PNEUMOLOGIE
Thérapeutique
Auteur(s) : Cyril Duperrier-Simond*, Yassine Mallem**
Fonctions :
*Service de médecine interne
d’Oniris
VetAgroBio
101 route de Gachet
44300 Nantes
**Unité de pharmacologie
et toxicologie d’Oniris
VetAgroBio
Bien que présentant des effets indésirables associés à leurs nombreux effets systémiques, les méthylxanthines restent utilisables pour le traitement du chat asthmatique dyspnéique.
L’asthme est une affection bronchique chronique fréquente chez le chat, caractérisée par la combinaison d’une inflammation bronchique, de l’accumulation de mucus dans l’arbre respiratoire et d’une hyperréactivité des muscles lisses des voies respiratoires inférieures. Cette “bronchoconstriction” peut conduire, chez certains animaux, à un tableau clinique spectaculaire de crise de détresse respiratoire dont l’issue est quelquefois fatale. Un traitement bronchodilatateur semble naturellement indiqué chez ces chats. Bien qu’elles ne soient plus considérées comme les molécules de choix pour le traitement du bronchospasme, les méthylxanthines restent largement utilisées en médecine vétérinaire. Cet usage ainsi que leur grande disponibilité méritent une revue de leurs intérêts et limites.
Les méthylxanthines regroupent de nombreuses molécules aux propriétés diverses, à l’instar de la caféine ou de la théobromine. Certaines d’entre elles ont un effet direct sur les muscles lisses des bronches. C’est notamment le cas de la théophylline, de l’aminophylline et de la propentofylline.
Leur administration induit une inhibition des phosphodiestérases intracytoplasmiques des cellules musculaires bronchiques, conduisant à une augmentation de l’adénosine monophosphate cyclique intracellulaire responsable d’une bronchodilatation. De plus, elles inhibent les récepteurs A1 de l’adénosine, réduisant le relargage d’histamine et de leucotriènes à l’origine de la bronchoconstriction [1]. Elles permettent aussi une augmentation des efforts respiratoires par leur action sur le système nerveux central et une augmentation de la contractilité diaphragmatique [5].
À dose thérapeutique, la théophylline et l’aminophylline ont également un effet chronotrope et inotrope positif modéré (tableau). Des signes digestifs (nausées, vomissements, diarrhée) et neurologiques (excitation, insomnie) sont rapportés pour des doses supérieures à celles recommandées ci-après. Ils disparaissent en général lorsque la dose est réduite. Des crises convulsives et des arythmies cardiaques sont observées lors d’intoxication majeure (au-delà de 20 µg/ml) et nécessitent un traitement de soutien intensif [5]. L’index thérapeutique de ces molécules étant relativement bas, la dose doit être basée sur la masse maigre du chat. La propentofylline semble avoir un meilleur index dans cette espèce, mais son intérêt clinique n’est pas définitivement établi [6].
Les fluoroquinolones, qui incluent la marbofloxacine et l’enrofloxacine, potentialisent les méthylxanthines [1, 2, 5]. La cimétidine, l’allopurinol, la clindamycine et la lincomycine conduisent également à une augmentation de leurs effets. Les méthylxanthines sont en revanche inhibées par les antiépileptiques comme le phénobarbital ou la phénytoïne. La théophylline augmente le risque d’arythmies provoquées par certains agents anesthésiques (halothane, médétomidine) et de convulsions lors de l’administration conjointe de kétamine [5].
En médecine vétérinaire, les agonistes β2-adrénergiques (salbutamol, terbutaline) ont démontré de meilleurs effets bronchodilatateurs que les méthylxanthines [1, 3, 6]. Leurs effets indésirables, associés à une faible affinité pour les récepteurs β1-adrénergiques, restent rares [7]. C’est pourquoi ils sont recommandés en première intention, en complément d’une corticothérapie, lorsqu’un effet bronchodilatateur est recherché chez le chat asthmatique en dyspnée [5, 7]. En cas de difficulté d’approvisionnement ou d’éventuelle mauvaise tolérance par l’animal, l’administration de méthylxanthines demeure une solution alternative raisonnable.
Des formulations vétérinaires per os existent pour la théophylline, la propentofylline, l’aminophylline chez le chien, mais aucune autorisation de mise sur le marché (AMM) n’est disponible chez le chat en France et leur utilisation doit donc être raisonnée dans le cadre de la cascade thérapeutique.
La forme injectable de l’aminophylline n’est pas disponible en médecine vétérinaire, même si son intérêt semble démontré chez le chat [4]. À l’inverse, bien qu’une forme orale soit utilisée pour le tarissement chez la chatte (Tari Dog®), il n’existe pas de données dans le cadre du traitement de la dyspnée.
En outre, la diprophylline est disponible dans deux formulations injectables avec une AMM vétérinaire chez le chat (Bio-Pulmone® et Frécadryl® indiqués respectivement pour le traitement des affections broncho-pulmonaires et celui des défaillances cardio-vasculaires et/ou respiratoires), mais aucune étude ne rapporte leur intérêt dans la prise en charge de la détresse respiratoire du chat asthmatique.
À l’instar des agonistes β2-adrénergiques, la durée du traitement avec les méthylxanthines doit être adaptée aux signes cliniques. Elles peuvent être administrées lors de crises chez des animaux présentant des épisodes paroxystiques ponctuels, ou maintenues au long cours chez des chats souffrant d’une dyspnée permanente.
Conflit d’intérêts : Aucun
Même si elles présentent un moins bon potentiel de bronchodilatation et des effets indésirables plus importants que les agonistes β2-adrénergiques, les méthylxanthines restent une solution thérapeutique raisonnable pour le traitement au long cours du chat asthmatique dyspnéique. Quel que soit le bronchodilatateur choisi, il ne doit jamais se substituer au traitement à base de glucocorticoïdes.