ANÉVRISME DE L’AURICULE DROITCHEZ UN CHIEN - Le Point Vétérinaire n° 437 du 01/01/2023
Le Point Vétérinaire n° 437 du 01/01/2023

CARDIOLOGIE

Cardiologie

Auteur(s) : Marine Scheffen*, Christophe Bourguignon**

Fonctions :
*(dipAcvim cardiology)
CHV Saint-Martin
275 route impériale
74570 Saint-Martin-Bellevue

L’anévrisme de l’auricule droit est une affection cardiaque rare chez le chien. Elle doit faire partie du diagnostic différentiel des masses médiastinales craniales observées à la radiographie thoracique.

Un chien croisé teckel mâle castré, âgé de 8 ans, est présenté en consultation pour des petits épisodes de toux quinteuse non productive, essentiellement rapportés le soir, qui évoluent progressivement depuis plusieurs semaines. L’examen clinique et le bilan hémato-biochimique ne montrent aucune anomalie.

PRESENTATION DU CAS

1. Examens complémentaires

Des radiographies thoraciques sont réalisées afin d’investiguer l’origine de la toux (photo 1). Elles mettent en évidence la présence d’une masse médiastinale craniale circulaire d’opacité tissulaire à l’origine d’un effacement de la silhouette cardiaque cranio-ventrale. La trachée et la bifurcation trachéo-bronchique ne sont pas déplacées secondairement. Les structures broncho-pulmonaires et cardio-vasculaires sont dans les limites des valeurs usuelles.

Pour identifier la masse médiastinale craniale, une échocardiographie est effectuée. Une structure cavitaire anéchogène bien délimitée est visible, située cranialement à l’atrium droit. Elle s’ouvre largement sur ce dernier, au niveau de sa paroi libre. L’examen Doppler confirme une communication de faible vélocité entre ces deux éléments. Aucun thrombus n’est observé au sein de la cavité. Lors des examens 2D et temps-mouvement, les cavités cardiaques apparaissent de taille normale. À l’examen Doppler, le flux pulmonaire est laminaire et sa vélocité normale, tandis qu’une discrète insuffisance pulmonaire, non significative, est observée. Une inversion des ondes transmitrales diastoliques E et A est également notée, à relier à un défaut de compliance lié à l’âge de l’animal. La variation du diamètre de la veine cave caudale est normale.

Dans un second temps, un examen tomodensitométrique du thorax est pratiqué pour mieux caractériser les structures cardio-vasculaires et explorer cette masse médiastinale craniale (photo 2). Une dilatation bulbaire de l’auricule droit est visualisée : il mesure 2 × 2,5 cm et fait protrusion dans le médiastin cranial. Le reste des structures cardio-vasculaires est normal.

2. Diagnostic

L’examen tomodensitométrique du thorax et l’échocardiographie transthoracique sont en faveur d’un anévrisme de l’auricule droit, sans remaniements morphologiques ou fonctionnels cardiaques associés. Étant donné l’absence de caillot sanguin au sein de l’auricule droit, de dilatation du cœur droit ou de tout signe évoquant une insuffisance cardiaque congestive droite, le pronostic est favorable. Comme les pressions à l’intérieur de la masse sont basses, le risque d’une rupture de cette structure est jugé minime. Cette dilatation peut mécaniquement être liée à la toux observée.

Aucun traitement n’est instauré en première intention, car les signes cliniques rapportés sont mineurs, sans remodelages cardiaques ou thrombus associés. Une réévaluation échocardiographique est programmée six mois plus tard.

DISCUSSION

1. Définition et signes cliniques

L’anévrisme de l’auricule droit est une affection cardiaque rare chez le chien, également rapportée chez l’humain, qui peut être d’origine congénitale ou acquise. Cette dilatation de l’auricule droit, qui se distingue difficilement du diverticule atrial droit, se définit comme une structure sacculaire de taille variable faisant protrusion depuis la paroi libre de l’atrium droit ou ses appendices, via un orifice [6, 3]. L’anévrisme de l’auricule est aussi rapporté à gauche [3].

