Alors que les autorités russes ont annoncé la production massive d’un vaccin contre la Covid-19 destiné aux carnivores domestiques, l’intérêt se révèle nul d’un point de vue scientifique.
On aurait pu croire à un poisson d’avril en avance, mais les autorités russes ont bien annoncé, le 31 mars dernier, avoir obtenu l'homologation du premier vaccin au monde contre la Covid-19 à destination des animaux, d’après une dépêche de l’AFP, largement reprise dans les médias. « Les essais cliniques de Carnivac-Cov, débutés en octobre de l'année dernière (...) permettent de conclure à l'innocuité du vaccin et à sa grande efficacité puisque 100% des animaux testés [chats, chiens, renards roux et polaires et visons] ont développé des anticorps », a indiqué dans un communiqué le directeur adjoint de l'agence vétérinaire et phytosanitaire Rosselkhoznadzor. Sa production, "massive", doit avoir lieu en ce mois d’avril et sera destinée aux seuls carnivores.
Vacciner les humains, pas les animaux
Si Rosselkhoznadzor assure que le développement de ce vaccin est « particulièrement important », la question de sa pertinence se pose quand on connaît l’impact nul des animaux domestiques dans la circulation du Sars-Cov-2. « D’un point de vue épidémiologique, chiens et chats ne jouent pas de rôle dans la transmission du virus. Les cas décrits chez les animaux sont le fait d’une contamination d’origine humaine », confirme Stéphan Zientara, directeur de l'UMR Virologie Anses/INRAe/ENVA du Laboratoire de santé animale d'Alfort à l’Anses. « D’autre part, d’un point de vue vétérinaire, même si quelques cas de myocardite sont décrits en lien avec l’apparition du variant anglais, peu d’animaux sont symptomatiques. Nous n’avons d’ailleurs pas observé au sein des cliniques de l’ENVA de cas qui pourraient avoir un lien avec le virus. Il n’y a donc pas d’intérêt à vacciner les animaux », poursuit-il. Concernant un intérêt potentiel de vacciner d’autres espèces animales, c’est le même constat, peu se révélant sensibles, hormis les visons, pour lesquels une campagne de vaccination pourrait s’avérer désastreuse : « cela pourrait favoriser des mutations, avec des variants potentiellement dangereux », estime le chercheur. « La seule stratégie vaccinale qui vaille est celle de vacciner les humains, ce qui coupera à terme le cycle de transmission », insiste-t-il.
Interrogé par La Semaine Vétérinaire sur l'éventuelle production d'un vaccin contre la Covid-19 pour les animaux de compagnie, le PDG de Zoetis se positionne sur la même lignée: "L'année dernière, Zoetis a lancé des activités de développement d'un nouveau vaccin en raison des préoccupations initiales concernant le Sars-CoV-2 chez les animaux domestiques. (...). Les travaux de développement initiaux ont été réalisés sur des chiens et des chats et ont été publiés à l’automne dernier lors du 6e Congrès mondial One Health. Ces études préliminaires ont démontré que le vaccin est sûr et qu'il a une probabilité raisonnable d'être efficace. Heureusement, il n'y a actuellement aucun besoin d'un vaccin contre le Sars-CoV-2 chez les chiens, les chats ou le bétail. Toutefois, en cas de besoin, nous sommes prêts à répondre aux demandes des Autorités".