Tuméfaction du paturon et boiterie postinfiltration articulaire chez un cheval de saut d’obstacles - Pratique Vétérinaire Equine n° 223 du 01/10/2024
Pratique Vétérinaire Equine n° 223 du 01/10/2024

PATHOLOGIE LOCOMOTRICE

Cahier pratique

Quel est votre diagnostic ?

Auteur(s) : Marieke ZIMMERMAN*, Justine THYS**, Nazaré STORMS***

Fonctions :
*Via Nova Equine Services Berkenbroekstraat 1, 3960 Bree (Belgique)

PRÉSENTATION CLINIQUE

Un hongre anglo-européen de saut d’obstacles, âgé de 9 ans, est présenté en urgence pour une suspicion d’arthrite septique de l’articulation interphalangienne distale du membre postérieur droit. Une infiltration de cette articulation a été réalisée par le vétérinaire référant 5 semaines auparavant. Initialement, le cheval avait bien répondu au traitement mais, quelques semaines plus tard, une boiterie marquée est apparue, visible au pas, ainsi qu’un gonflement diffus du paturon et du boulet. À l’admission, le cheval présente un gonflement du paturon postérieur droit et une tuméfaction des tissus mous en regard du récessus dorsal de l’articulation interphalangienne distale. Une boiterie sévère du même membre est observée au pas (grade 4 sur 5). L’anesthésie sésamoïde abaxiale est positive. Une ponction de l’articulation interphalangienne distale est réalisée et l’analyse du liquide synovial révèle un taux de leucocytes élevé (24,1 x 109 cellules par litre) avec 90,7 % de granulocytes, des protéines totales à 60 g/l et la protéine sérum amyloïde A à 3 mg/l, indiquant une arthrite septique de l’articulation interphalangienne distale. Des radiographies du pied sont réalisées (photo 1a, et photo 1b en ligne). L’échographie met en évidence une distension marquée du récessus dorsal de l’articulation interphalangienne distale.

DIAGNOSTIC PAR IMAGERIE

L’examen radiographique du pied postérieur droit montre une plage ovalaire radiotransparente avec des contours mal délimités dans l’os sous-chondral de la partie distale sagittale de la phalange moyenne, associée à la présence d’une petite encoche dans la plaque sous-chondrale en regard. Une discrète irrégularité de la plaque sous-chondrale de la partie sagittale de la phalange distale est également notée. L’ensemble des lésions est compatible avec une suspicion d’ostéomyélite de l’os sous-chondral de la partie distale de la phalange moyenne, et potentiellement de l’os sous-chondral de la phalange distale. Une lésion sous-chondrale pseudo-kystique d’origine traumatique ou développementale semble moins probable. Afin d’établir un diagnostic plus précis, un examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM) du pied est réalisé sur le cheval debout (photos 2a et 2b). Les anomalies mises en évidence évoquent une arthrite septique et des lésions osseuses agressives de l’os sous-chondral des phalanges moyenne et distale, compatibles avec une ostéomyélite.

TRAITEMENT ET SUIVI

Une arthroscopie de l’articulation interphalangienne distale est réalisée avec un débridement et un lavage de l’articulation, puis le cheval est mis sous antibiotiques et anti-inflammatoires par voie systémique. Des perfusions locorégionales et des infiltrations intra-articulaires sont réalisées avec des antibiotiques choisis sur la base de la culture du liquide synovial et de l’antibiogramme. L’analyse du liquide synovial est de nouveau dans les valeurs usuelles à 10 jours postopératoires. La locomotion du cheval s’améliore, bien qu’une boiterie au pas persiste de manière intermittente.

DISCUSSION

L’incidence rapportée de l’arthrite septique après une injection articulaire est faible (0,02 %) [2]. Cependant, il s’agit d’une complication possible et grave. Une prise en charge rapide et agressive est essentielle pour assurer l’avenir sportif et vital du cheval. Le diagnostic est établi via une ponction articulaire et une analyse du liquide synovial. Un examen radiographique et éventuellement échographique est également réalisé. Néanmoins, ces techniques ont des limites importantes dans ce contexte. L’analyse du liquide articulaire ne permet pas toujours d’établir un diagnostic de certitude, surtout en cas d’arthrite septique chronique associée à une infection de bas grade. À l’examen radiographique, les altérations ne deviennent visibles qu’à partir d’une perte de 30 % de la densité osseuse. L’IRM permet de son côté d’établir un diagnostic précoce et précis en cas d’atteinte de l’os sous-chondral et/ou de confirmer une suspicion radiographique [1]. Elle aide aussi au diagnostic de l’arthrite septique en cas d’échec de l’arthrocentèse consécutif à des proliférations synoviales marquées et/ou à la présence de fibrine.

Références

  • 1. Easley JT, Brokken MT, Zubrod CJ et coll. Magnetic resonance imaging findings in horses with septic arthritis. Vet. Radiol. Ultrasound. 2011;52(4):402-408.
  • 2. Gillespie CC, Adams SB, Moore GE. Methods and variables associated with the risk of septic arthritis following intra-articular injections in horses: a survey of veterinarians. Vet. Surg. 2016;45(8):1071-1076.

Conflit d’intérêts

Aucun

Cette rubrique est réalisée en partenariat avec la commission Imagerie de l’Association vétérinaire équine française.