La plupart des chiens sont asymptomatiques et l’anévrisme de l’auricule droit est le plus souvent une affection découverte fortuitement. Le tableau clinique peut inclure un souffle cardiaque, une arythmie, une toux comme dans le cas présenté, une léthargie, des syncopes ou une dyspnée. Chez l’humain, une thrombose, une tachyarythmie supraventriculaire, une rupture d’anévrisme ou une mort subite font partie des complications décrites [2].

2. Examens complémentaires

À la radiographie, il est possible d’observer une structure à l’opacité tissulaire dans la région médiastinale craniale qui estompe la silhouette cardiaque craniale, comme dans notre cas [6, 3]. Le diverticule atrial droit doit faire partie du diagnostic différentiel des masses médiastinales craniales.

À l’échocardiographie transthoracique, une large structure cavitaire anéchogène, attenante et communiquant avec l’atrium droit, peut être visualisée. Elle ne doit pas être confondue avec une dilatation atriale droite ou, beaucoup plus rarement, un dédoublement de l’atrium droit dans le cas d’une malformation congénitale rare, le cor triatriatum dexter [6, 3]. La communication entre l’atrium et le diverticule doit être objectivée à l’examen Doppler couleur ou à l’échographie de contraste [6, 4]. Des thrombus intracavitaires et des signes d’hypertension pulmonaire y sont parfois associés [3, 6, 5]. L’échocardiographie est l’examen de choix de l’anévrisme de l’auricule droit avec, en médecine humaine, une sensibilité de 90 % pour la voie transœsophagienne et seulement 45 % pour la voie transthoracique. La sensibilité de l’échographie chez l’animal, dans ce cadre, demeure inconnue.

Chez le chien, l’échographie transœsophagienne est très peu disponible et, selon la localisation de l’anévrisme de l’auricule droit, l’échocardiographie transthoracique ne permet pas toujours de le visualiser. Un examen tomodensitométrique ou d’imagerie par résonance magnétique est alors nécessaire pour préciser le diagnostic et exclure la présence d’autres anomalies vasculaires [1, 3, 5, 6, 7].

3. Traitement

En cas d’anévrisme de l’auricule droit asymptomatique chez l’humain, un traitement conservateur peut être administré, à base d’anticoagulants et éventuellement d’anti-arythmiques en cas de tachyarythmie. Le pronostic est relativement bon. Lors d’anévrisme de l’auricule droit symptomatique, la résection chirurgicale de l’anévrisme est préférée [2]. Dans notre cas, comme seuls quelques épisodes de toux étaient rapportés, sans thrombus ou dilatation atriale droite, aucun traitement n’est apparu nécessaire en première intention.

Références

  • 1. Baron Toaldo M, Diana A, Morini M, Cipone M. Imaging diagnosis: intrapericardial right auricle aneurysm in a dog. Vet. Radiol. Ultrasound. 2010;51 (5):512-515.
  • 2. Li HP, Ye XW, Wang HT. Two case reports of right atrial aneurysm. Medicine (Baltimore). 2020;99 (16):e19748.
  • 3. Masson AV, Maddox TW, Bode EF et coll. Clinical and diagnostic imaging findings in dogs with atrial appendage aneurysm: 7 cases (2014-2020). J. Vet. Cardiol. 2021;35:63-73.
  • 4. Murphy LA, Russel NJ, Nakamura RK. Right atrial aneurysm in a dog. J. Small Anim. Pract. 2019;60 (1):62.
  • 5. Nakamura T, Tateishi H, Ishikawa C et coll. A dog with right auricular aneurysm diagnosed with computed tomography angiography. Adv. Anim. Cardiol. 2014;47 (2):41-46.
  • 6. Park S, Kittleson MD, Yu D et coll. Echocardiographic features of giant right atrial diverticulum in a dog. J. Vet. Intern. Med. 2017;31 (3):879-883.
  • 7. Schwarz T, Willis R, Summerfield NJ et coll. Aneurysmal dilatation of the right auricle in two dogs. J. Am. Vet. Med. Assoc. 2005;226 (9):1512-1515.

Conflit d’intérêts : Aucun