Ce rapport analyse les opportunités apportées par plusieurs types de protéines alternatives, en termes de sécurité et durabilité alimentaire pour l’alimentation animale et humaine. Si le potentiel semble là, à ce stade, ces secteurs de production nécessitent des financements adéquats pour la recherche, et en matière de politiques industrielles.
Sur demande du groupe d’experts du Parlement européen sur l’avenir de la science et de la technologie, les services de recherche du Parlement européen se sont penchés sur le sujet des protéines alternatives non végétales, notamment pour les algues, les insectes, la viande cultivée et la fermentation microbienne. L’objectif : évaluer leur potentiel pour répondre aux enjeux de sécurité et durabilité alimentaire pour les années à venir, tout comme identifier les options politiques possibles pour favoriser leur développement. Le fruit de leur recherche a été publié dans un rapport en date d'avril 2024. Bilan : il manque encore des données pour bien évaluer les intérêts de ces sources de protéines par rapport aux protéines conventionnelles, mais elles pourraient jouer un rôle pour répondre aux besoins d’avenir dans un contexte de changement climatique.
Un équilibre actuel de la production des protéines qui questionnentL’Union européenne (UE) n’est pas déficitaire en protéines pour l’alimentation humaine ou animale, indiquent les auteurs du rapport, mais « les alternatives aux protéines animales conventionnelles sont de plus en plus envisagées, pour la santé, la nutrition, la durabilité et pour accroître la résilient de la sécurité alimentaire de l’UE ». A ce jour, il y a au contraire une surconsommation de protéines en Europe en moyenne, dépassant d’environ un tiers l’apport journaliser recommandé. Mais l’UE importe une partie des protéines qu’elle consomme, environ 26%, tout particulièrement le poisson et les crustacés, et les aliments pour animaux. Pour ces derniers notamment, l’UE importe 61% des protéines transformées destinées au secteur de l’élevage.
Ce « déficit en protéines alimentaires » pose problème à plusieurs titres. D’abord en matière de sources d’approvisionnement : l’UE dépend pour les engrais pour la production végétale seulement « d’une poignée de pays tiers », tout comme pour le soja. Cette situation la rend vulnérable à tout bouleversement potentiel qui pourraient avoir lieu dans ces pays. L’autre problématique soulevée est l’impact sur l’environnement de la production des protéines conventionnelles en termes d’émissions de GES et de consommation d’eau, tout comme la dépendance aux combustibles fossiles. Enfin, le changement climatique fait aussi peser un risque sur le potentiel futur de production des protéines végétales et animales.
Au bilan : « d'un point de vue mondial et européen, il existe des raisons géopolitiques et environnementales de remettre en question l'équilibre actuel en matière de protéines et de se demander s'il peut ou doit être maintenu. Un équilibre protéique différent pourrait impliquer non seulement un rapport différent entre les protéines d'origine végétale et animale, mais aussi l'utilisation de protéines alternatives. »
Des données manquantesDans ces conditions, selon les auteurs, si plusieurs scénarios prévoient une augmentation de la consommation de viande et produits laitiers, il y a donc « de bonnes raisons d’envisager des scénarios non linéaires à l’horizon 2050 ». Les protéines alternatives apparaissent intéressantes car elles sont produites « dans des environnements contrôlés ou aquatiques » et peuvent donc « constituer une source complémentaire ».
Mais à ce stade, les données manquent encore fortement sur ces alternatives, pour bien évaluer leurs impacts écologiques, leurs intérêts nutritionnels, ou les risques associés. Par exemple, « la consommation d'énergie pour la production de certaines protéines alternatives peut être équivalente ou même supérieure à celle de leurs homologues conventionnelles, et des sources d'alimentation spécifiques pour les alternatives, telles que les insectes et les algues, peuvent entraîner des émissions de gaz à effet de serre plus élevées que celles du soja. »
Par ailleurs, tous ces secteurs n’en sont pas au même stade de développement, notamment tous n’ont pas encore totalement atteint leur pleine capacité de production de masse.
Favoriser la recherche et développement en EuropePour les auteurs, « ces sources alternatives pourraient contribuer à renforcer la sécurité alimentaire et la durabilité en Europe si les obstacles actuels à leur adoption étaient surmontés. » Il faudrait en passer par l’optimisation des technologies et process y compris en matière d’impact écologique ; la hausse des capacités de production ; la réduction des intrants et des coûts opérationnels. La complexité et les exigences de la réglementation sont aussi un frein à dépasser.
Plusieurs leviers sont identifiés pour favoriser le développement de ces secteurs : financement ciblé de la recherche ; investissements de politique industrielle dans les infrastructures et installations de transformation ; prise en compte de facteurs environnementaux dans les processus d’approbation réglementation ; et enfin meilleure coordination entre politiques et parties prenantes. « Si elles sont mises en œuvre conjointement, ces options complémentaires pourraient soutenir le développement du secteur, permettant aux protéines alternatives de soutenir les objectifs de l'UE pour un approvisionnement en protéines plus durable, résilient et autonome », conclut le rapport.