CARDIOLOGIE
Expert canin
Auteur(s) : François Serres
Fonctions : Oncovet
Avenue Paul Langevin
59650 Villeneuve d’ASCQ
La présence d’un bruit de galop chez un chat peut être une découverte fortuite. Dans cert-ains cas, elle est associée à des malformations cardiaques ou péricardiques.
Un chat maine coon mâle, âgé de 12 semaines, est référé pour la réalisation d’un examen de dépistage d’une dysfonction cardiaque, après la mise en évidence d’un bruit de galop à l’auscultation, sans symptôme associé.
Jusqu’à présent, l’état général de l’animal n’est pas perturbé, l’appétit reste bon. L’examen clinique ne montre pas d’anomalie à l’auscultation, en dehors d’une légère tachycardie avec un bruit de galop intermittent, sans polypnée associée ce jour-là.
À l’examen échocardiographique, la morphologie et la cinétique cardiaques ne sont pas modifiées. Le cœur est en contact avec du tissu hépatique, mais il ne comprime pas le ventricule droit pour le moment. Aucune malformation associée n’est observée (photo 1).
Un examen radiographique du thorax montre une augmentation de taille de la silhouette cardiaque, ainsi qu’une perte de la continuité diaphragmatique, sans modification de la cage thoracique (absence de malformation du sternum, en particulier) (photo 2).
Ainsi, une hernie phréno-péricardique impliquant du tissu hépatique est mise en évidence, sans modification de la morphologie cardiaque ni malformation du sternum concomitante.
Une correction chirurgicale de la hernie est indiquée dans des délais “modérément” brefs (idéalement sous un à deux mois). Cette anomalie peut théoriquement être bien supportée à long terme, mais une correction tardive est associée à un risque plus important de complications (potentielles adhérences entre le cœur et les organes herniés, reconstruction plus complexe du diaphragme).
La présence d’un bruit de galop chez le chien et le chat peut avoir plusieurs origines. L’ajout d’un troisième bruit cardiaque aux bruits B1 (correspondant à la fermeture des valves atrioventriculaires) et B2 (fermeture des valves aortiques et pulmonaires) produit un changement identifiable à l’auscultation. Ce troisième bruit peut correspondre soit au dédoublement de l’un des bruits cardiaques (par exemple, le dédoublement de B2 est essentiellement observé lors d’hypertension pulmonaire), soit à l’apparition d’un troisième ou quatrième bruit cardiaque. Ces bruits supplémentaires correspondent à un remplissage diastolique turbulent du ventricule gauche et sont considérés comme pathologiques chez le chien. Toutefois, ils sont aussi décrits chez le chat, sain ou malade, principalement lors de dysfonction diastolique (cardiomyopathie hypertrophique ou restrictive, hypertension artérielle systémique). Leur identification justifie la réalisation d’un examen échocardiographique, même en l’absence d’autre symptôme.
L’identification d’une hernie phréno-péricardique dans cette présentation clinique est inhabituelle. Lors de cette affection, les bruits de galop ne sont pas fréquemment rapportés, et seulement une minorité de chats présentent un souffle ou des bruits cardiaques étouffés [2, 3].
Les hernies phréno-péricardiques correspondent à un défaut de fermeture du diaphragme au cours de l’embryogenèse, à l’origine du passage d’organes abdominaux (le plus souvent foie, intestin, rate et estomac) dans la cavité péricardique, au contact direct de l’épicarde. Elles sont souvent diagnostiquées chez de jeunes adultes (âge moyen du diagnostic ente douze et trente mois selon les études), plus âgés que dans le cas présenté, avec une prédisposition établie (mais inexpliquée) chez les races félines à poils longs, notamment le maine coon [2, 3]. En outre, la plupart des chats (67 à 87 %) sont présentés avec des symptômes essentiellement respiratoires, liés à la hernie. La présentation inhabituelle de ce cas (animal jeune et asymptomatique) peut s’expliquer par l’absence de complication liée au diagnostic précoce et presque fortuit de l’affection.
Une prise en charge chirurgicale rapide est recommandée. Le taux de mortalité périopératoire rapporté est compris entre 8 et 14 % suivant les études [1, 2]. Une prise en charge “conservatoire”, avec une simple surveillance clinique, peut être envisagée, mais près d’un tiers des animaux présenteront des symptômes réguliers, majoritairement des signes respiratoires, liés à cette malformation [2].
Conflit d’intérêts : Aucun
La présence d’une anomalie à l’auscultation (souffle, bruits cardiaques étouffés, bruit de galop) chez un jeune chat doit toujours motiver a minima la réalisation d’examens complémentaires. Certaines anomalies potentiellement graves, mais asymptomatiques, peuvent ainsi être diagnostiquées le plus tôt possible et, dans certains cas, la prise en charge précoce sera d’autant plus efficace. Dans le cas présenté, un traitement chirurgical rapide a été réalisé sans complication.