Une sensibilisation des jeunes avocats au droit des animaux a été organisé afin qu’ils puissent œuvrer en faveur de leur bien-être.
Un premier séminaire rassemblant le pôle animal de la clinique juridique de la Haute Ecole des Avocats Conseils (Hedac) et l’ Association de Protection des Animaux par le Droit (Aprad), s’est déroulé le 10 décembre 2024 à Viroflay (Yvelines). Ce partenariat a pris forme afin de sensibiliser entre autres les jeunes avocats au droit des animaux, au respect des lois les concernant, et d’œuvrer en faveur de leur bien-être. L’Aprad compte dans ses rangs des personnes titulaires d’un diplôme de droit animalier mais venant d’horizons différents, dont plusieurs vétérinaires, et les interventions des deux consœurs invitées ont été très appréciées par le public, de par leur aspect « vécu », témoignages de l’expérience inhérente à notre profession.
Rôle du vétérinaire entre éthique, science et contradictions juridiquesClaire Borrou-Mens, vétérinaire, ancienne référente bien-être animal au Conseil de l’Ordre des vétérinaires et membre de l’Aprad, a exposé aux étudiants, juristes et avocats présents quelle est la place du vétérinaire dans le droit animalier, qui reste toujours très anthropocentré et ne correspond pas au droit des animaux. Le vétérinaire a deux missions complémentaires et parfois opposées, et cet aspect des choses est souvent ignoré. Il a certes une mission touchant l’animal quel qu’il soit, pour le soigner, le respecter, soulager sa souffrance, mais il a également une mission de protection vis-à-vis des humains : pour leur santé (hygiène des denrées d’origine animale, contrôle de la rage…) pour leur sécurité (animaux dangereux, animaux errants…). Il est parfois difficile de concilier ces deux aspects, ce qui met le praticien en porte-à-faux face à son éthique. De plus, les nombreuses incohérences du droit animalier sont autant de situations responsables du malaise de la profession : l’abattage rituel, la chasse en enclos, l’euthanasie de convenance, l’abattage d’un troupeau entier en cas de suspicion de zoonose, l’euthanasie des chiens dits dangereux…Et ce d’autant plus que ces décisions sont parfois incompatibles avec les données actuelles de la science. Notre consoeur en appelle donc à une réflexion pour retrouver une cohérence dans les textes.
Violences intra-familiales et maltraitance animale : même combatAnne-Claire Gagnon, vétérinaire et présidente de l’Amah, est intervenue sur le sujet du lien entre les violences intra-familiales et les violences sur les animaux. Depuis les années 2000, de nombreuses études ont montré que le lien entre maltraitance humaine et maltraitance animale était fort, et qu’au sein de la cellule familiale, enfants et animaux étaient souvent co-victimes de ces violences domestiques. En tant que témoins de ces violences, enfants et animaux peuvent par la suite en subir les conséquences toute leur vie : ainsi, les morsures mortelles par les chiens dont on apprend qu’ils ont subi des maltraitances représentent 21,1% des cas, et de la même façon il a été prouvé qu’un adolescent ayant assisté à des actes de violence sera plus enclin lui-même à la violence ou au harcèlement sur ses camarades. Certaines situations doivent alerter : par exemple, si un enfant maltraite un animal, il convient de chercher ce que lui-même a pu subir. Faire parler un enfant de son animal peut également libérer sa parole sur ce que lui-même peut vivre. Ainsi, les animaux de compagnie sont à la fois victimes, co-victimes car témoins, instrumentalisés (par peur de représailles sur l’animal, la personne maltraitée hésite à quitter le foyer), sentinelles involontaires des violences domestiques.
Un livre consacré à la question du droit animalCertaines des interventions de ce séminaire ont fait l’objet d’une publication dans un grand livre du droit, « Animal & droit, Bestiaire - Patrimoine juridique - Défis contemporains ». Deux consoeurs y ont également contribué : Geneviève Marignac, maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort a écrit sur le thème des « Euthanimales, intentions et pratiques » et Brigitte Leblanc, membre de l’Aprad sur le thème de « L’animal, entre la diplomatie et la guerre », en co-écriture avec Maxime Louis, juriste et vice-président de l’association. Cet ouvrage se veut le reflet des réflexions diverses que l’animal inspire au droit, en étudiant les approches historique et contemporaine sur tous les thèmes du droit, dans le but de retrouver l’harmonie entre l’humain et l’animal.