CHIRURGIE
Chirurgie
Auteur(s) : Mélissa Pottier*, Kévin Minier**
Fonctions :
*(dipl. ECVS) Oncovet
Avenue Paul-Langevin
59650 Villeneuve d’Ascq
**(dipl. ECVS)
Les agrafeuses automatiques facilitent l’entérectomie dans de nombreux cas chez le chat et le chien, avec une courbe d’apprentissage plus rapide que la procédure manuelle.
Une chienne de type épagneul, âgée de 5 ans, est référée à la suite d’un épisode d’abattement suraigu. À son admission, elle présente une douleur abdominale associée à des signes de choc distributif (temps de remplissage capillaire augmenté, hypotension, hypothermie modérée).
Un examen échographique de l’abdomen révèle une masse jéjunale d’environ 5 cm de diamètre associée à une adénomégalie mésentérique et à des signes de péritonite, notamment de l’ascite en quantité importante. L’analyse du liquide après sa ponction permet de le qualifier d’exsudat (densité de 1,030, neutrophiles en grande quantité, macrophages et bactéries extracellulaires et intracellulaires). Les examens étant à ce stade en faveur d’une péritonite septique, une laparotomie exploratrice est décidée et réalisée en urgence.
Une laparotomie xipho-ombilicale est effectuée sous anesthésie générale. Environ 500 ml de liquide sont aspirés à l’ouverture de la cavité abdominale. Un premier rinçage à l’aide d’une solution physiologique stérile est entrepris immédiatement.
L’exploration des organes abdominaux révèle une masse intestinale centrée sur le jéjunum, présentant des adhérences épiploïques. Lors de la libération de ces adhérences, une rupture du tube digestif est confirmée. La zone est isolée avec 7 cm de marges intestinales de part et d’autre de la masse (photo 1). Après l’hémostase des vaisseaux mésentériques, une entérectomie avec une anastomose latéro-latérale est réalisée à la pince GIA (pour gastro-intestinal anastomosis), une technique qui nécessite deux cartouches d’agrafes, l’une pour créer l’anastomose latéro-latérale et l’autre pour fermer transversalement l’anastomose (photo 2). Un surjet de Cushing est ajouté sur la suture transverse, et deux points simples sont appliqués sur la partie où les anses se séparent. L’ouverture mésentérique est suturée et la zone est épiploïsée après un rinçage de l’abdomen avec plus de 10 ml/kg de solution physiologique stérile. Un nœud lymphatique mésentérique hypertrophié est prélevé pour l’analyse histologique. L’abdomen est fermé après la mise en place d’un drain aspiratif de Jackson-Pratt. Ce dernier est retiré après 48 heures d’hospitalisation, et la chienne est alors rendue à ses propriétaires.
L’examen histopathologique confirme une lésion tumorale de nature carcinomateuse. Les marges d’exérèse sont saines et le nœud lymphatique non infiltré par la tumeur. Un protocole de chimiothérapie est discuté et décliné par les propriétaires. Un suivi par un examen échographique de l’abdomen et un examen radiographique du thorax est proposé tous les trois mois, afin de suivre l’évolution loco-régionale.
Les interventions chirurgicales intestinales sont fréquentes chez le chien et le chat, les corps étrangers obstructifs ou perforants et les lésions tumorales faisant partie des indications les plus courantes. De nombreuses techniques de résection et d’anastomose intestinale sont décrites. Plusieurs règles restent incontournables : les sutures doivent être apposantes, non ischémiantes, étanches, et inclure la couche sous-muqueuse intestinale “holding layer” [2]. Dans le cadre des sutures manuelles, un fil monofilament résorbable 3-0 à 4-0 USP avec une aiguille ronde est préféré. Des points simples ou un surjet apposant peuvent être choisis sans différence sur la cicatrisation intestinale. Dans les deux cas, les points doivent être séparés d’environ 3 mm et mis en place à 3 mm du bord de l’intestin [1].
Les anastomoses par agrafeuse automatique sont également une option, ce matériel étant désormais plus accessible en France financièrement et en termes d’approvisionnement. Dans ce cas, une entérectomie conventionnelle est d’abord réalisée, puis une anastomose latéro-latérale anatomique (fonctionnellement termino-terminale) est créée par deux lignes d’agrafes GIA, ou une ligne GIA et une TA (pour thoraco-abdominal anastomosis), cette dernière étant plus éversante et pouvant donc engendrer davantage d’inflammation locale. Un point supplémentaire est réalisé à la jonction distale des sutures afin de prévenir toute tension et de limiter le risque de déhiscence. La ligne de sutures transverses étant la zone la plus à risque de déhiscence, certaines études préconisent également d’y ajouter un surjet invaginant supplémentaire [2]. Une anastomose termino-terminale anatomique (en combinant une EAA, ou end-to-end anastomosis, avec soit une TA, soit une suture) est également possible, mais les pinces pour la mettre en place sont un peu plus complexes à utiliser.
Les résections et anastomoses intestinales manuelles ou par agrafeuse ont des taux de déhiscence semblables, mais les agrafeuses automatiques permettent d’abaisser significativement le temps opératoire, ce qui peut être un atout considérable chez des animaux débilités ou en sepsis [1]. Les autres avantages de ce type de suture sont la répétabilité du geste, la réduction du traumatisme tissulaire et la facilité à gérer des disparités de taille luminale. En outre, les études tendent à montrer que la courbe d’apprentissage est moins importante que pour une anastomose manuelle [1].
Les inconvénients principaux de cette technique sont le coût et les limites d’utilisation : par exemple, les agrafeuses classiques ne sont pas utilisables chez le chat ou le chien de petite taille, ou lorsque la longueur restante d’iléon est trop courte [2].
Les complications d’une résection et d’une anastomose intestinale sont l’iléus, la formation d’adhérences, le syndrome d’intestin court, la plus grave étant la déhiscence entraînant une péritonite septique [2]. L’épiploïsation d’un site d’entérectomie réduit le taux de complications postopératoires. Lorsque l’omentum n’est pas utilisable, notamment en raison d’une inflammation majeure en cas de péritonite septique ou de la nécessité d’une résection dans un cadre oncologique, un patch séreux peut donner des résultats similaires : le bord antimésentérique d’une anse intestinale saine est alors fixé sur la ligne de suture [2]. Lorsque l’animal présente une péritonite à son arrivée, il est recommandé de mettre en place, pendant l’intervention, un drain abdominal avec une aspiration continue [2]. Ces systèmes sont désormais peu onéreux et simples à appliquer ainsi qu’à gérer pendant l’hospitalisation.
Conflit d’intérêts : Aucun
Les affections intestinales sont fréquentes chez le chien et le chat, et il n’est pas rare de devoir réaliser une entérectomie. Des techniques d’agrafage automatique sont désormais accessibles et peuvent réduire le temps opératoire.