégories telles que les cellules de Langerhans ou dendritiques interstitielles, dont la fonction est de déclencher les réponses immunitaires spécifiques en apprêtant les antigènes afin de les rendre capables d’activer les lymphocytes.
Chez le chien, plusieurs désordres histiocytaires ont donc été identifiés selon le type cellulaire en cause, la nature tumorale ou non et le caractère bénin ou malin de la prolifération.
Se distinguent ainsi :
– l’histiocytome cutané, qui est une tumeur bénigne issue de la prolifération des cellules de Langerhans épidermique régressant spontanément et affectant les chiens jeunes de toutes races ;
– les histiocytoses réactionnelles, cutanées ou systémiques qui sont des affections non tumorales mais de pronostic réservé, à prédisposition raciale et composées de cellules dendritiques ;
– le sarcome histiocytaire qui existe sous une forme localisée ou sous une forme précocement disséminée ou d’emblée multicentrique, cette dernière correspondant à l’“histiocytose maligne” décrite par Moore. Il s’agit d’une tumeur maligne dont le pronostic est réservé à sombre, à prédisposition raciale ;
– le syndrome hémophagocytaire qui correspond à une prolifération tumorale maligne d’origine macrophagique, affectant principalement la rate et la moelle osseuse, et de pronostic sombre en raison des conséquences hématologiques, systématiquement présentes et qui ont donné le nom à l’affection.
Le terme d’“histiocytose maligne” désigne donc une prolifération tumorale maligne de cellules dendritiques interstitielles activées, qui se présente sous une forme d’emblée multicentrique (atteinte multiviscérale).
Il s’agit d’un cancer de grande malignité, de pro-nostic sombre, à forte prédisposition raciale. Aujourd’hui, le terme de “sarcome histiocytaire disséminé” est davantage utilisé pour désigner cette affection.
JA : Comme évoqué ci-dessus, les chiens peuvent être affectés par des proliférations histiocytaires non tumorales et dites “réactionnelles”. Ces affections sont d’évolution plus lente et de pronostic moins sombre que le sarcome histiocytaire disséminé (nom actuellement préconisé pour désigner l’histiocytose maligne), mais ne doivent pas toutefois être considérées comme des affections bénignes et indolentes.
Deux formes distinctes mais qui pourraient toutefois représenter un continuum sont distinguées : l’histiocytose cutanée et l’histiocytose systémique.
• La forme cutanée se caractérise par des lésions simples ou multiples, nodulaires, siégeant sur la peau et...