Syndrome éosinophilique épithéliotrope multisystémique, une affection rare au pronostic sombre - Pratique Vétérinaire Equine n° 0213 du 11/03/2022
Pratique Vétérinaire Equine n° 0213 du 11/03/2022

REVUE DE PRESSE - Dermatologie

CAHIER SCIENTIFIQUE

Revue de presse

Auteur(s) : Analyse par Didier PIN

Fonctions :
*VetAgro Sup, campus vétérinaire de Lyon
**1, avenue Bourgelat
***69280 Marcy-l’Étoile

Deux articles font un état des connaissances sur le syndrome éosinophilique épithéliotrope multisystémique : le premier décrit deux cas observés en Italie, le second présente les caractères de cette affection d’après la synthèse de 44 cas publiés.

Ce syndrome fait partie du groupe des maladies éosinophiliques, caractérisées par un infiltrat de granulocytes éosinophiles dans divers tissus et une hyperéosinophilie sanguine, en l’absence d’une cause identifiée.

Il touche les chevaux de tous les âges (moyenne de 6,7 ans, 1 à 19 ans), mais les jeunes adultes semblent plus souvent atteints. Aucune prédisposition de sexe ni de race n’est formellement établie.

Parfois d’apparition soudaine et d’évolution aiguë, ce syndrome est le plus souvent d’apparition progressive et d’évolution chronique, expliquant le signe clinique le plus fréquent qui est la dégradation marquée de l’état général (95 % des cas). L’appétit est fréquemment conservé. En général, aucune fièvre n’est observée. La peau est atteinte dans 77 % des cas avec un érythème, un squamosis, des dépilations, des ulcères et des croûtes répartis sur l’ensemble du corps, plus particulièrement sur la tête et les extrémités des membres. Un prurit, parfois sévère, peut être constaté. Parmi les signes cliniques fréquents figure la diarrhée par malabsorption, due à l’infiltration de la paroi de l’intestin par les granulocytes éosinophiles. Les troubles respiratoires et le jetage sont moins fréquents, ainsi que l’œdème déclive de l’abdomen et des membres, l’adénopathie des nœuds lymphatiques superficiels et les ulcères des muqueuses, buccale et linguale, rapportés dans les deux cas italiens.

Face à un tel tableau clinique, les autres hypothèses sont, en l’absence de troubles digestifs, la gale sarcoptique ou psoroptique, le pemphigus foliacé, le lupus érythémateux cutané chronique exfoliatif ou une toxidermie, et en présence de troubles digestifs et d’un amaigrissement marqué, la mucinose folliculaire associée à un lymphome.

L’hyperéosinophilie est inconstante (8 cas sur 44). Les troubles biochimiques les plus fréquents sont l’hypoalbuminémie et l’augmentation d’activité des gamma-glutamyltransférases et des phosphatases alcalines. L’atteinte hépatique, présente dans 40 % des cas, peut être confirmée par l’échographie ou l’examen histopathologique de biopsies du foie. Le diagnostic repose sur la mise en évidence de l’infiltrat de granulocytes éosinophiles dans la peau, l’intestin, les nœuds lymphatiques.

Le pronostic est sombre, l’animal mourant ou étant euthanasié dans la plupart des cas. Le traitement consiste en une corticothérapie à base de dexaméthasone par voie parentérale ou de prednisolone par voie orale. La dose est ajustée à l’évolution. Les complications bactériennes étant fréquentes, un traitement antibiotique y est associé. Sur les 44 cas publiés, seuls 4 chevaux ne sont pas morts au cours des quelques semaines qui ont suivi le diagnostic. L’un, sous traitement de dexaméthasone, était vivant 17 mois après le diagnostic puis a été perdu de vue, un autre a reçu de la prednisolone pendant 3 mois avant de mourir de coliques. Deux chevaux ont survécu, l’un grâce à un traitement de dexaméthasone au long cours, le second a guéri, sans rechuter à l’arrêt du traitement de dexaméthasone, dont la dose avait été progressivement diminuée.

En cas d’examen nécropsique, les organes le plus souvent lésés sont les nœuds lymphatiques, l’intestin grêle, le foie, le pancréas, les poumons et les reins. Tous présentent une fibrose et un infiltrat inflammatoire constitué de granulocytes éosinophiles.

Pertinence clinique

Le syndrome éosinophilique épithéliotrope multisystémique est une affection rare, caractérisée par une perte d’état marquée et une atteinte prédominante de la peau et du tractus digestif, cette dernière pouvant être silencieuse, due à un infiltrat inflammatoire, multisystémique, de granulocytes éosinophiles. Le traitement de choix est une corticothérapie. Le pronostic est sombre.

Références

Stucchi L, Feudo CML, Valli C et coll. Equine multisystemic eosinophilic epitheliotropic disease in two horses in Italy. Equine Vet. Educ. 2021:doi.org/10.1111/eve.13571

Brosnahan M. Molecular immunology and genomics : the future of multisystemic eosinophilic epitheliotropic disease. Equine Vet. Educ. 2022:doi.org/10.1111/eve.13617