La profession va devoir faire face à des demandes d’euthanasie de chiens de race Bully XL pour se conformer à la nouvelle réglementation, et ce même sur des sujets en parfaite santé.
Suite à l'annonce du gouvernement britannique d’interdire en 2024 l’American Bully XL, les inquiétudes se sont accrues au sein de la profession vétérinaire. Si la nouvelle loi contient des dispositions permettant aux propriétaires de garder leur animal, elle propose aussi une indemnisation de 200 livres sterling à ceux qui préféreraient l’euthanasie. Avec cette incitation financière, le gouvernement a été accusé de créer un « programme de mise à la casse », augmentant ainsi le nombre de chiens en bonne santé tués. Pour évaluer le niveau d'impact de cette mesure au sein de la profession, le média Vet times a mené un sondage qui a montré que 60% des vétérinaires et 85% des ASV refuseraient de se conformer au souhait d'un propriétaire d'euthanasier un Bully XL en bonne santé et sans problèmes de comportement. Sur les 732 vétérinaires et ASV qui ont répondu à ce sondage, 63% des vétérinaires et 85% des ASV se sont également déclarés opposés à toute forme de législation spécifique à la race.
Soutenir les équipesInterrogé sur ces résultats, David Martin, conseiller en bien-être vétérinaire du groupe IVC Evidensia, estime que l'accent devra être mis sur le soutien aux équipes vétérinaires confrontées aux conséquences de cette loi. Selon lui, les équipes de son organisation ressentent déjà les effets de « demandes d'euthanasie déchirantes » de la part de propriétaires qui n'ont pas les moyens d'enregistrer leurs chiens ou qui subissent la pression des voisins pour les abandonner. Il poursuit :« l’interdiction des Bully XL présente des défis uniques, en particulier dans les situations où les vétérinaires peuvent être appelés à euthanasier un chien par ailleurs en bonne santé dans certaines circonstances, et nous sommes préoccupés par l’impact émotionnel que cela aura sur nos équipes. Selon les directives du Royal College of Veterinary Surgeon (RCVS), les vétérinaires ne peuvent pas être obligés d'euthanasier un animal en bonne santé, et ils ont le droit de refuser de procéder à une euthanasie dans ces circonstances s'ils le souhaitent […] Tous nos collègues qui se sentent préoccupés par la possibilité de se voir demander d'euthanasier un animal en bonne santé en conséquence directe de cette législation, ou pour toute autre raison, sont encouragés à demander le soutien de leurs pairs, de notre programme d'assistance pour les employés ou de la ligne d’écoute Vetlife ».
Caroline Allen, vétérinaire en chef de la Royal Society for the Prevention of Cruelty to Animals (RSPCA), s’est aussi exprimée sur l’impact de la loi sur la profession vétérinaire :« les vétérinaires et les ASV comprennent que la législation spécifique à une race ne fonctionne pas et que tuer des chiens uniquement sur la base de leur apparence est une entreprise tragique et inutile. Être contraint d’agir ainsi, si cela se fait à l’encontre de son éthique personnelle, est un facteur de risque de préjudice moral, lui-même facteur d’épuisement professionnel. Malheureusement, le gouvernement ne nous a pas laissé le choix. Il est donc important que les vétérinaires et les associations caritatives se soutiennent mutuellement pendant cette période difficile ».
Une surcharge de travail difficile à absorberLe 23 novembre dernier, la British Veterinary Association (BVA) a écrit au ministère de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales (Defra) pour lui faire part de ses préoccupations concernant l'impact que l'interdiction prochaine des chiens XL Bully aura sur la profession vétérinaire dans le cadre de son engagement continu avec le gouvernement sur cette question. La présidente de la BVA, Anna Judson, dans la lettre adressée à la cheffe des Services vétérinaires britannique Christine Middlemiss, a décrit son organisation comme « extrêmement préoccupée » notamment par les affirmations du ministère qui auraient été faites lors de récentes discussions selon lesquelles les capacités vétérinaires seraient suffisantes pour gérer l'interdiction du Bully XL. Elle a écrit : « il n'est tout simplement pas possible de faire cette affirmation sans une compréhension claire du nombre de chiens concernés, dont les estimations se situent actuellement entre 10 000 et 50 000, ni sans savoir combien d'entre eux sont déjà stérilisés et combien seront présentés en consultation pour être stérilisés ou euthanasiés [...] Sur cette base, nous serions reconnaissants de clarifier les dispositions mises en place par le Defra pour appliquer cette interdiction en cas de manque de capacité vétérinaire ».